La patience du Conseil du Marché Financier s’est épuisée face aux manquements des sociétés cotées en matière de communication financière. Retarder des publications pour des mois, voire des années, est un signe de non-respect pour les investisseurs qui ont mis leurs argents dans les titres de ces entreprises.
Bien que ces sociétés aient leurs propres raisons et que le marché les a déjà sanctionnées, le problème de la communication financière est plus que jamais à la une. Pour rappel, les sociétés qui ont un historique parfait en matière de publications des comptes se font rares. La majorité font du retard, mais dans des limites « acceptables » de quelques jours ou semaines.
Cela pose le problème de l’organisation interne des entreprises cotées. Une entité qui a ouvert son capital au public ne peut pas fonctionner comme si elle était avant son introduction en Bourse. Pour la majorité des managers, on continue à fonctionner normalement comme s’ils étaient avec le même tour de table, sauf qu’il y a des minoritaires à respecter. D’ailleurs, nous pensons que les choses ne vont réellement changer qui si un groupe d’actionnaires minoritaires lance une action en justice contre une société de la Cote. Là, il y aura une prise de conscience généralisée par toute la Place financière. Un groupement d’actionnaires détenant 3% seulement du capital a la possibilité de tout remettre en cause. C’est pourquoi la Bourse de Tunis ne se contente plus d’un simple engagement de créer un département de contrôle interne après l’IPO par exemple, mais elle exige son existence pour pouvoir postuler une admission.
Nous pensons qu’il faut également obliger les sociétés à avoir une personne responsable des relations investisseurs. Pour le moment, c’est généralement la Direction Administrative et Financière qui prend cela en charge. Mais en réalité, le marché a besoin de plus de cela. Certes c’est une charge additionnelle, mais la société pourrait gagner beaucoup plus en sa valeur. Qui sont les sociétés qui publient un calendrier avec des dates précises pour leurs publications financières ? Aucune alors dans partout dans le monde, on connaît déjà le calendrier de 2021, les dates des Assemblées générales et de distribution de dividendes. C’est comme ça qu’on attire les investisseurs locaux et étrangers et on les fidélise. Lors de la crise de la COVID-19, c’est le régulateur qui poussait les sociétés à fournir des données sur l’impact de la crise.
Actuellement, nous avons un autre problème concret. Les banques ont publié leurs états financiers semestriels, mais pas avec le même traitement des mesures décidées par la BCT, particulièrement celles relatives aux intérêts sur les échéances reportées. Chaque établissement a choisi d’appliquer sa propre lecture et nous risquons de très mauvaises surprises dans les comptes annuels si la décision est de radier une partie de ces intérêts. Les actionnaires individuels ne peuvent pas tous détecter de tels détails et il y aura des victimes en cas de traitement comptables en deçà des attentes des banques.
Les pratiques doivent évoluer vers une plus grande transparence. Le marché valorise mieux les sociétés qui ont un management actif que les boîtes noires avec de bonnes performances financières.