Les premiers commerçants savaient déjà qu’ils devaient comprendre leurs clients pour produire un bon rendement économique malgré les différences linguistiques. Parmi eux se trouvait Marco Polo, le négociant multilingue prospère faisant des affaires de la Méditerranée à la Chine (The Conversation, février 2017). Dans un article publié récemment par le WEF, des chercheurs ont constaté que le multilinguisme est bon pour l’économie. Les pays qui cultivent activement différentes langues récoltent des fruits bien mûrs ! Allant du développement des exportations à une main-d’œuvre plus innovante. Le tout s’enchaîne !
Citée dans l’article, Gabrielle Hogan-Brun, chercheuse en études linguistiques à l’Université de Bristol, citant des données qui relient la croissance économique à la diversité linguistique, explique: «La langue est importante à l’échelle nationale et au niveau des petites entreprises».
Le journal académique australien The Conversation précise qu’en Suisse, par exemple, la valeur économique du multilinguisme est estimée à 10% du PIB du pays. En effet, dans de nombreuses entreprises et organisations, les employés étant multilingues, ils peuvent facilement communiquer et traiter avec différentes cultures, ce qui de nos jours, est une aubaine pour les affaires ! Avec quatre langues nationales: l’allemand, le français, l’italien et une ancienne langue latine appelée Romanche, c’est bien un des facteurs faisant de la Suisse…la Suisse !
Toujours selon The Conversation, Willy Brandt, l’ancien chancelier de la République Fédérale d’Allemagne, s’est exprimé sur le sujet de la façon la plus célèbre: «Si je vous vends, je parle votre langue. Mais si j’achète, dann müssen Sie Deutsch sprechen (alors vous devez parler allemand) !”. Par ailleurs, les chercheurs estiment que la Grande-Bretagne perd l’équivalent de 3,5% de son PIB chaque année, en raison des compétences linguistiques relativement faibles de sa population! Des études récentes ont montré qu’une entreprise américaine sur six est perdante en raison du manque de compétences linguistiques et de la sensibilisation culturelle de leur main-d’œuvre.
Si les tendances protectionnistes récentes des États-Unis se propagent au Royaume-Uni et dans l’UE, des pays comme la Chine et l’Inde, ainsi que le Mexique, l’Indonésie et la Turquie, y gagneront probablement. Dans cette économie mondiale plus diversifiée, l’anglais pourrait bien finir par perdre de son importance, selon le quotidien.
Une règle bien admise aujourd’hui: les langues peuvent aider à établir des relations commerciales. Une étude réalisée auprès de petites et moyennes entreprises en Suède, en Allemagne, au Danemark et en France a montré que ceux qui investissaient davantage dans les langues pouvaient exporter davantage de biens. Les entreprises allemandes qui ont beaucoup investi dans un personnel multilingue ont élargi leurs marchés étrangers à 10 pays. Les entreprises qui ont investi moins ont dit manquer des contrats !
Toujours selon le WEF, les chercheurs ont mis en évidence les avantages individuels de parler plus d’une langue. Pour ceux qui trouvent les langues difficiles, la bonne nouvelle est que vous n’avez pas à parler couramment pour avoir un impact positif. Plusieurs études montrent que les langues augmentent le pouvoir d’achat. En Floride, les travailleurs parlant espagnol et anglais gagnent 7 000 dollars de plus par an que ceux qui ne parlent que l’anglais. Selon une étude canadienne, les hommes bilingues gagnent 3,6% et les femmes bilingues gagnent 6,6% de plus que leurs homologues anglophones. Les auteurs ont supposé que c’était parce que la connaissance d’une langue seconde était perçue comme un signe de pouvoir cognitif, de persévérance et d’éducation.
Au-delà de ces bénéfices économiques immédiats, les langues ont un impact à long terme sur la main-d’œuvre d’un pays. Le multilinguisme s’est par exemple avéré bénéfique pour la santé du cerveau, retardant l’apparition de la démence. Il a également été associé à une meilleure capacité de concentration et de traitement de l’information. Et ces effets sont plus marqués chez les personnes qui deviennent multilingues dès leur plus jeune âge.
Selon Bak et Mehmedbegovic, cités par le WEF: «En plus de saisir toutes les occasions de dire: « Il est bon pour vous de manger des fruits et des légumes tous les jours », les écoles devraient également dire:« Il est bon de parler, lire et écrire dans différentes langues » !