Quelle est la cause de l’augmentation mondiale des matières premières ? Et comment la Tunisie peut y faire face ?
Avec le ralentissement de la croissance en 2020 et l’arrivée de la pandémie COVID-19, les prix des matières premières se sont envolés sur le marché mondial. Ce sujet était le thème du webinaire organisé par l’IACE le mercredi 16 juin. Cela a été causé par l’augmentation de la demande et la perturbation des chaînes de valeurs. Mais le cas de la Tunisie, avec les particularités de son écosystème, peut contrer l’inflation en prenant quelques mesures notamment dans les secteurs pharmaceutique, textile, technologie, électronique et mécanique.
Qu’est-ce qui explique la flambée des prix ?
Les matières comme l’acier (de 578 USD/tonne en 2019 à 1 642 USD/Tonne en 2021), le cuivre, le blé, et le pétrole, etc, ont atteint des niveaux sans précédent. Cela est lié aux perturbations causées par la Covid-19 telles que les restrictions qui ont limité les opérations d’approvisionnement. Ainsi, on enregistre une forte augmentation des coûts des conteneurs surtout en provenance d’Asie, (une augmentation de 400 % des prix de conteneurs entre la Chine et l’Europe a été constatée dans le quatrième trimestre de l’année 2020), et des retards au niveau des délais de livraisons ont été mentionnés.
Les causes de cette augmentation sont nombreuses. Il y a une forte demande du marché mondial, puisqu’en réponse à une peur de la pénurie, les entreprises ont augmenté leurs demandes. Le prix du pétrole a également augmenté de presque 106 % au cours des 12 derniers mois (actuellement 72.81 USD/baril). La pénurie mondiale de conteneurs maritimes a entraîné une forte augmentation des coûts de transport des exportateurs vers les pays importateurs. L’augmentation de l’utilisation du plastique et du carton pour l’emballage surtout avec les nouvelles habitudes de livraison pendant la période de confinement et la spéculation liée à la crainte de la pénurie complètent le tableau.
Selon Mme Ouerghi, Maitre de Conférences à l’ESSECT, une intervention de la Banque Centrale est sollicitée pour concevoir des stratégies dont le but est de stabiliser le taux de change pour faire face à la dépréciation du dinar et prévoir les pressions inflationnistes à la suite de l’augmentation des prix de ces matières.
Selon les prévisions des prix des matières premières pour l’année prochaine, publiées par Wallet Investor, les prix de la plupart de ces matières continuent à augmenter sauf pour le pétrole qui va enregistrer une diminution pour l’année prochaine (le baril passe de 72.81 USD à 65.12 USD en 2022).
Quelles solutions pour la Tunisie ?
Pour le secteur pharmaceutique, il a été touché non seulement au niveau des médicaments et des principes actifs mais il y a d’autres produits qui ont connu des augmentations tels que les articles de conditionnement, les flacons en verre, le cartonnage et les étuis etc. Selon M. Jardak, secrétaire général de la CNIP, le ministère de la Santé tunisien a été très agile en aidant les entreprises de l’industrie chimique et pharmaceutique durant cette crise mais pour maintenir leur compétitivité, elles doivent suivre les mutations dans le secteur et s’aligner avec les nouvelles techniques des biotechnologies, anticiper les pénuries et avoir des stocks sur une longue période surtout pour les produits sensibles et tenir compte des augmentations des prix des produits homologués pour éviter les pénuries.
Les entreprises de textile se trouvent ainsi devant une augmentation des coûts qui impacte leurs productions et les prix à offrir sur le marché. Selon M. Limantour, expert en stratégie de développement international pour les industries du textile, le gouvernement Tunisien est appelé à mettre en place des mesures d’accompagnement spécifiques pour le secteur de textile : faire des économies des matières et éviter le gaspillage, opter pour des techniques digitales pour l’optimisation de l’utilisation de tissu et créer une filière nationale tunisienne de recyclage des déchets textiles en faisant appel aux laboratoires qui utilisent des technologies qui permettent de recycler des déchets comme au Maroc.
Dans le secteur de la technologie il n’est pas évident de faire recours à l’augmentation du stock puisque ce secteur est un secteur à mutations fréquentes mais il faut : optimiser les processus en cherchant d’autres sources d’approvisionnement de matières premières, exploiter les capacités de production tunisiennes et utiliser l’intégration verticale pour maintenir un niveau de prix compétitif.
Pour le secteur électronique et mécanique, une augmentation de la demande sur le marché Tunisien a été la principale raison derrière l’approvisionnement supplémentaire ce qui peut inciter à de nouvelles conventions ayant pour objectif de minimiser les coûts des matières premières tel qu’utiliser l’achat groupé avec la collaboration des parties prenantes pour développer des économies d’échelle et améliorer la compétitivité des PME tunisiennes.