C’est au redémarrage de Allin’Novation que la FTAV, FTH, The Dot et OST ont lancé un débat pour booster l’innovation dans le tourisme, à la faveur d’un panel à la 9e édition de Riyeda, le salon de l’entrepreneuriat et de l’innovation (15 et 16 mars 2022) en mode hybride à la Cité de la culture. Une initiative visant à rapprocher le monde du tourisme du monde de l’innovation mais qui semble se heurter à toutes sortes de barrières culturelles et institutionnelles.
« C’est un mariage entre innovation et voyage! Le salon Riyeda accueille un focus sur le tourisme au moment où le secteur se réinvente, conscient qu’il ne sera jamais plus le même après la Covid », annonce Houda Ghozzi, fondatrice de l’Open Startup International Tunisie-Maroc, qui a accompagné plus de 250 startups.
C’est en juin 2021 que la FTAV et la FTH ont mis en place un Comité stratégique innovation pour réfléchir sur l’innovation dans le secteur et initier un écosystème ad hoc via une collaboration entre l’Etat, les universités, les opérateurs classiques, les entreprises innovantes, les startups, les investisseurs, les organismes de soutien aux entrepreneurs, les bailleurs de fonds… Les activités du comité, qui sont encadrées et assistées par Open Startup Tunisia et The Dot, le hub d’innovation digitale en PPP, ont été ponctuées en octobre dernier du lancement de Allin’Novation afin de rapprocher le monde du tourisme du monde de l’innovation et de le réinventer.
Portrait-robot et tendance « workation »
Houda Ghozzi lance le débat autour de cette initiative Allin’Novation avec Nadaa Ghozzi, présidente du Comité innovation FTAV, DG Select Travel & Tours; Mehdi Mezghani, Chief Information and Innovation Officer Nouvelair; Skander Mestiri, fondateur & CEO de Dar Marsa, et Jihen Makni, cofondatrice et CCO Historiar. Au fur et à mesure, le portrait-robot du secteur apparaît tel qu’il devrait être.
Nadaa Ghozzi avertit que le tourisme se concentre désormais sur la User Experience du client de demain qui réfléchit au prix, à la durabilité, à des tourismes alternatifs… Mehdi Mezghani insiste sur l’impératif d’apprendre à apprendre, de coupler une stratégie à court terme à celle de long terme pour être capables de réagir et de comprendre que le New Normal est le Contactless. Skander Mestiri attire le débat sur la transformation du client qui achète désormais à partir de chez lui, monte son voyage seul alors qu’il est influencé par les images et les réseaux sociaux, pas par les professionnels. La nécessité d’être plus visible sur les plates-formes est d’ailleurs reprise par tous. Jihen Makni ajoute que le tourisme continue à prendre des formes nouvelles (le tourisme culturel vaut 200 milliards de dollars par an) en tenant compte de la tendance workation (work + vacation) après la Covid et que tout peut être source de tourisme si on est créatif!
Tourisme « désintermédié » et activisme interne
Remettant les pendules à l’heure, Houda Ghozzi estime qu’il est temps d’utiliser la loupe quand on arrive à l’aéroport Tunis-Carthage et que l’on doit remplir un petit papier sale à tamponner physiquement, que le taxi nous arnaque, que le touriste est dépité… avant de se préparer au nouveau tourisme. Rumeur d’approbation dans les rangs des intervenants mais on avance; on continue de parler du tourisme de demain qui est « désintermédié » par nature, avertissant que si l’agence ne valorise pas son offre, elle va disparaître. Un terme repris pour décrire le fait que les professionnels doivent compter sur eux-mêmes et ne pas attendre grand-chose de l’administration. L’activisme interne n’est pas loin!
Pourtant, il faut bien travailler avec les autorités, et les intervenants évoquent des efforts à faire en matière de Mobile Checking avec un simple QR code, de juguler les barrières, de promouvoir partout le digital, d’oser une com très spécifique à chaque région et chaque produit (cela doit venir des opérateurs qui connaissent les arguments pour interpeller les touristes), de ne pas se reposer sur une administration qui s’endort sur ses lauriers… mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain car le tourisme classique continuera à exister (à condition d’innover), notamment sur la destination du Grand Tunis (marché où il y a beaucoup de valeur avec 200 euros la nuitée) et, dans tous les cas de figure, tout le monde doit faire rêver, offrir des machines à remonter le temps, proposer des expériences immersives!
Finis les « pompiers », voici les « agriculteurs »!
C’est dire si une pluie de recommandations s’est déversée sur ce panel dédié à l’innovation du tourisme. Les professionnels ne veulent plus qu’on les appelle à la rescousse comme des pompiers pour sauver la saison, ils veulent désormais être des agriculteurs qui plantent des graines! Ils estiment qu’il faut se faire à l’idée que l’innovation va détruire certains opérateurs qui seront remplacés par d’autres (c’est la logique de l’avancée dans la création de valeur). Les autorisations et la loi de change nous empêchent de respirer; c’est une épée de Damoclès toujours suspendue, affirment-ils. Même cas pour le manque d’infrastructures de toutes sortes, les lenteurs, le défaut de préparation aux monnaies à base NFT qui seront sans aucun doute incontournables à l’avenir.
Ce qui est clair, c’est que ces professionnels ne veulent plus compter que sur eux-mêmes quand c’est possible, y compris pour l’Open Sky qui devrait, selon eux, abolir les situations de monopole et permettre de s’introduire sur les marchés italien, allemand, suisse. Ils se disent ouverts aux idées, mais ils ont besoin que l’Etat fasse des efforts pour décentraliser, leur faire confiance, faire tourner l’innovation autour des cercles d’innovation (comme les cercles de qualité)!