Malgré l’annonce d’un excédent budgétaire de 2,94 milliards de dinars fin novembre 2024, l’État tunisien accumule des retards importants dans le paiement des compensations, atteignant jusqu’à 17 mois d’impayés pour certains bénéficiaires. Ce paradoxe met en lumière une gestion budgétaire déséquilibrée, où plus d’un milliard de dinars dus à divers secteurs économiques, notamment l’industrie laitière, les boulangers, les meuniers et les fabricants de pâtes et couscous, n’ont pas été versés. Sur les 11,34 milliards de dinars alloués à la compensation dans la loi de finances 2024, seulement 5,46 milliards ont été dépensés à fin novembre, privilégiant les carburants (72,8% des dépenses de compensation) et le transport (12,5%), au détriment des produits de base (14,7%).
Cette situation financière critique affecte directement les acteurs économiques concernés. Les industriels du secteur laitier, par exemple, n’ont pas reçu de compensation depuis octobre 2023, accumulant 380 millions de dinars d’impayés. Les boulangers et les meuniers subissent le même sort, avec respectivement 352,5 et 105 millions de dinars d’arriérés. Ces retards de paiement, qui dépassent le milliard de dinars au total, fragilisent ces secteurs et soulèvent des questions sur la priorisation des dépenses par l’État. Il semble que les fonds aient été prioritairement alloués aux structures étatiques bénéficiant de la compensation, comme l’Office du commerce, responsable de l’importation de denrées subventionnées.
Bien que le budget 2024 alloue des sommes importantes à la compensation (19% des dépenses totales et 6,5% du PIB), la répartition effective des fonds et les retards de paiement créent un décalage entre les prévisions et la réalité. L’État prévoit une diminution progressive des dépenses de compensation d’ici à 2026, mais la gestion actuelle de ces fonds soulève des inquiétudes quant à la capacité de l’État à honorer ses engagements envers les différents acteurs économiques et à assurer la stabilité des prix des produits de base pour les consommateurs.