Présent sur place à l’occasion de l’UK-Africa Investment Summit, Le Manager s’est entretenu avec le ministre intérimaire des Affaires Étrangères, Sabri Bachtobji. C’était l’occasion d’aborder plusieurs thématiques importantes relatives aux partenariats potentiels entre la Tunisie et le RU, mais aussi entre la Tunisie et ses pairs africains. Premier constat dressé : l’insuffisance de l’accompagnement des entreprises tunisiennes qui ont choisi d’investir en Afrique. Le besoin d’une diplomatie économique forte est réel.
Conquête de l’Afrique : secteur public et secteur privé doivent coordonner
Selon le ministre, cet appareil diplomatique existe. “Ces dernières années, la dimension africaine a été pleinement explorée en Tunisie. D’ailleurs, en seulement deux ans, deux nouvelles ambassades tunisiennes ont ouvert leurs portes”, a-t-il indiqué. La présence tunisienne est surtout visible en Afrique de l’Ouest, et ce pour des raisons “évidentes” selon lui, à l’instar de la francophonie.
Malgré la bonne volonté tunisienne, il y a encore du pain sur la planche, sachant que d’autres pays, comme le Maroc, nous ont devancés dans la conquête de l’Afrique. Ces pays ont adopté des politiques africaines soutenues et ont choisi d’accompagner leurs entreprises.
Dans cette optique, il est donc vital de garantir cet accompagnement financier aux entreprises. Le système bancaire, d’après le Chef intérimaire de la Diplomatie Tunisienne, doit aussi s’investir. “Il faut s’organiser et mettre en place une stratégie financière en vue de garantir le bon positionnement des entreprises tunisiennes en Afrique. Il faut savoir que des instruments existent déjà en Tunisie afin d’accompagner les entreprises – par le biais de la FIPA et du CEPEX -. Seulement, ils ne sont pas connus de tous”, a-t-il expliqué, et d’enchaîner : “Tous les efforts doivent être déployés et mis en synergie. De ce fait, secteur public et secteur privé doivent conjuguer leurs efforts”.
Enseignement supérieur, écologie, TIC : là où la Tunisie et le RU peuvent coopérer
Qu’en est-il, par ailleurs, des relations avec le RU ? Le ministre a rappelé que l’UE – à laquelle appartient encore le RU – est l’un des principaux partenaires économiques de la Tunisie, comme en témoigne l’ALECA (Accord de Libre-Echange Complet et Approfondi). D’ailleurs, ce dernier doit être examiné de plus près afin de pouvoir avancer. “Certaines études d’impacts n’ont pas encore été finalisées”, a précisé le ministre. Le RU, pour sa part, a choisi de s’extraire de l’UE. Il cherche, à présent, à confirmer sa position en tant que puissance économique et commerciale en dehors de l’UE. D’où l’importance de tisser de nouveaux partenariats, notamment en Afrique et en Tunisie.
Selon le ministre, les deux pays – la Tunisie et le RU – peuvent établir des coopérations en matière de TIC ou encore l’industrie pharmaceutique. Il est, également, possible de s’associer dans le domaine de l’enseignement supérieur sachant que le RU est très performant.
Les énergies renouvelables constituent une autre opportunité pour la Tunisie et le RU. Notre pays, rappelle le ministre, a toujours été pionnier par le biais de la STEG International. “Le Brexit permettra au RU d’acquérir une meilleure visibilité. Le savoir-faire britannique est indéniable. Le défi, à présent, est de conjuguer ce savoir-faire britannique avec la connaissance tunisienne du marché africain. Il faut, dans cette optique, multiplier les missions d’exploration, avec un focus sectoriel”, a-t-il expliqué.
L’intérêt du RU pour la Tunisie est réel. “Les possibilités de partenariats sont nombreuses, surtout pour les produits phares de la Tunisie comme l’huile d’olive, et c’est sans compter le secteur touristique. Les deux pays peuvent coopérer dans ce cadre. Il faut rappeler que la Tunisie a accueilli plus de 200 000 touristes britanniques en 2019 et ce chiffre devrait augmenter”, a-t-il encore déclaré.
Les pays africains doivent faire valoir leurs intérêts
Avec l’UK-Africa Investment Summit, le RU prend conscience du grand potentiel africain. Sans doute, le Royaume ne souhaite aucunement être devancé par les autres poids lourds de l’économie mondiale. La Russie s’est déjà lancée dans la conquête africaine. La Chine l’a aussi fait en septembre 2019 à travers un autre sommet. La France, même si elle fait encore partie de l’UE, va organiser le Sommet Afrique-France en juin 2020 à Bordeaux.
Autrement dit, l’Afrique est un continent très convoité compte tenu de ses richesses naturelles et de sa main-d’oeuvre – qualifiée ou non qualifiée -. Pour le RU, les échanges commerciaux avec notre continent ont atteint 36 milliards de livres sterling. Les investissements, pour leur part, ont atteint 39 milliards de livres.
Il faut, dans ce contexte, que les pays africains fassent entendre leur voix et faire valoir leurs intérêts. Tisser des partenariats c’est bien, mais des partenariats gagnants-gagnants, c’est mieux.
Avec notre envoyée spéciale sur place, Sahar Mechri Kharrat