Voilà quelques jours était publié un rapport annuel; celui de World Happiness Report livrant le classement, pour l’année 2017, de 155 pays dans le monde selon le bonheur des populations.
Ce classement, ambitionne de fournir aux gouvernements, aux milieux d’affaires et à la société civile, afin d’améliorer le bien-être de leur pays respectif, un outil établi en fonction de six facteurs: produit intérieur brut par habitant, espérance de vie en bonne santé, liberté, générosité, aide sociale et perception de la corruption dans le gouvernement ou les affaires.
La curiosité du lecteur le pousse à aller consulter le contenu d’un tel rapport. Le voilà étonné et perplexe à la fois ! Qu’il retrouve aux premières loges les pays nordiques, avec la Norvège et le Danemark qui se disputent la première place et la Suisse dans le top 3; rien d’étonnant.
Qu’il retrouve, tout en bas du classement, le Yémen, le Soudan du Sud, le Libéria, la Guinée ou la Syrie, cela peut se comprendre et ne pas surprendre. Mais l’étonnant dans cette lecture est de trouver la Libye à la 68ème place, la Somalie à la 98ème ou encore le Nigéria en 95ème position. Grand bien leur fasse. Et la Tunisie alors? Elle occupe tout simplement la non honorable position de 102ème pays le plus heureux du monde, un euphémisme, juste après l’Afrique du Sud, parmi les 155 analysés.
En outre le pays a perdu quatre places par rapport au classement donné l’année précédente. C’est mieux que l’Algérie qui perd 15 places, passant de la 38ème à la 53ème et moins bien que le Maroc qui améliore son classement pour occuper la 84ème place en 2017 contre la 90ème en 2016. La Libye, pour sa part, fait du sur place, avec la même 68ème position sur les deux années. Que le bonheur ne rayonne pas sur les visages de nos concitoyens cela s’entend : révolution et transformation de la société exigent. Mais sommes-nous vraiment tombés aussi bas dans ce classement du bien-être ?
Comme pour se remonter le moral et comme d’usage, dès lors qu’une appréciation ne convient pas, l’on se dit qu’il doit y avoir un mauvais choix de critères, des erreurs de pondération et une bonne part de subjectivité.
Alors le mieux est d’aller voir ailleurs prendre connaissance d’autres appréciations internationales de pays.
Prenons celui des meilleurs pays au monde, un classement, de 80 pays, publié début mars 2017; par US News & World Report à partir d’un sondage mené auprès de 21.000 personnes, dont près de 5.000 décideurs économiques, localisés dans 36 pays émetteurs d’investissements et de flux touristiques. L’étude, à partir de questions destinées à évaluer 65 caractéristiques déterminant une nation moderne, classées selon neuf critères: (1) aventure, (2) citoyenneté, (3) influence culturelle, (4) entrepreneuriat,(5) patrimoine, (6) croissance, (7) business, (8) pouvoir et (9) qualité de vie, offre un aperçu de la réputation internationale des pays du monde et reflète le climat politique actuel. Elle donne un premier classement dans chacun de ces critères retenus et un rang global élaboré à partir d’une moyenne des scores obtenus dans ces 9 critères.
Voilà qui semble être plus convaincant au niveau de l’approche adoptée! Globalement les principaux problèmes du monde d’aujourd’hui cités par les sondés sont les inégalités salariales, les inégalités hommes/femmes, le réchauffement climatique et la guerre en Syrie, sans, toutefois, un strict consensus. Par ailleurs, 3 sondés sur 4 affirment que le monde a besoin d’une nouvelle génération de leaders.
Résultats relevés: dans le top 10 des Meilleurs pays du monde 2017, toujours selon US News & World, nous trouvons, dans l’ordre, les pays suivants: Suisse, Canada, Grande-Bretagne, Allemagne, Japon, Suède, États-Unis, Australie, France et Norvège. Logique dira-t-on.
La Tunisie, sur les 80 pays analysés, occupe la 64ème place. Elle était à la 46ème place en 2016. Au niveau africain nous trouvons l’Afrique du Sud 38ème, l’Egypte 45ème, le Maroc 48ème, la Tanzanie 59ème, le Kenya 61ème , le Ghana 68ème, l’Angola 75ème, le Nigéria 77ème et l’Algérie 78ème. C’est donc perdu pour celui qui cherchait un peu d’espoir!
En effet dans chacun des critères cités ci-dessus, pas l’ombre d’une lueur. Le pire se trouve dans le critère de l’entrepreneuriat qui s’intéresse à l’éducation, à l’esprit d’entreprise, à l’innovation, à la facilité d’accès au financement, à la disponibilité d’une main-d’œuvre qualifiée, à l’existence d’une expertise technologique, à une pratique des affaires transparente, aux infrastructures adéquates et à l’adoption d’un cadre légal approprié. Là, la Tunisie réalise son plus mauvais classement 75/80!
Si à cela l’on y ajoute l’appréciation annuelle de Doing Business dans son rapport pour 2017 rendu public en octobre dernier qui classe la Tunisie au 77ème rang parmi 190 économies c’est la dégringolade par rapport à la 40ème place obtenue en 2011.
Quant à la compétitivité mondiale, analysée par le World Economic Forum n’en parlons pas car là, également, le pays fait également face à un autre dérapage, passant de la 40ème position en 2011–2012 à la 95ème sur 138 pays en 2016–2017
Côté stabilité, ce n’est guère mieux; la Tunisie, jugée par le Global Peace Index comme étant moyennement pacifique ou instable, est classée 62ème mondiale sur 163 pays indépendants objets de l’analyse.
Par ailleurs lorsque l’on pose la question suivante «selon votre avis, durant l’année écoulée (2016) le niveau de la corruption en Tunisie a-t-il augmenté, diminué ou est demeuré stable, 64% des sondés estiment qu’elle s’est accrue (42% beaucoup augmenté et 22% un peu augmenté). Sombre tableau ? Le pays marche-t-il sur la tête ? En cherchant davantage l’on peut dénicher, malgré tout, quelques motifs de satisfaction qui nous épargnent de trop verser dans le noir pessimisme.
Ainsi la Tunisie est le 1er pays du Maghreb en 2016, oui, en toutes lettres, le premier, en nombre de millionnaires (6.500) et de milliardaires (70) selon le Cabinet New World Wealth. Et comme quoi tout va bien; les milliardaires voient leur club s’élargir, par rapport à l’année précédentes (+16,2%) et leur fortune s’accroître de +5,9%. Autre motif de satisfaction, dans U.S. News Best Global University 2017, la Tunisie , pour la première fois, trouve une de ses universités classée parmi les meilleures au monde avec l’Université de Tunis El Manar au 948ème rang mondial au sein des 1000 premiers établissements universitaires. Mais, quand même, 17ème en Afrique. Pas de quoi pavoiser!
Comme quoi la Tunisie va beaucoup mieux, non par rapport à l’année passée mais par rapport à l’année à venir!