Sans un bon leadership, le capital humain est insignifiant. Le football en est une illustration frappante
Par Lotfi Saibi, CEO de 4D-Leadership House
En toutes circonstances, les leaders se doivent de trouver le moyen de tirer le meilleur parti de leurs équipes, placer la bonne personne au bon endroit, créer le bon environnement afin que chaque membre de l’équipe puisse donner le meilleur de lui-même.
Très souvent, dans le monde professionnel, tout autant dans le domaine sportif que musical, un soi-disant leader, même en étant entouré des meilleurs talents, ne parvient pas à atteindre la performance souhaitée. Inversement, nous voyons souvent une entreprise ou une équipe de sport atteindre des résultats étonnants avec des compétences moyennes. Un leader inefficace peut anéantir des talents au sein d’une équipe alors qu’un excellent leader peut réussir à en tirer le meilleur parti en leur créant et en les plaçant dans la bonne culture.
Alors, quels seraient cet environnement et cette culture que les leaders doivent créer pour favoriser une performance individuelle et d’équipe élevée? C’est un environnement qui stimule les individus de manière à améliorer leurs performances et celles de leur entourage : c’est la quête d’être « les meilleurs, les plus forts, les plus rapides».
Pour créer un environnement favorable à une haute performance, un leader doit avoir la capacité de sentir, de mesurer, d’analyser, de motiver et de changer. De tels leaders maîtrisent l’art de sortir leurs équipes des modes de complaisance, d’agir sur le statu quo et l’indifférence et de créer un système de croyances qui insuffle espoir et assurance. Poussés par un tel style de leadership, les collaborateurs seront alors capables d’effectuer la transformation physique, mentale et émotionnelle qui se manifestera par des changements des plus subtils au plus significatifs au niveau de leurs comportements. Les exemples sont divers et multiples.
Nous pouvons citer le cas de cet étudiant en musique qui change d’école et qui crée soudain un chef-d’œuvre musical exceptionnel. Un autre employé a été licencié d’une entreprise pour manque de motivation et résultats inacceptables pour devenir un talent, voire « la poule aux œufs d’or » d’une autre compagnie. Aussi, cet enfant qui est expulsé d’une école pour ses mauvaises notes et émerger ailleurs comme un génie, ou encore cet athlète qu’on a laissé partir d’une équipe parce que ses résultats n’ont pas été à la hauteur des attentes, pour finalement être une star dans l’équipe qu’il rejoindra.
Des entraîneurs en mal de leadership
Tel était le cas des footballeurs Riadh Mehrez et Mohamed Salah. Deux joueurs de la FA Cup qui ont été écartés par leurs entraîneurs respectifs pour mauvais résultats et qui remportent l’année d’après, chacun de son côté, les titres de meilleurs joueurs FA. Mehrez a quitté Le Havre après trois ans en Ligue 2 où il n’a marqué que 6 buts en 58 matches. Lorsqu’il s’est retrouvé par la suite dans la meilleure ligue du monde, un environnement physique et mental des plus exigeants, il a pu marquer 40 buts en 120 matches et il a remporté le titre de meilleur joueur.
Idem pour Mohamed Salah qui, après avoir été confronté par Mourinho et pratiquement donné à Roma pour presque rien, se retrouve, en ligue PFA. Il a pu remporter avec Liverpool, un championnat, le titre du meilleur joueur et le respect de ses coéquipiers footballeurs et de ses supporters. Qu’est-ce qui a changé en quelques mois pour ces deux joueurs faisant face à une compétition très élevée et à des adversaires de haut calibre? Ont-ils acquis beaucoup plus de talent pour passer de laissés-pour-compte aux premiers de la classe ?
Admettons que ces joueurs aient acquis de l’expérience au plus haut niveau du football et que leurs techniques se soient améliorées. Véritablement, ce sont leurs ressentis envers eux-mêmes, leurs comportements vis-à-vis de leurs coéquipiers ainsi que leurs prises en charge de leurs tâches et de leurs objectifs tant individuels qu’en équipe qui avaient changé.
Faisons une rapide analyse de Mohamed Salah et de sa relation avec Jose Mourinho et Jurgen Klopp. Avec Mourinho à Chelsea, Mohamed Salah n’a jamais été considéré comme faisant partie intégrante de l’équipe. Il était un joueur de banc qui intervenait principalement dans les phases à faible enjeu : lorsque l’équipe était en train de gagner ou de perdre. Ceci a entaché la confiance du joueur. Pendant les séances d’entraînement, Mourinho ne lui parlait presque jamais directement, laissant cela aux assistants. Et quand il s’adressait à lui, c’était généralement pour le dénigrer devant les autres. José Mourinho était l’entraîneur des stars et à ses yeux, Mohamed n’était manifestement pas une star.
Par conséquent, le joueur a joué exactement en réponse aux attentes de l’entraîneur, non pas parce qu’il ne pouvait pas faire mieux, mais parce qu’il était plein de doutes. Il ne s’autorisait pas à sortir de sa zone de confort par crainte de représailles. À Liverpool, et sous la tutelle de Jurgen Klopp, Mohamed a repris du poil de la bête. L’enthousiasme était de retour et l’étincelle a été retrouvée.
Le vrai Mohamed est sorti de sa coquille, a pris ses propres décisions, a été encouragé quand il a fait des erreurs et la peur a disparu. L’environnement était positif, même quand ils perdaient des parties. Klopp a utilisé de nombreuses défaites comme des opportunités pour construire la psychologie de ses joueurs et non pour les détruire. Deux styles distincts de gestion et de leadership en œuvre. L’un est rigide et s’attend à ce que tous les acteurs s’intègrent dans un système, une culture, une façon d’être et de se comporter, peu importe leurs spécificités. L’autre, un style basé sur la flexibilité, le partage, la fixation de petits objectifs réalisables et le renforcement positif.