C’est tard dans la soirée du lundi 28 février que la Banque centrale a annoncé avoir “constaté la cessation de paiement” de la BFT et qu’elle a procédé, à cet effet, “à la transmission d’un rapport au tribunal de première instance de Tunis”. La BFT n’est techniquement pas encore en faillite ― seul un juge peut la déclarer en tant que telle ― mais il paraît que, pour l’institution financière, la messe est dite.
Malgré ces développements, il semble qu’il n’y ait pas de raisons pour paniquer, du moins selon le gouverneur de la Banque centrale et président de la Commission de résolution des banques et des établissements financiers en situation compromise, Marouen Abassi. “Les dépôts de la banque ne représentent que 0.02% des dépôts du secteur et son encours de créances est de 279 MTND, soit 0.2% des engagements”, a-t-il expliqué lors d’une conférence de presse organisée mardi 1er mars 2022 au sujet de la BFT.
De son côté, Jaafar Khattech, directeur général du Fonds de garantie des dépôts bancaires, a rassuré les clients de la banque “qu’ils seront remboursés à hauteur de 60 mille dinars, conformément à la loi tunisienne, dans un délai de 20 jours de la constatation de la fermeture de la banque”, a-t-il assuré. Il a ajouté que ce remboursement aura lieu grâce aux réserves du fonds (environ six millions de dinars) constituées collectivement par toutes les banques de la place.
Pour les personnes ayant plus de 60 mille dinars de dépôts chez la BFT, Khattech a indiqué que leur nombre se limite à 33 personnes et que leur indemnisation pour les sommes au-delà des 60 mille dinars doit passer par le liquidateur.
Khattech a indiqué que la liquidation de la BFT va permettre au fonds de parfaire ces processus et d’améliorer encore plus sa capacité à faire face à des situations similaires. De son côté, Sonia Zoghlami, représentante du ministère des Finances dans la Commission de résolution des banques et des établissements financiers, a indiqué qu’aucune autre banque ou institution financière ne risque de se trouver dans une situation pareille.
Quant aux salariés de la banque, dont le nombre est de 72, ils vont être “distribués” sur les banques de la place, a indiqué Mohamed Agrebi, président de l’Association professionnelle tunisienne des banques et établissements financiers. Agrebi a également indiqué que 80% des salariés de la BFT seront absorbés par les 10 banques cotées alors que certaines banques seraient exonérées de cette opération.
En ce qui concerne les craintes de l’impact de la faillite de la banque sur la note souveraine de la Tunisie et sur la position du FMI, Marouen Abassi a indiqué que la Tunisie va démontrer qu’elle dispose des mécanismes nécessaires pour traiter ce genre de situations.
Une banque dans la tourmente
Bien avant l’annonce de la Banque centrale, la BFT a fait couler beaucoup d’encre, puisqu’elle a été, pendant plus de trente ans, au centre d’un litige qui opposait l’État tunisien à l’avocat Majid Bouden. “Ce litige a lourdement impacté la performance de la banque”, a indiqué Marouen Abassi.
Interrogé sur ces performances, le gouverneur de la Banque centrale a souligné que la BFT a enregistré au cours de l’année 2020 des pertes nettes entre 400 et 500 millions de dinars.
Quel serait donc l’impact de la liquidation de la BFT sur le litige ? Abassi a indiqué qu’il souhaite ne pas répondre à cette question afin de protéger les intérêts de l’État tunisien dans l’affaire objet d’arbitrage actuellement devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cidri).