Lors de mon dernier cursus à l’Université d’Oxford, l’un de mes collègues a questionné le professeur au sujet du ‘’venture capital’’ (VC), le capitale-risque : Quid de l’investissement en Afrique ?
Le professeur a répondu avec beaucoup d’enthousiasme et de certitude : ‘’Vous avez intérêt à investir au plus vite en Afrique ! Ce qui se passe actuellement dans ce continent est l’équivalent du boom des années 90 en Amérique du nord et du début des années 2000 en Europe !’’.
Ayant toujours manifesté une curiosité autour de l’entrepreneuriat et de l’innovation en Afrique, je me suis intéressé à l’indice de l’innovation (Global Innovation Index). A ma grande surprise, j’ai constaté qu’aucun pays africain ne figurait dans le top 50 ! En première lecture, la conclusion peut contredire les propos du professeur. Sauf que, si nous nous explorons davantage, nous observerons une nette amélioration de ce continent au début du dernier millénaire en termes d’investissement et surtout du capital risque. Néanmoins, selon l’indice d’innovation, il y a encore du travail aux niveaux des ressources financières et de l’accès à la technologie. Par conséquent, afin de développer l’entrepreneuriat et l’innovation, il faudra une meilleure attractivité des capitaux, qui sont intéressés essentiellement par trois importantes variables :
- Marché : pour les VC, plus le marché est important mieux c’est.
- Business model : c’est à ce niveau qu’on découvre l’innovation et la créativité des entrepreneurs et des startuppers pour être attractifs et intéressants aux yeux des investisseurs.
- Fondateurs : l’expertise, le know how et ses compétences intrinsèques.
Sans oublier le cadre macroéconomique et le climat d’investissement en général, bien entendu.
Innovation et levée de fonds… !
Le ‘’venture capital’’ ou capital risque est l’une des sources importantes pour le financement de l’innovation et le développement des startups et entreprises en phase de démarrage. Il aide à autonomiser les entrepreneurs, encourage le développement économique, réduit le gap de la pauvreté et favorise la création de l’emploi. Selon l’une des dernières publications de l’African Private Equity and Venture Capital Association (AVCA), le paysage du capital-risque (VC) et de l’entrepreneuriat en Afrique est en pleine mutation et poursuit une croissance rapide. En effet, les évolutions macroéconomiques du continent ont participé à favoriser un environnement économique propice et à accélérer les investissements en capital-risque en Afrique pour atteindre des pics ces dernières années.
Désormais, la valeur et le volume des transactions de capital-risque en Afrique de 2014 à 2019 et la taille de l’investissement des transactions de capital-risque connaissent une croissance significative.
Selon AVCA, l’augmentation significative de la valeur des transactions de capital-risque en 2019 – presque 100% par rapport à 2018 – s’explique par le fait que l’écosystème de startups est en plein essor en Afrique. Force est de constater que divers pays ont appliqué des politiques qui favorisent un environnement propice aux startups et aux petites entreprises. En fait, avec le startup act, la Tunisie a initié une législation favorable aux startups. Cette démarche, a été par la suite, consolidée avec le lancement d’un fond des fonds. Une démarche qui a eu de l’écho sur le continent et qui a été suivie par le Sénégal, puis par le Rwanda, ainsi que le Maroc et le Ghana qui poursuivent actuellement des politiques similaires.
Les VCs adorent les grands marchés !
Si on peut considérer le volume d’investissement assez équilibré sur les deux côtes east et west, nous observons cependant deux pelotons en terme d’investissement.
Selon Partech analysis, 1,4 milliard USD ont été investis par les VC en 2020 dont 88% dans les ‘’big five’’ à savoir le Nigeria, le Kenya, l’Egypte, l’Afrique du sud et le Ghana, et 11% pour le reste des pays.
L’explication n’est pas difficile à deviner si ce n’est une preuve en plus que plus le marché est important mieux c’est ! Désormais, les VCs aiment les grands marchés qui peuvent favoriser la forte croissance via ‘’la scalabilité’’ et ‘’la traction’’.
Quid de l’Afrique du nord et du Maghreb !
Il est clair que le reste des pays africains doivent réfléchir et agir en mode cluster régional pour une meilleure compétitivité et attractivité des capitaux tel que le premier peloton évoqué ci-dessus. La startup act est une condition nécessaire mais pas suffisante. En effet, cette réflexion et cette démarche régionale ne peuvent qu’être bénéfiques pour le développement économique des pays et des entreprises.
L’un de ces clusters qui peut susciter de l’intérêt est le Maghreb. Nombreux sont les facteurs qui peuvent favoriser la réussite d’une telle expérience, tels que la langue, l’histoire, les traditions, la religion et surtout… le couscous !
Ma récente expérience dans la co-organisation du premier hackathon virtuel sur le Maghreb avec EY en collaboration avec le coopération internationale allemande GIZ m’a confirmé la facilité et l’aisance de l’échange entre les pays de ce cluster ainsi que le fort potentiel de connexion entre startups et grandes entreprises afin de créer de la valeur.
Récemment, la banque mondiale via ICF vient de mobiliser un nouveau programme d’assistance technique au profit des startups du Maghreb visant à leur faciliter une plus grande intégration régionale. Il permettra de développer de nouveaux partenariats avec des bailleurs de fonds et de créer des synergies pour promouvoir l’écosystème des startups à travers le Maghreb.
Cependant, à mon avis, ce cluster à plus de 90 millions d’habitants ne doit pas se restreindre à cette initiative. Bien au contraire, il doit multiplier les canaux pour une meilleure synergie.
Je continue à croire que l’une des clés du succès reste la diaspora qui peut investir dans ces startups, les assister à s’exporter avec un soft landing en Europe ou en Amérique du nord et favoriser l’internationalisation de leur savoir-faire. De même, je demeure intimement convaincu que cette diaspora nouvelle génération a de l’expertise, le réseau ainsi que les fonds à injecter dans ces startups. Ayant dépassé les restrictions de voyage et de déplacement actuelles, la due diligence ne sera plus un point bloquant.
Désormais, l’un des plus grands challenges du Maghreb est la convertibilité de la monnaie locale ainsi que la politique de change. D’où la nécessité d’investissement en monnaie étrangère ou bien en monnaie virtuelle ou ‘’crypto monnaie’’. En plus, si l’investissement dans les startups se libéralisait en crypto monnaie en premier lieu, et les transactions commerciales se faisaient avec la même monnaie virtuelle en second lieu, alors l’investissement en monnaie étrangère en période ‘’early stage’’ ne représenterait plus un blocage en soi. L’expérience du Salvador qui vient d’ adopter une monaie virtuelle comme monnaie officielle peut être inspirant. Par la suite, pour cette région, on peut prendre en considération l’avantage culturel ainsi que celui de la langue comme des éléments ultérieurs qui faciliteraient l’acheminement de la due diligence, souvent souhaités en personne en cette phase de démarrage. Également, l’exportation ne peut qu’être bénéfique pour les startups locales, en augmentant leur valorisation sur l’autre rive de la méditerranée. La diaspora jouera donc le rôle d’un business Angel et préparera le terrain pour les VC pour les nouveaux tours de tables.
L’investissement de la diaspora maghrébine constitue ainsi un levier pour le développement de l’écosystème en Afrique en général, mais encore plus au Maghreb, afin d’attirer les ‘’Venture capital’’ et promouvoir l’innovation au niveau de ce cluster. Pour y parvenir, la crypto monnaie est une sérieuse solution pour dépasser l’enjeu du risque de change.
Un Maghreb…. un écosystème…. un marché