L’Organisation internationale du travail (OIT) définit l’emploi informel comme “l’ensemble des activités professionnelles rémunérées (à savoir travail indépendant et travail salarié) non enregistrées, réglementées ou protégées par les cadres juridiques et réglementaires existants et des activités professionnelles non rémunérées exercées dans une entreprise productrice de revenus. Les travailleurs informels ne bénéficient pas de contrats de travail, d’avantages sociaux, de protection sociale ou de représentation”.
Cette définition est cohérente avec celle retenue par l’administration tunisienne notamment dans le cadre des enquêtes statistiques réalisées par l’Institut national des statistiques (INS). Selon une étude réalisée par l’Observatoire national de l’Emploi et des Compétences en 2020, le travail informel représente près de 40% de l’ensemble de l’emploi disponible en Tunisie, soit 1.5 million d’individus concernés. Le travail informel frappe en particulier les emplois non qualifiés (83%). Les diplômés, quant à eux, recourent de plus en plus au secteur informel (10%), faute de trouver des débouchés dans le secteur structuré.
L’agriculture, la construction, le travail à domicile, le commerce et les services demeurent les secteurs les plus touchés par l’informalisation.
Le recours à des formes d’organisation participatives, en l’occurrence les coopératives d’emploi, peut contribuer à la réduction de la précarité ainsi que la part de l’emploi informel dans l’économie. La coopérative est une forme d’organisation participative dont le but est de satisfaire les besoins et les aspirations économiques, sociales et culturelles d’un groupe d’individus.
Il existe plusieurs types de coopératives. La nature de l’activité exercée ainsi que les objectifs poursuivis par le groupe définissent le type et la forme juridique de la coopérative à adopter. Parmi les formes les plus adéquates à l’emploi, nous citons les coopératives de travailleurs, les coopératives ouvrières participatives et les coopératives d’activité et d’emploi (CAE). Le modèle des coopératives d’emploi est très présent en Europe (France, Belgique…). Ce type de coopératives, dont le nombre est en forte croissance, sert essentiellement à développer l’entrepreneuriat salarial.
Les avantages économiques des coopératives d’emploi
Dans le cadre d’une coopérative, les individus exerçant des activités informelles (salariales ou indépendantes) deviendront coopérateurs-salariés. Ils bénéficieront ainsi des avantages liés au statut “salarié” (couverture assurance, retraite et prévoyance, stabilité professionnelle…) et sociétaire (participation dans la prise de décision, être membre d’un groupe fort et solidaire, sécurité, mutualisme…). Le rôle de la coopérative est d’aider ses adhérents à développer leurs activités en leur facilitant l’accès à de nouveaux marchés, une mise à niveau en compétences à travers des formations adaptées, conseil et orientation…
L’environnement coopératif favorise également le développement d’un réseau professionnel, des collaborations et des projets collectifs, création de synergies…
Les coopérateurs disposent d’un pouvoir de négociation important vis-à-vis des fournisseurs, des sociétés d’assurances, des banques, de l’Etat… Grâce aux achats groupés, ils peuvent obtenir des prix préférentiels et réaliser par conséquent des économies d’échelle significatives. Les coopératives disposent d’un pouvoir de négociation envers l’Etat, les caisses sociales, les syndicats…
Une autre forme d’économie d’échelle se situe au niveau du partage des ressources (matériels et outils, moyens de transport, intrants…). Les coopérateurs peuvent réaliser des économies d’échelle importantes.
La coopérative d’emploi encourage également l’entrepreneuriat dans la mesure où elle représente un espace d’incubation. Les initiateurs de projets se trouvent souvent isolés et perçoivent l’entrepreneuriat comme une aventure risquée et compliquée. En adhérant à une structure coopérative, ils peuvent tester et valider leur concept de business, tout en bénéficiant d’un filet de sécurité solide, de l’expertise des coopérateurs, d’un coaching et d’un accompagnement personnalisé.
Les coopératives d’emploi facilitent l’inclusion et l’intégration des travailleurs informels dans l’économie structurée. Par ailleurs, leur modèle de fonctionnement participatif (1 personne =1 voix ; un partage démocratique des responsabilités…) favorise l’équité sociale.