Lancé par le ministère de l’Industrie en 2005, le processus de création d’entreprises par essaimage a connu une chute libre. Pourtant, le pays a plus que jamais besoin de création de postes d’emplois. Le problème est que la plupart de ces projets sont portés par des entreprises publiques qui n’ont plus l’excédent de trésorerie leur permettant de multiplier ces expériences qui, d’ailleurs, n’ont pas eu le succès attendu.
Absence de statistiques récentes
Pour rappel, l’essaimage est la création d’une nouvelle entreprise à partir d’une autre déjà opérationnelle. Cette dernière, appelée essaimante, apporte à l’entrepreneur un soutien qui peut prendre la forme d’un parrainage, d’une aide financière ou technique ou d’un transfert de technologie. L’entrepreneur peut être un personnel ou non.
Malheureusement, peu de chiffres existent sur l’efficacité de ces processus. Les derniers chiffres remontent à 2012 dans une étude financée par la Coopération Allemande au Développement. Jusqu’à la fin 2011, quelques 28 sociétés ou groupes privés et 17 entreprises ou institutions publiques ont adhéré à la Charte d’Essaimage et ont signé une Convention avec le ministère de l’Industrie. Sur les 45 entreprises signataires, seules 19 entités, en majorité publiques, ont réalisé des opérations d’essaimage. Le record est détenu par PGH, avec 94 projets essaimés transformés à 100% en entreprises à fin 2011. En totalité, le nombre de projets déclarés depuis le lancement du programme jusqu’à fin 2011 s’élève à 488. Au vu de l’évolution de la situation depuis, nous ne pensons pas qu’il y a eu un saut spectaculaire dans les chiffres.
Plein de dysfonctionnements
Mais voilà que quatre fonds viennent de publier leurs états financiers 2019 sur le site du CMF et les chiffres sont loin d’être flatteurs. Il s’agit de deux fonds appartenant au Groupe Chimique Tunisien et deux autres appartenant respectivement à la SCB et aux Ciments d’Oum El Kélil. Ensemble, ils ont mobilisé un capital total de 4,300 MTND avec des investissements de 2,382 MTND. Les dépréciations cumulées sont de 2,127 MTND témoignant de l’incapacité de ces projets à créer de la valeur. Les résultats reportés des 4 fonds sont de -2,362 MTND.
Ces chiffres témoignent de dysfonctionnements majeurs dans le processus d’essaimage. Les différentes enquêtes montrent qu’il y a un manque d’accompagnement, surtout durant la phase préliminaire du lancement. Cela révèle l’insuffisance de synergies avec l’entreprise essaimante alors qu’elles sont censées exister par défaut.
L’autre handicap est le financement. Après avoir lancé l’entreprise, l’accès au financement bancaire n’est pas évident. Certes, il y a l’apport de la SAGES Capital, mais la réalité est que l’entrepreneur se trouve de facto perdu entre l’entreprise essaimante, les SICAR et les banques, les approches et visions de chacun de ces intervenants étant différentes. Cela cause des retards importants dans l’entrée en exploitation des projets, surtout ceux qui ont une composante industrielle.
Ce mécanisme de création d’entités économiques est très efficace si les conditions nécessaires sont réunies. Nous pensons que c’est même l’un des moyens pour améliorer l’efficacité des entreprises publiques, surtout si l’accent est mis sur l’innovation.