La cote de la Bourse de Tunis a plusieurs sociétés cotées dont on parle rarement. Leur faible liquidité fait qu’elles attirent peu la lumière. Se débarrasser rapidement d’une grande quantité de titres relève quasiment de l’impossible. Parmi ces sociétés, nous trouvons ALKIMIA qui a une capitalisation de 93 MTND, mais dont aucun titre n’a été transigé en 2021 !
C’est une entreprise totalement exportatrice, spécialisée dans la fabrication du Tripolyphosphate de Sodium technique (STPP) et est essentiellement détenue par le Groupe DOGHRI (41%) et le Groupe Chimique Tunisien (39%).
Au cours du quatrième trimestre 2020, ALKIMIA a affiché une baisse de son chiffre d’affaires de -36,9% à 29,488 MTND. Un recul qui a conduit à une évolution défavorable de ses ventes annuelles de -4,4% à 129,312 MTND.
Pourtant, 55 680 tonnes de STPP ont été produits en 2020 contre 47 660 tonnes l’année précédente. ALKIMIA aurait pu faire mieux si la demande était à des niveaux normaux. Les mouvements sociaux dans le bassin minier, inarrêtables depuis 2015, lui ont privé d’un flux stable de matières premières (acide phosphorique) pour faire tourner convenablement ses usines. Elle a perdu d’importants clients à cause de perturbations dans les livraisons. Les clients se sont orientés vers les concurrents qui offrent des prix très compétitifs, couvrant à peine les coûts des deux principales matières premières.
Pour rappel, la société réalisait un chiffre d’affaires supérieur à 200 MTND jusqu’à 2014, avec des bénéfices à deux chiffres en millions de dinars. Depuis 2015, et jusqu’au premier semestre 2020, les pertes cumulées d’ALKIMIA sont de 78 MTND ! Fin juin 2020, ses fonds propres sont négatifs à -18,397 MTND. Néanmoins, la société bénéficie toujours du soutien de son tour de table qui a déjà mis en place une stratégie pour sortir de la crise. Une augmentation de capital est envisagée et le Groupe Chimique a confirmé son intention d’y participer.
Un plan de diversification du Groupe a été également arrêté, avec le lancement de l’usine de MAP cristallisé, dotée d’une capacité de production initiale de 25 000 tonnes par an. Néanmoins, la COVID-19 a retardé sa mise en route, prévue initialement en mars 2020. Le confinement sanitaire instauré en Espagne n’a pas permis à HPD, le principal fournisseur des équipements de l’usine, d’honorer à son contrat. Ses équipes de supervision et de réalisation des tests de performance n’ont été autorisés à se déplacer en Tunisie que tardivement. Ces travaux ont fini par démarrer à la première semaine de novembre 2020, mais rapidement interrompus à la suite du sit-in ayant bloqué la zone industrielle de Gabès. ALKIMIA a pu trouver un accord avec le fournisseur pour recommencer les travaux au mois de février 2021, avec l’objectif d’une entrée effective en production en Mars/Avril 2021.
La Société a présenté au Conseil d’Administration un business plan 2020-26, intégrant la reconversion de l’unité U1500 pour fabriquer d’autres produits phosphatés. Les discussions sont en cours avec les parties concernées pour la concrétisation rapide de ce projet.
ALKIMIA n’est qu’un exemple d’entreprise qui a payé le prix cher de la révolution et qui illustre la destruction de la valeur tuniso-tunisienne. À quand le réveil ?