Sonia Dammak, directrice de com à Vivi Energy
Dans l’univers de la communication entreprise, elle a vraiment une place de choix. Elle est partout où elle devrait être pour porter haut et fort les couleurs et les valeurs de l’entreprise. Son entreprise, qu’elle porte au plus profond d’elle-même. Sonia Dammak se déploie sur tous les fronts. Elle a réussi l’exploit d’installer en si peu de temps Vivo Energy au centre des salles de rédaction tout en valorisant le produit Shell. Entretien.
Pouvez-vous nous présenter votre métier ?
Mon métier c’est la communication institutionnelle. Il s’agit d’un concept davantage anglophone que francophone, connu sous le nom de « Corporate communication ». Il se partage en deux volets : la communication interne et la communication externe. La communication interne est une véritable interaction entre la communication et les ressources humaines. Le volet communication interne concerne la rédaction des newsletters, l’action en faveur de l’engagement du personnel, la tenue des réunions régulières pour prendre la température, l’écoute et la motivation du personnel tout en essayant de l’impliquer dans la stratégie de l’entreprise. D’ailleurs, à ce titre, nous avons lancé une initiative «120 chrono » consistant en la réunion d’une vingtaine de cadres afin de réfléchir sur les problématiques de l’entreprise, voire même de les impliquer dans l’action. Quant à la communication externe, il s’agit d’une dimension plus vaste et c’est ce qu’on appelle le “stakeholder engagement”. Il s’agit ensuite de communiquer avec toutes les parties prenantes de la société en engageant différentes initiatives et différents projets afin d’atteindre les objectifs fixés . Ce sont des projets d’ordre stratégique, de premier niveau.
Pouvez-vous nous parler de la portée stratégique de ces tâches ?
La partie apparente de l’iceberg de la communication externe est ce qui se fait avec les médias comme la tenue des conférences de presse, la publication des communiqués, ainsi qu’avec les partenaires comme les événements d’engagement. En ce qui concerne la partie non apparente qu’on appelle en anglais « issue identification », c’est ce qui se fait autour de la société pour pouvoir travailler sur la construction de la réputation de l’entreprise. Nous travaillons donc à l’identification de tout ce qui tourne autour de celle-ci afin de pouvoir le traiter et éviter qu’il ne se transforme en crise. Nous avons également une autre partie apparente qui est la responsabilité sociétale de l’entreprise. Les projets qui découlent de la RSE proviennent des besoins de l’environnement dans lequel évolue l’entreprise ayant une connexion très étroite avec notre business sinon cela s’apparente davantage à du mécénat et non à la RSE. C’est d’ailleurs un concept qui se développe de plus en plus en Tunisie et qui prend des proportions plus importantes. Après cela, une fois la réputation de l’entreprise construite, il s’agit de greffer des composantes en établissant la connexion avec le marketing et nos actions commerciales. En prenant l’exemple de notre activité qui concerne un produit dangereux, il est important pour nous non seulement de communiquer là-dessus mais aussi d’agir en conséquence. Il faut que cela parte d’une vision et d’une façon de percevoir les choses.
Si l’on essayait de dresser le profil d’un bon directeur de la Com’, quelle en serait l’esquisse selon vous ?
De prime abord, une principale qualité est d’être un bon communicant. D’après mon expérience, les meilleurs communicants sont d’anciens journalistes, des hommes de médias ayant développé la possibilité de communiquer avec différents types de personnalités. Je pense que c’est réellement un avantage d’avoir un bon sens de la communication. De même, il faut être bien organisé car l’on se retrouve à œuvrer sur plusieurs fronts à la fois et il nous faut cerner rapidement les enjeux des uns et des autres. A ce titre, je connais des personnes qui bien qu’elles aient réussi dans le métier du marketing, n’ont pas été suffisamment passionnées de communication pour pouvoir y réussir. Il faut savoir que le marketing et la communication sont deux métiers complètement différents.
Et où réside exactement la différence ?
La différence fondamentale réside dans le fait qu’en marketing nous communiquons sur un produit et nous engageons des actions et des activités susceptibles d’entraîner un retour sur investissement. Dans la communication, en revanche, il faut avoir une plus longue haleine. Car pour se construire une réputation, tu es enclin à y mettre plusieurs années, en l’occurrence quand il s’agit d’une nouvelle marque. Cela est comme une sorte de bâtisse que l’on construit pierre par pierre. Nous , chez Vivo energy, nous avons choisi le respect comme valeur de base et il n’est pas aisé de se construire une réputation autour de cette valeur. A noter, en outre, que cette bâtisse n’est pas à l’abri de n’importe quel éventuel problème.
