Par Hend Fellah
L’univers entrepreneurial, plus envoûtant que jamais : concours, compétitions et autres challenges sont continuellement organisés afin de répondre à cette frénésie de l’entrepreneuriat à l’échelle mondiale. Ramla Jarrar, DG et co-fondatrice de Mass Analytics, nous raconte son expérience à la Startup Istanbul, un des plus grands meetings d’entrepreneurs de l’Eurasie.
Comme vous l’aurez compris, l’événement s’est déroulé en Turquie entre les 6 au 10 octobre dernier, au cœur du tourbillon économique liant l’Europe à l’Asie. La compétition a réuni 100 startups, choisies parmi plus de 24 000 postulants. La sélection a été faite sur la base de trois Skype calls examinant le business model et le produit, le but étant de choisir les startups les plus prometteuses. A cela ont suivi deux jours de formation, durant lesquels les candidats ont eu droit à des talks avec de très grandes personnalités comme le vice-président de Tweeter et à un mentoring ciblé afin de peaufiner leur pitch et combler les lacunes liées à leurs présentations.
Le marathon entrepreneurial
Les candidats se sont divisés en cinq groupes de 20 startups, pour divers ateliers où ils devaient à chaque fois pitcher devant un panel différent, afin de garantir la rotation du jury, en tirant profit des feedbacks des différents membres des panels. A la suite de ce marathon entrepreneurial, 50 startups ont été retenues pour passer la sélection finale.
Devant une audience de plus de mille personnes, constituée de chefs d’entreprise, de business angels et d’investisseurs, les 50 sélectionnés ont eu droit chacun à deux minutes trente, pour pitcher leur startup et par la suite répondre aux différentes questions du jury. Une sélection qui valorise à ce stade principalement l’équipe et son expérience, la capacité du produit ou service à accéder au marché international et si l’équipe managériale a déjà pu convaincre des clients.
La Tunisie en finale de la Startup Istanbul
Pour notre plus grand bonheur, Ramla Jarrar et ses associés Nadia Bouzguenda et Firas Jebloun ont su briller par leur présentation et leur idée novatrice et ainsi passer au round final des 15 finalistes. Il s’agit de la startup MASS Analytics (modélisation Analytics et Software Solutions). C’est un outil qui vient en aide aux entreprises afin de mesurer la performance de leur marketing mix et de comprendre l’efficacité et le retour sur investissement (ROI) de chaque dépense en publicité ou action marketing. Elle propose ainsi une évaluation de l’impact d’un plan marketing donné et vient en aide aux sociétés afin de maximiser leur retour sur investissement. Une idée aussi ingénieuse que performante qui a trouvé un écho favorable auprès de plusieurs investisseurs présents lors de cette compétition.
Parmi les 15 finalistes composés de différentes nationalités: Indonésie, Pakistan, Maroc, Tunisie, Grèce, Pologne, Croatie et Turquie, trois ont accédé au podium final. Commentaire de Mme Jarrar concernant le déroulement de la compétition : « La Startup Istanbul a été une expérience extrêmement importante pour nous mais également pour promouvoir l’écosystème entrepreneurial tunisien. Nous avons pu rencontrer des investisseurs du monde entier et nous ouvrir davantage à ce qui se passe ailleurs. Néanmoins, pour ce qui est de la compétition, c’est dommage que les différents compétiteurs ne soient pas au même niveau de maturité. Nous nous sommes retrouvés face à des startups déjà bien établies, cherchant à se développer davantage. Le choix du jury s’est porté sur des
startups innovantes certes mais également avec une bonne assise financière, chose que nous n’avons pas forcément. Cela reste néanmoins une expérience extrêmement positive, puisque nous avons pu entrer en contact avec des investisseurs étrangers et susciter l’intérêt de certains VCs ».
La finalité de cette compétition, nous explique Firas Jabloun, directeur technique de MASS Analytics, n’était pas financière mais a trait à la notoriété, à l’exposition et la médiatisation, des éléments très impactants. C’est important que les jeunes startuppers soient conscients de l’importance de ces événements qui leur permettent d’acquérir de l’expérience en termes de pitchnig et de capacité à convaincre.
Toujours est-il que c’est sur un ton très amer que Ramla jarrar a déploré la non-implication des capitaines d’industrie tunisiens dans l’écosystème des startups. « Pour ce qui nous concerne, nous avons plus de références à l’international qu’en Tunisie. En Turquie, la majorité des startups ont bénéficié du soutien des grandes entreprises locales ». Firas Jabloun abonde dans le même sens en insistant sur l’importance de l’économie du savoir :« Il faut croire aux jeunes startups, les encourager, financer l’innovation. Les startups peuvent être des bouées de sauvetage qui assureront la survie et l’ancrage dans l’économie de demain d’entreprises déjà établies depuis des années ».
Pour conclure sur une note optimiste, Mme Jarrar souhaite voir cette expérience renouvelée, mais également partagée par tous les jeunes entrepreneurs tunisiens à qui une ouverture vers le monde extérieur manque indéniablement. Il faut que l’Etat, à travers ses organismes, encourage la participation des jeunes entrepreneurs à ce genre d’événement et prenne en charge une partie des frais. Cela peut paraître peu de choses mais ça pèse lourd, très lourd dans le budget de startups en gestation.