Comme toute place financière, la Bourse de Tunis connaît de temps en temps des rumeurs totalement infondées. La dernière a concerné la STB et la banque a dû publier un communiqué pour nier l’intention de la QNB d’acquérir 35% du capital de la banque tunisienne.
Certes, le passage du Directeur Général de la banque publique à la filiale du géant qatari dès le début de ce mois d’octobre a ravivé les spéculations. Mais ce qui est sûr c’est qu’il ne faut plus se fier à de tels scénarii pour plusieurs raisons.
Primo, l’achat de titres de banques n’est pas aussi libre qu’on le pense même s’il s’agit d’une entité cotée en Bourse. Nous sommes dans un secteur fortement réglementé et la BCT dicte ses lois à ce niveau. En fait, la Loi n°2016-48 du 11 juillet 2016 précise qu’il faut une autorisation pour « toute acquisition, directement ou indirectement, par une ou plusieurs personnes, de parts du capital d’un établissement de crédit susceptible d’entraîner le contrôle de celui-ci et dans tous les cas toute opération dont il résulte l’acquisition du dixième, du cinquième, du tiers, de la moitié ou des deux tiers des droits de vote ». Rien n’indique que les qataris ont entrepris une telle démarche, rendant cette opération impossible pour le moment.
Secundo, qui va vendre ses titres ? Seul l’État tunisien détient une telle quantité de titres et pour une telle opération, il faut au moins l’accord de la commission de restructuration des entreprises publiques (CAREP). Cela sans compter la force des syndicats qui s’opposeront à une telle démarche.
Tertio, une telle transaction coûterait à la QNB plus de 187 MTND. Fin 2019, la banque affiche des fonds propres de 157,4 MTND, et une perte de 42,5 MTND. Sans une injection de fonds significative de la part de la banque mère, mener une telle opération est une mission extrêmement compliquée. Cela passe par une Assemblée générale extraordinaire et des annonces légales que n’avons pas vues. Pour comprendre la difficulté, il faut bien tenir compte du fait que les fonds propres de la STB sont de 1 082 MTND, presque 7x ceux de la QNB ! La banque publique a des dépôts de clientèle de 7 330 MTND et un encours crédits de 7 978 MTND, contre respectivement 853 MTND et 1 147 MTND pour la QNB.
Quarto, la QNB n’est pas en phase d’acquisition. Selon les rapports de la banque, toute acquisition potentielle doit suivre une logique stratégique et dans les zones où la banque a une forte présence. En Tunisie, la QNB a certainement des ambitions et elle finirait par s’agrandir. Vu la puisse financière de la banque mère, s’offrir n’importe quel établissement financier tunisien est possible, mais probablement pas immédiatement. Il ne faut pas oublier que l’ARP a refusé, quelque mois auparavant, l’installation d’un fonds qatari en Tunisie. Cela ne va pas jouer en notre faveur en tant que destination d’investissement pour la péninsule.
Il faut donc être logique et comprendre que la cession des actifs publics, même sous forme de transactions tuniso-tunisiennes, est quasi-impossible dans l’environnement actuel.