Alors que le marché actions souffre à cause de la crise du COVID-19, un titre s’est particulièrement distingué : Hannibal Lease. La compagnie de leasing sort du lot et affiche une honorable performance de 17,77% depuis l’annonce du premier cas de coronavirus en Tunisie.
La recette ? L’annonce par la compagnie qu’elle compte se transformer en une banque digitale tout en continuant à fonctionner en tant qu’établissement de leasing. Le pari semble séduire un marché et les investisseurs n’ont pas lâché le titre qui n’a enregistré que des transactions de 501 mille dinars en 26 séances de cotation. Les demandes d’achat ont dépassé une offre de vente quasi-inexistante.
A travers cette stratégie, Hannibal Lease cherche de la diversification. Les loueurs ont peu de marge de manœuvre par rapport aux banques, et les mouvements de taux ont un effet immédiat et plus important sur leurs comptes. Ils ne peuvent pas accorder des crédits à taux variable et leurs taux de sortie sont plafonnés par le TEG excessif. Avec la dégradation de la qualité des actifs dans l’ensemble de l’économie, les risques sur la qualité des bilans et des bénéfices se sont accentués et l’un des choix possibles est d’ajouter une nouvelle activité, toujours dans le domaine des finances, de sorte à bénéficier d’un maximum de synergies avec le business existant.
Le thème de la digitalisation, très à la mode ces dernières semaines en Tunisie, offre une fenêtre de tir intéressante. Toutefois, la réussite n’est pas évidente et dépend de plusieurs facteurs.
Il faut d’abord une offre large, alléchante et avec un minimum de frais. C’est le principal point de faiblesse des banques classiques. Partout dans le monde, les entités digitales basent essentiellement leur stratégie de conquête sur des tarifs bas. Hannibal Lease n’atteindrait donc pas son break-even point avant de constituer une large base de clientèle. Les premières années seront celles d’investissement massif en technologie et en services informatiques de pointe.
Les produits offerts doivent tout couvrir : carnet d’épargne, compte courant, Bourse, leasing, assurance et, surtout, crédits et débits. Sans cela, il serait difficile de convaincre les consommateurs de migrer vers le digital. Il faut impérativement se distinguer des établissements de paiement qui vont venir et qui sont moins gourmands en fonds propres, moyennement réglementés et plus flexibles. Les banques classiques ont aussi une panoplie de services en ligne et il y a même deux qui ont des offres totalement digitalisées (Amen Bank et Attijari Bank).
Reste maintenant à estimer la durée de la période transitoire, celle allant du lancement effectif du projet jusqu’à les premiers résultats positifs. Hannibal Lease peut compter sur son business de crédit-bail qui génère un cash récurrent pour amortir le coût et sur un personnel habitué à traiter des dossiers de crédits et assurer une rapidité d’exécution des demandes. En Europe, rares sont les banques digitales qui affichent des profits car elles sont toujours dans une course contre la montre pour lancer de nouveaux produits pour lesquels les usagers seront prêts à payer. D’ailleurs, elles sont créées dans l’unique objectif d’être reprises par des banques classiques. Ce n’est donc pas un investissement rentable immédiatement.