La Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie (CONECT International) a organisé une conférence prioritaire le mercredi 22 juin. La priorité réside dans l’urgence de la réalisation des objectifs de 2030 : 35% de l’électricité produite grâce aux énergies renouvelables en Tunisie. Elle a réuni le Groupement Professionnel des producteurs des énergies renouvelables ≥ 1 MW de la CONECT. Le thème portait sur « Les énergies renouvelables pour pallier au déficit énergétique en Tunisie »
Tarek Cherif : le premier moteur de croissance d’un pays est l’investissement
Tarek Cherif, président de la CONECT, présente les nombreux avantages d’une résolution du blocage autour de l’exploitation privée des énergies renouvelables. “La production d’électricité à partir des énergies renouvelables permettra la création de centaines de milliers d’emplois. Le prix de l’électricité va baisser donc il y a une augmentation de la concurrence de l’électricité tunisienne. C’est simple : il y a 100% de création de valeur. La caisse de compensation dépense entre 30 et 40% de la part sur l’énergie. De l’électricité propre va booster les dépenses en devises et attirer les investisseurs vers la Tunisie. En donnant un signal fort d’investissement, cela va renforcer les institutions, augmenter le pouvoir d’achat et garantir l’autonomie de l’énergie. Les investissements à Malte et en Algérie ont commencé après nous et l’investissement a plus progressé qu’en Tunisie. Le partenariat public privé est nécessaire à l’investissement”
Abdellatif Hamouda : il faut rattraper le train de la transition énergétique avant qu’il ne soit trop tard
Abdellatif Hamouda, président de la chambre syndicale, montre la position stratégique de la Tunisie sur le photovoltaïque. “Nos nombreuses heures d’ensoleillement font de nous parmi les premiers pays au monde à ce niveau. Nous avons 3000h d’ensoleillement par an contre 1500 en Europe. Notre deuxième atout est la douceur du climat, par rapport à des pays plus chauds comme les pays du Golfe ou d’Afrique subsaharienne. Ces températures préservent les panneaux photovoltaïques de chaleurs trop élevées, délétères”
Le plan gouvernemental de transition énergétique a commencé en 2015 avec l’objectif en 2030 de parvenir à 35% de production d’électricité à partir des énergies renouvelables. Or, la situation est loin de correspondre à ces objectifs. Selon Hamouda : “Nous avons actuellement 95% de production énergétique à partir d’énergies fossiles. La majorité provient du gaz. Nous sommes seulement à 3% d’électricité propre, contre 35% dans un peu plus de sept ans.”
Il y a un risque de se retrouver dans une situation similaire au Liban. “Le Liban a des problèmes économiques à cause de l’absence de transition énergétique. Les Libanais n’ayant pas de générateur domestique sont sans électricité. Alors que certains pays dans le monde que nous avons visité en 2017 avaient des villes à 100% énergie renouvelable. C’est le cas en Allemagne”
Une situation difficile pour les producteurs comme les consommateurs
Abdellatif Hamouda alerte sur la situation critique des producteurs privés. “D’ici 5 ans il n’y aura plus de gisement de gaz en Algérie. Or, nous avons une dépendance à 50% de l’import de gaz de l’Algérie pour la production d’électricité. Chaque année, 400 millions de dinars sont perdus par l’Etat à cause de l’absence de transition énergétique.”
Le Groupement énonce les projets en attente depuis plusieurs années : 67 projets bloqués, dont 24 projets de 10 mégawatts soit un total de production de 240 mégawatts. Actuellement, seul le projet Enfidha est fonctionnel. Entre l’éolienne et le photovoltaïque, 894 mégawatts sont perdus chaque année par manque d’exploitation.
L’obstacle principal du fonctionnement des centrales de production est leur raccordement au réseau de la STEG. Un groupement syndical proteste contre le raccordement des privés au réseau national. Alors que ce raccordement est avantageux pour toutes les parties.
Abdellatif Hamouda a déclaré que le prix du renouvelable est ⅕ du prix fossile. Donc cela revient à 71 millimes/kWh, contre plus de 300 millimes/kWh pour les paliers les plus hauts de consommation électrique.
Tarek Ben Ayed, un investisseur privé, a mis plus de 3 millions de dinars dans un projet d’électricité photovoltaïque à Matmata de 1 MW. Prête à l’usage depuis octobre 2020, sa centrale de production est à l’arrêt depuis près de deux ans. “Non seulement, l’investissement est important. J’ai également des dettes conséquentes que je dois rembourser chaque mois. Des sommes colossales sont perdues par l’absence d’exploitation de la centrale, laissée à l’abandon. Enfin, l’élément primordial est l’avenir de l’électricité. Tout est appelé à s’électrifier, le transport, la digitalisation croissante. Cela va faire énormément augmenter les besoins en électricité. Les prévisions parlent de passer de 5,5 térawatts à 55 térawatts dans 30 ans. C’est pour cela qu’il faut diversifier les sources de production.”