D’abord une petite devinette : Quel est le point commun entre BackBee, Concrete5, Dotclear, eXo, Finwe, fluxBB, Joomla!, Magento, phpBB, Xoops, e-Majine, Saytup, izi-Media, Vosao, Fiona, Wekio… ? Bravo, vous avez deviné ; ce sont tous des systèmes de gestion de contenu de Digital Learning ! Cela vous semble pédant et inutilement compliqué ? Pas du tout, il suffit d’écouter Abdelkader Boudriga, cofondateur de ‘Uptitude’, spécialisée dans le développement de dispositifs d’apprentissage digitaux et des contenus e-Learning, pour saisir les enjeux immenses du Digital Learning, à la faveur du Webinaire du 17 mars, entre innovation technologique et projet stratégique.
Tendance ‘apprentissage’ contre ‘formation’
Abdelkader Boudriga donne le ton dès les premiers moments du webinaire avec une suite d’enjeux aussi capitaux les uns que les autres : « Aujourd’hui, on ne parle plus ‘formation’ mais plutôt ‘apprentissage’ car les études montrent que l’enjeu est de permettre au nombre le plus élevé d’accéder à l’apprentissage de manière efficace et sécurisée. »
Ayant mis sur pied, entre 2001 et 2005, le tout premier programme de e-Learning en Tunisie avec son partenaire stratégique, Boudriga nous parle de ces années où le Online Learning d’alors était limité en matière de contenu : « Nous avions compris que le meilleur moyen est une combinaison entre digital et présentiel en synchrone, puis en 2010-2015, 70% de l’apprentissage se faisait On-the-job et cela a développé l’apprentissage à la demande. Nous sommes aujourd’hui dans une logique d’apprentissage contenu puisqu’on peut se former à l’ère des technologies mobiles. Ce qui nous mène à 2 constats : quand il y a un nouvel employé, on l’accompagne pour la compétence dans une logique de contenu structuré, standardisé à un grand nombre de recrues ; mais quand nous montons dans l’échelle des compétences, on a de moins en moins de présentiel et on se retrouve dans une configuration d’auto-apprentissage. Dans cette logique, c’est le Digital Learning qui nous donne la solution. »
La Covid-19, catalyseur du Digital Learning
Un constat que Boudriga va jumeler à un résultat essentiel de l’enquête menée par ‘Uptitude’-AHK sur la digitalisation de la formation au sein des entreprises en Tunisie : le facteur pandémie : « Selon les résultats de l’enquête, il était clair que la Covid-19 a fait que tout le monde soit beaucoup plus digitalisé. L’année 2020 a été un franc accélérateur, alors que le Digital Learning était déjà en franche évolution en Europe, en Afrique, en Amérique Latine. Selon une autre étude de 2018, l’évolution de la partie hardware sera plus faible en 2028 et c’est le contenu qui sera le champ le plus fort de la bataille pour l’apprentissage. C’est énorme en termes de taux de croissance. »
D’après lui, il est aujourd’hui primordial de bien prendre conscience que nous en sommes à l’apprentissage immersif (la Virtual Reality en est le premier exemple mais il y a plus simple). C’est la modalité la plus fascinante, celle qui n’était proposée que pour les plus nantis mais actuellement, grâce à la technologie, tout le monde peut y avoir accès. « Le simulateur immersif est le prochain jalon, il est l’avenir avec des coûts très compétitifs. Lors de notre enquête, 49% ont affirmé utiliser la VL, 100% ont annoncé l’adoption du digital en général (grâce au facteur Covid) et 25% ont dit être en hybride (Blended Learning). C’est la bonne nouvelle en Tunisie : certains sont en train d’utiliser la réalité virtuelle et je pense que cela va être une évolution généralisée dans notre pays pour les 3 à 4 années à venir », commente-t-il.
Contenu, technologies, Design, suivi
Le webinaire se transforme rapidement en ‘apprentissage’ de ses propres concepts quand Boudriga se lance dans une nécessaire décortication des 4 composantes du Digital Learning : contenu développement, technologies, Learnig Experience Design, Tracking et Assessment.
