Fitch Ratings a dégradé les perspectives de la Tunisie de Stables à Négatives et a confirmé sa notation d’émission à long terme en devise à B.
C’est une suite directe de ce qui se passe aujourd’hui entre l’ARP, le ministère des Finances et la BCT. L’agence de notation a souligné l’aggravation des risques causée par une forte détérioration des finances publiques dans un cadre macroéconomique tendu. Fitch a également pointé du doigt les tensions politiques et sociales qui risquent d’interdire toute avancée en matière de réformes. D’ailleurs, c’est l’une des raisons du blocage des négociations avec le FMI qui attend un consensus national entre le gouvernement et les syndicats.
Fitch table sur un déficit budgétaire de 10,5% en 2020, largement supérieur à la médiane du groupe des pays notés B qui est de 7,8% seulement. Ce gap reflète l’importance de la masse salariale et les dépenses imprévues engagées pour lutter contre la pandémie. La décroissance serait de l’ordre de 8%.
Mais il y a également cette question de dettes envers les fournisseurs, non divulguées auparavant selon le communiqué. Ces arriérés s’élèvent à 8 000 MTND et l’agence n’est pas totalement certaine de l’exactitude de ce montant. Elle prévoit un déficit budgétaire de 7,1% du PIB en 2021 (6,6% dans le Projet de la Loi de Finances 2021) à cause de la lenteur dans le recouvrement des recettes fiscales.
La capacité du marché interne à compenser ce manque de ressources reste limitée. L’État compte atteindre un niveau record de 8% du PIB en financement intérieur net en 2020. Pour l’endettement extérieur, des retards dans la conclusion d’un accord avec le FMI pourraient compromettre le plan du gouvernement en 2021. La Tunisie est confrontée à des échéances sur deux obligations de 500 MUSD garanties par les États-Unis en 2021 et la volonté des créanciers officiels de reconduire ces garanties demeure incertaine.
Malgré tous ces facteurs, Fitch reste confiante quant à la capacité de la Tunisie de couvrir ses besoins de financement sur 2020-22 grâce au soutien de ses créanciers et aux émissions sur le marché intérieur. Cela suppose un accord rapide avec le FMI bien que les pressions politiques peuvent le retarder. Globalement, le taux d’endettement atteindra 89% du PIB en 2021. La trajectoire de la dette reste très vulnérable aux fluctuations des taux de change et des engagements des entreprises publiques qui se montent à 15% du PIB.
La croissance économique serait de 4% en 2021, toujours en sous-performance par rapport à la médiane de la catégorie B. C’est la conséquence de la détérioration de la compétitivité, des perturbations de l’activité économique dues aux troubles sociaux et aux chocs exogènes.
Notre économie reste toutefois diversifiée et dispose d’une forte production agricole et de riches ressources touristiques. L’inflation moyenne serait de 5,6% en 2020-2021, au-dessus de sa moyenne à long terme de 4,5%. Dans tout ce marasme, il y a un brin d’espoir. Il faut juste y croire.