Lors de sa réunion du 29 mars dernier, le Conseil stratégique de l’économie numérique avait annoncé la création d’une nouvelle institution, l’Agence de développement du numérique (ADN). La décision n’était pas au goût du syndicat du Centre national de l’informatique (CNI). Celui ci a publié, dès le lendemain, un avis condamnant la décision et déplorant la création de cette agence. Elle s’apprête plus à une “tentative de détournement” des données sensibles et à caractère personnel stockées dans les data centers du CNI, déclarent-ils. “La création de l’ADN menacerait l’existence du CNI”, lit-on sur un deuxième communiqué publié le 2 avril dernier.
Le ministère des TIC veut-il vraiment se débarrasser du Centre et le remplacer par la nouvelle agence?
“Si c’était vraiment le cas, nous n’aurions pas réservé plus de 50 millions de dinars pour le développement du Centre”, a déclaré Anouar Maârouf, ministre des TIC lors d’une rencontre presse organisée hier, le 9 juillet 2018, au siège du ministère. “Contrairement aux accusations des employés du CNI, notre vision est de développer le Centre pour en faire un centre national d’excellence en développement informatique”, a-t-il ajouté.
Le ministre a expliqué que le CNI est un fournisseur de solutions techniques. Plus précisément, sa mission principale est le développement de solutions informatique au profit des institutions de l’État. Le Centre ne devrait donc pas intervenir sur la phase de conception, ni celle d’exploitation des projets comme c’est actuellement le cas, a ajouté Maarouf.
Plusieurs projets développés par le CNI n’ont pas eu le succès escompté à cause de ce schéma de fonctionnement, a ajouté le ministre. Il est inconcevable que le développement des plateformes se fasse sans l’intervention du maître d’ouvrage. “Dans le modèle de gestion de projets Think, Build, Run, c’est au maître d’ouvrage d’exprimer ses besoins auprès des experts métier dont la mission est de les traduire en un cahier de charges fonctionnel. Ce n’est qu’à cette étape que le fournisseur de services pourrait proposer la solution technique adéquate”, a indiqué le ministre des TIC.
L’Agence de développement du numérique viendra alors compléter ce maillon manquant du process, se chargeant de la conception des solutions informatique en coordination avec les maîtres d’ouvrage. “L’ADN aura la possibilité de faire appel aux services d’experts et de consultants pour des missions ponctuelles et qui ont la capacité de piloter de tels projets”, a souligné Maarouf.
L’ADN ne représenterait ainsi pas une structure parallèle au CNI puisqu’elle dispose d’un champ d’intervention plus large, insiste le ministre. L’activité de l’Agence touchera plutôt à différents aspects de l’économie numérique, à savoir l’infrastructure, l’e-gov, Smart Tunisia et l’e-business.
Par ailleurs, et malgré plusieurs tentatives, nous n’avons pas pu prendre contact avec des responsables du CNI pour nous exposer leur point de vue sur la question.
C’est quoi l’ADN?
“En 2016, c’est à dire 4 ans après le lancement du programme Tunisie Numérique, nous avons constaté que seuls 5% des projets étaient réalisés. Encore plus, 75% étaient toujours au stade de l’idéation”, a indiqué le ministre. Et d’ajouter: “Notre bilan a révélé que trois facteurs en sont la cause principale: l’absence d’une structure de gestion horizontale des projets, une gestion peu optimale des ressources du Fonds des TIC et l’incapacité de l’administration de recruter les compétences nécessaires. D’où l’idée de créer une institution capable de parer à ces obstacles”.
Le ministre regrette que plusieurs contraintes ont fait de l’Agence un établissement public à caractère non administratif avec “au plus 20 employés”. Elle aura tout de même la possibilité de recruter des consultants et des experts avec des contrats à durée déterminée pour piloter les différents projets qui seront mis en œuvre après sa création. L’ADN sera également dotée d’une grande flexibilité pour ce qui est des appels d’offres. “L’idée est d’avoir un établissement public avec les avantages du privé”, a conclu le ministre des TIC sur un ton positif.