Selon lui, le contenu classique est glané par les utilisateurs qui cherchent eux-mêmes les contenus et cela pose des problèmes de mise à jour et de désorganisation et il faut que quelqu’un au sein de l’entreprise vérifie ce contenu, le nettoie et le valide pour qu’il soit utilisable. Il y a 3 types de fournisseurs : les plateformes micro Learning, les entreprises qui créent du contenu, le contenu générique hard et soft (les Big Players planétaires) et la curation de contenu est primordiale et la rédaction de contenu se fait par des Story Boarders, des outils auteur, des Instruction Designers, du design graphique (présentation, surtout pour les jeunes générations).
Quant aux technologies, il existe des outils pour contenu classique comme pour l’immersif. Ensuite, la plateforme pour y mettre le contenu, là où se pose une question d’accessibilité, de suivi/évaluation/reporting, et enfin d’échange et de partage. Le Learning Experience System se base sur le Content management system (CMS), Learning management system (LMS) et Learning content management system (LCMS) ; le premier étant un serveur web, le second un CMS utilisé pour gérer des contenus pédagogiques et le troisième, un outil d’édition de contenu. Certaines de ces technologies sont propres à l’entreprise, d’autres sont mises à disposition par la société mère, d’autres encore en location et en Open Source et de très nombreux outils existent, et certains à coûts abordables et dont une offre existe en Tunisie. Ces Learning Systems sont un gâteau de 25 milliards de dollars d’ici 2025.
Côté Learnig Experience Design, Boudriga nous parle de conception pédagogique où le rôle de sociétés comme ‘Uptitude’ devient de plus en plus celui de facilitateur. Alors que l’évolution va vers l’Instruction Design, quelle que soit la formation, l’idée est d’engager les apprenants, par exemple par des activités sociales. « Ce qui est important à noter quand je fais un quizz, c’est de bien comprendre que c’est aussi un moment d’apprentissage. Au niveau de l’interactivité apprenant/contenu, le parcours est généralement linéaire et l’engagement n’est pas élevé ; mais au second niveau, il est évident d’interagir. L’interaction élevée est une ‘expérience pédagogique’ avec possibilités multi-scénarios ; enfin l’immersion totale où l’apprenant décide de sa trajectoire, avec création de situations à différentes figures qui lui montrent le chemin vers des choix différents », souligne-t-il.
Nous en venons enfin au Tracking et Assessment et l’idée est qu’il ne suffit pas d’acheter une plateforme mais de faire le suivi multi-dimensions (une organisation apprenante lie l’apprentissage à l’évolution de carrière ; ce qui met les collaborateurs dans une situation de challenge).
Key Performance Indicators
Hautement technique (mais abordable avec un petit effort de concentration), le webinaire s’est également penché sur les évaluations en mettant en avant les fameux KPIs (Key Performance Indicators utilisés pour l’aide à la décision dans les organisations, particulièrement en gestion de la performance organisationnelle). Boudriga parle de facteurs quantitatifs (taux de connexion, consultation, compétition, temps, score) et qualitatifs (pré-lancement, participation, enquête de satisfaction) avant de s’arrêter aux tendances à venir : « Les prestataires sont engagés dans l’Adaptative Learning et l’évolution vers l’intelligence artificielle est prochaine sur la liste des Trends, là où on doit créer les conditions les meilleures pour les apprenants, se convaincre qu’il s’agit d’une expérience pédagogique plutôt que technologique. »
Il poursuit par les Musts de Leadership, capacité d’adaptation, empathie, créativité et des principales compétences sine qua non.
En écho, les questions posées par les participants ont également tourné autour des ‘Top compétences’ et Boudriga a assuré que cela tourne autour des 4 C (Les 4 compétences-phares : la Créativité… pour trouver des solutions, L’esprit criTique… pour réfléchir de manière logique, la Coopération et la Communication… pour travailler ensemble). Pour lui, il faut comprendre comment la nouvelle génération est en train d’apprendre et quelles sont ses valeurs (encadrement, Feedback).
Rappelons que ce webinaire fait partie d’un triptyque : C’est le premier de 3 webinaires. Le second sera consacré à la gestion de projets et les écueils ; le troisième au financement à la lumière de la nouvelle législation (remboursement sur la TFP, développement de contenu digitalisé) en duo avec Zied Rouissi, DG Centre National de Formation Continue et de Promotion Professionnelle (CNFCPP).