Précisément, le choix de l’outil marketing peut-il influencer ce positionnement et cette réputation ?
Tout à fait ! Et le marketing quelque part influence la communication et vice versa. Si je vends un produit conforme aux standards et aux normes internationaux, et en parallèle je respecte mes engagements, c’est une forme de positionnement sur le plan de la communication. Le contraire est également valable. Il s’agit réellement d’un travail de collaboration et de synergie, un peu comme dans le cas des RH et de la communication interne.
Qu’en est-il de la place du digital aujourd’hui dans la Com’ ?
Aujourd’hui, tout le monde est connecté à travers son téléphone, son ordinateur, sa tablette, etc. Et nous autres à Vivo, nous y accordons de plus en plus l’importance nécessaire. A dire vrai, il est devenu tout simplement inéluctable pour toute marque d’être présente sur le digital, d’être à l’écoute et de répondre rapidement. A Vivo Energy, nous agissons davantage sur un réseau social en particulier, celui sur lequel les Tunisiens focalisent le plus à savoir Facebook. Il n’en reste pas moins que nous demeurons un marché qui est enclin à voir et à toucher le produit. Nous ne sommes pas encore capables de tout acheter sur le Net. Cependant, je pense que cela va se développer très vite.
En tant que directrice de communication, quelle est l’action dont vous êtes la plus fière ?
En fait je m’estime très heureuse en tant que directrice de la Com’ à Vivo Energy car nous ratissons très large. Nous intervenons sur trois domaines : sécurité routière, éducation-entrepreneuriat et économie d’énergie. Je cite deux actions dont je suis la plus fière : nous venons de lancer une action extraordinaire «j’économise une goutte pour construire demain » car elle traduit le summum du partenariat communication/marketing. Il s’agit d’impliquer nos consommateurs dans une action RSE qui leur permettra de se sentir utiles dans la société et générer du respect vis-à-vis de la marque. Il s’agit donc de se connecter sur une plateforme, nous y enregistrons notre consommation en carburant, les kilomètres que nous parcourons, et ensuite nous faisons un ravitaillement chez Shell. Grâce à un algorithme, l’économie réalisée par le consommateur est enregistrée et sera transformée en activité sociétale en l’occurrence au profit des écoles. L’autre action s’est faite en partenariat entre Vivo Energy Tunisie et OIS Motors concessionnaire de MG, portant le nom de « Hack_the_Road ». Elle vise à récompenser 3 applications mobiles fonctionnelles qui facilitent la vie des usagers de la route : conducteurs, passagers, piétons, motards et cyclistes. Nous avons eu environ 100 postulants desquels, nous avons sélectionné 40 faisant partie de 11 équipes. Nous encourageons à travers ce type d’action, entres autres, l’entrepreneuriat des jeunes et la création des startups qui peuvent devenir demain nos partenaires. Cela étant, l’action qui m’est la plus chère est celle de l’éducation routière, que nous avons lancée depuis 5 ans avec le ministère de l’Education et qui s’applique aujourd’hui dans une grande partie des écoles primaires du pays touchant plus de 12 mille écoliers.
Comment percevez-vous aujourd’hui la Com’ dans l’entreprise tunisienne ?
Je suis un peu mitigée à ce niveau. Autant je peux dire que dans certaines sociétés, la Com’ se développe et prend la place qui lui revient, de surcroît dans les entités appartenant à des groupes internationaux ayant conscience de l’enjeu engagé, notamment en ce qui regarde la réputation de la société. Autant je trouve que dans d’autres entreprises, la communication reste rudimentaire, divisée entre différents départements et de ce fait déchiquetée. Il n’existe pas de stratégie ou d’objectif à atteindre bien déterminé. Néanmoins, je reste confiante, je pense que c’est aux entreprises leaders de donner le bon exemple et le coup d’envoi afin que les autres suivent. Lorsque j’ai commencé dans la Com’ en 2004, on ne parlait pas encore de la communication. J’ai eu la chance d’effectuer des stages à l’étranger où j’ai vu la place accordée à la Com’. je me suis alors demandée si un jour nous verrons cela se concrétiser en Tunisie. En tous les cas, je vois que la communication est en train de gagner ses lettres de noblesse en Tunisie.
Le mot de la fin ?
Je dirais si une personne voit en elle la passion de la communication, je lui conseille de suivre cette voie, elle se développera au fur et à mesure et il y aura énormément à faire.