Aujourd’hui, à l’École Polytechnique de Tunisie, à La Marsa, a eu lieu l’inauguration de l’Observatoire méditerranéen du changement climatique (OMCC), un événement international abordant les enjeux liés au changement climatique, à la gestion des ressources hydriques et aux défis agricoles en Méditerranée. Ce rassemblement a permis à des experts de la région de partager leurs analyses et leurs propositions pour faire face à ces crises environnementales majeures.
La rencontre a été un moment de réflexion et de partage d’expertise sur les multiples facettes du changement climatique en Méditerranée. Des solutions innovantes existent, mais elles nécessitent une action concertée à l’échelle locale, nationale et internationale. Que ce soit pour la préservation de la biodiversité marine, la gestion des ressources en eau ou l’adaptation des agricultures face aux nouvelles conditions climatiques, il est impératif que les pays méditerranéens travaillent ensemble pour garantir un avenir durable pour cette région déjà fragile.
Pendant le panel “La Méditerranée comme épicentre du changement climatique”. Elyes Hamza, directeur du Centre d’activités régionales pour les aires spécialement protégées (SPA/RAC), a exposé les impacts du changement climatique sur la biodiversité marine en Méditerranée. Il a souligné que les activités humaines, associées à la montée des températures et à l’acidification des océans, perturbaient gravement les écosystèmes marins et littoraux de la région. Ces modifications affectent non seulement les espèces marines, mais aussi les communautés côtières dépendant de la mer pour leur subsistance. Elyes Hamza a insisté sur l’importance des aires marines protégées et des programmes de surveillance pour évaluer et atténuer ces effets. Il a appelé à une coopération internationale renforcée et à des solutions fondées sur la nature pour préserver la richesse biologique de la Méditerranée.
De son côté, Abbas Mihelm, directeur exécutif de l’Union des agriculteurs palestiniens (PFU), a abordé la question de la rareté de l’eau en Palestine, une problématique exacerbée par le contexte politique. Il a expliqué que la question de l’accès à l’eau ne pouvait être dissociée de la situation géopolitique complexe de la région. Près de 60% des terres agricoles palestiniennes sont sous contrôle israélien, notamment les zones riches en ressources naturelles. Cela prive les agriculteurs palestiniens d’une grande partie de leurs moyens de subsistance. Environ 87% des ressources hydriques palestiniennes sont situées en zone C, sous contrôle israélien, ce qui rend l’accès à l’eau extrêmement difficile. Ces conditions ont un impact direct sur l’agriculture palestinienne, notamment la production d’huile d’olive, dont dépend la vie économique de plus de 160 000 familles. Abbas Mihelm a évoqué des initiatives pour faire face à ces défis, telles que des campagnes de sensibilisation, des techniques d’irrigation efficaces et l’introduction de l’agriculture hydroponique, mais a aussi insisté sur le fait que des solutions durables ne pourraient émerger que si les problèmes politiques étaient également résolus.
Shifa Mathbout, chercheuse senior à l’Université européenne de Chypre, a quant à elle mis en lumière les aspects scientifiques du changement climatique, en soulignant ses effets variés et multidimensionnels. Selon elle, le changement climatique affecte non seulement l’environnement, mais aussi la santé humaine, les migrations et les conflits. Elle a détaillé les caractéristiques du climat méditerranéen, marqué par une forte variabilité, avec des températures élevées dans le sud et des précipitations irrégulières dans toute la région.
Mathbout a présenté des données alarmantes sur la baisse des précipitations dans des pays comme la Grèce, l’Italie et l’Espagne, qui ont vu leurs déficits de pluie atteindre plus de 40% au cours des dernières décennies, exacerbant ainsi les tensions liées aux ressources en eau. Son intervention a également porté sur un projet de recherche international impliquant 70 chercheurs méditerranéens, qui a mis en évidence l’irrégularité croissante des précipitations. Selon elle, ces phénomènes aggraveront les pressions sur l’agriculture, l’approvisionnement en eau et entraîneront de nouvelles vagues de migrations forcées. Elle a conclu en appelant à une action urgente pour atténuer les effets du changement climatique, tout en soulignant la nécessité d’une coopération régionale renforcée pour relever ces défis.