C’est en présence d’un parterre d’experts, de représentants de l’Union européenne, et de chefs d’entreprises que s’est déroulée la 6ème édition du Tunis Forum. Organisé par l’IACE, l’événement s’est focalisé sur une thématique centrale qui agite la scène politique et économique: la convergence réglementaire entre l’UE et la Tunisie, dans le cadre de l’ALECA.
Il est bien connu que l’ALECA a pour objectif le renforcement des relations UE-Tunisie. Et pour cause, une des priorités de l’accord est la convergence réglementaire entre les deux parties, soit, en d’autres termes, l’alignement des lois et règlements sur ceux de l’Europe.
Pour l’IACE, la convergence réglementaire est considérée aujourd’hui comme un rapprochement stratégique vital qui permettra, à terme, une meilleure attractivité de la Tunisie, sans toutefois oublier ce que cela présuppose en termes de coûts. En effet, avec les négociations de l’ALECA que la Tunisie a l’intention de signer d’ici 2019, un saut générationnel va être établi dans la conception de la relation entre la Tunisie et les pays membres de l’UE.
Mais pour atteindre cette finalité, certaines interventions doivent être envisagées afin de combler l’écart entre les différentes normes et permettre une intégration concrète de la Tunisie au marché européen, dont l’accès est de plus en plus difficile avec les directives émises par l’Europe pour ses futurs partenaires, précise l’IACE. Ainsi et afin d’assurer cette intégration de la Tunisie, il sera important de soulever certaines interrogations : quel programme de convergence réglementaire doit-on mettre en œuvre ? Y a-t-il des préalables aux processus de convergence règlementaire ? Quel est le coût économique de cette convergence réglementaire ? Sommes-nous orientés vers une convergence ou un protectionnisme réglementaire ?
Que pensent les chefs d’entreprise ?
Le secteur privé doit être une partie prenante pleine et entière dans les négociations. C’est l’appel unanime des chefs d’entreprise lors de cette 6ème édition. En ouverture du Forum, Tayeb Bayahi, président de l’IACE a lancé un appel pour la mise en place d’une plateforme de dialogue et de participation effective du secteur privé et de la société civile dépassant la simple consultation. Précisant que “la convergence réglementaire est un processus continu, engageant un coût que les entreprises vont devoir supporter”.
Taieb Bayahi a également appelé l’UE à engager un programme national de convergence réglementaire avec des budgets dédiés, à l’instar d’autre pays comme le Maroc, insistant: “Nous appelons à cet effet que la mise en place de tels programmes soient inscrite parmi les axes essentiels des programmes d’appui qui accompagnent les négociations, mais il est aussi vital que ces programmes se poursuivent au-delà de la signature par un système de veille et de suivi”. Aussi, précise le président, il faudrait que cette convergence réglementaire représente un intérêt pour tout le monde. D’où la nécessité de renforcer l’adhésion de tous : gouvernement, société civile, administration, structures régionales”
Le président a également souligné que la Tunisie a besoin d’ouverture. “L’ALECA constituera pour la Tunisie une opportunité si l’on arrive à en tirer profit tout en se préparant aux impacts négatifs de cette ouverture.” Le président a attiré l’attention sur trois points essentiels, à prendre en considération dans le cadre des négociations: “Pourquoi négocier un tel accord si on ne met pas en place les politiques publiques adéquates pour en tirer profit ?” faisant référence à l’impératif d’une cohérence entre les objectifs du nouveau Code d’Investissement, du prochain plan de développement et d’autre part aux opportunités offertes par l’ALECA. Le deuxième est l’importance de suivre une démarche inclusive et participative dans le processus de négociation afin que les opérateurs économiques, qui seront directement impactés par cet accord, soient confiants, engagés et optimistes quant aux résultats de ces négociations.
Pour Walid Bel Hajd Amor, vice-président de l’IACE, “la convergence réglementaire est un sujet essentiel de la négociation dont nous devons être capables de mesurer les impacts. Il s’agira de dizaines de milliers de réglementations à modifier, à adopter et à digérer avec tout ce que cela suppose comme organisation en amont et en aval.”
Pour le responsable, toute opportunité recèle des menaces et inversement toute menace présente des opportunités à celui qui sait les identifier et les saisir, déclarant: “C’est une opportunité pour nos entreprises les plus avancées, celles qui n’ont pas attendu cet accord pour aller à l’abordage de leurs concurrents européens sur leur propre terrain. C’est une menace pour d’autres, aussi nous devrons gérer le rythme pour leur donner le temps de se mettre aux normes et atteindre des niveaux durables de compétitivité. A ce titre, mieux vaut un bon accord tardif qu’un mauvais accord rapide”.
Le gouvernement aurait mis la vitesse supérieure…
“Nous avançons avec plus de célérité au niveau des études d’impact” C’est ce qu’a annoncé Hichem Ben Ahmed, secrétaire d’Etat auprès du ministère du Commerce et négociateur en chef pour la Tunisie à l’ALECA. Le responsable a indiqué l’engagement du gouvernement de conduire un accord qui aille dans le sens des priorités actuelles du secteur privé: “Plusieurs secteurs sont loin des niveaux de compétitivité des entreprises européennes, les négociations se dérouleront selon une approche asymétrique et à travers un processus progressif accompagné d’études d’impact”, a souligné le responsable.
Du côtés des mesures envisagées par le gouvernement pour soutenir l’activité économique, Hichem Ben Ahmed a indiqué l’allègement des charges fiscales sur les entreprises, la mise en place d’une ligne de financement au profit des PME et le soutien pour les projets de PPP.