Découvrir le monde du recrutement et de la gestion des ressources humaines en Europe au sein d’un grand cabinet, développer une expérience sur le continent africain et percer dans le domaine en Tunisie en lançant sa propre boîte spécialisée dans la chasse de têtes et l’expertise RH, tel est le parcours de HediSamari, CEO du cabinet Samari Consulting. Un professionnel chevronné dans le recrutement et la gestion du capital humain. Il a attribué à sa mission des dimensions qui dépassent le placement des cadres pour englober la refonte et la mise en place au sein des entreprises de toute une vision et stratégie de valorisation des ressources humaines. Et de construction d’un mindset qui favorise la communication efficace, l’empathie et le partage des connaissances et des expériences dans une atmosphère saine et équilibrée. En compagnie de Sabine Bastisch, directrice des Services RH et Développement Soft Skills chez Samari Consulting, ils nous parlent de leur vision…
Parlez-nous de votre parcours.
HediSamari: Ma carrière dans le domaine des ressources humaines a commencé à Londres au sein d’un grand cabinet de recrutement international. Après avoir achevé mes études universitaires en histoire, je suis entré en contact avec ce cabinet afin de chercher un premier emploi, et ils m’ont proposé alors d’intégrer leur équipe et d’évoluer au sein de leur structure. Je me suis forgé une expérience dans le recrutement dans des domaines divers: finance, tech, industrie, etc. au sein de tout le réseau étendu pendant cinq ans avant d’embarquer en 2012 dans une nouvelle aventure professionnelle. Dans le cadre de l’élargissement du réseau de ce cabinet, notamment en Afrique, le management m’a proposé de chapeauter le projet d’ouverture d’un nouveau desk pour le Maghreb. Motivé par l’aspect entrepreneurial de l’opportunité et le travail sur les pays de l’Afrique francophone, j’ai accepté le challenge et je me suis investi dans la chasse de têtes des cadres pendant trois ans. En 2015, et pour des raisons familiales, j’ai décidé de m’installer en Tunisie et de continuer sur la voie de l’entrepreneuriat en lançant ma propre boîte spécialisée dans la chasse de têtes. Sabine Bastisch: Je suis originaire d’Allemagne où j’ai fait des études de langue arabe, d’affaires et de gestion internationale. J’ai toujours été passionnée par l’apprentissage des langues et des différentes cultures. Cet amour m’a amenée à vivre en Tunisie et à suivre des études à Bourguiba School. J’ai également passé une période de ma vie au Qatar et en Jordanie avant de décider de retourner en Tunisie. Mes expériences professionnelles se sont diversifiées à travers différentes boîtes spécialisées en hôtellerie, commerce, etc. Ce qui m’a intéressée dans toutes ces expériences, c’est bel et bien ce monde complexe des relations humaines et comment venir à bout des problèmes d’interaction et de communication qui peuvent survenir. Le challenge du volet humain et relationnel était le dénominateur commun de toutes les entreprises que j’ai côtoyées. Ma curiosité m’a poussée à m’intéresser à cette problématique en essayant de comprendre les raisons derrière tout cela et en proposant des solutions adéquates, et c’est là que j’ai trouvé le cabinet Samari Consulting comme une opportunité pour percer dans ce domaine.
Quels sont les principaux services que procure votre cabinet?
Hedi: Nous travaillons principalement sur trois volets: le premier pour lequel nous sommes initialement connus est bel et bien la chasse de têtes des cadres, des directeurs et des top managers au profit des multinationales, des PME et des sociétés familiales. Le deuxième est le développement dans le domaine des soft skills. Le troisième volet qui complète ce que nous offrons à nos clients est le conseil en stratégie RH, qui comprend l’analyse SWOT de l’activité RH d’une société et la mise en place d’une panoplie de projets qui améliorent la performance globale des ressources humaines, structurent mieux les processus et procédures, et améliorent la satisfaction des employés et les taux de rotation.
Sabine: Ce choix est motivé par le constat que nous avons fait à travers les expériences managériales de nos clients et les spécificités des différents environnements professionnels. En fait, aujourd’hui, le talon d’Achille de la plupart des entités économiques n’est pas le volet technique chez le personnel, mais plutôt l’aspect humain, les compétences interpersonnelles et la culture. Cet aspect si important pèse de son lourd poids sur la continuité d’exploitation de l’entreprise et sur son rythme de croissance et de développement, vu qu’il impacte directement l’atmosphère sociale et l’harmonie d’équipe et, par ricochet, la réussite du projet. Conscientes de l’importance de ce volet, les entreprises ont recours à notre cabinet pour les aider à résoudre les problèmes de communication et à gérer efficacement les conflits au sein de leurs équipes à travers la conception de programmes d’accompagnement sur mesure basés sur un diagnostic détaillé et une approche one-to-one qui répondra aux divers besoins de nos clients. Notre carnet d’adresses est assez riche, incluant des entreprises tunisiennes et autres étrangères installées en Tunisie.
Parlez-nous plus de vos services de consulting dans le domaine de la gestion des ressources humaines.
Hedi: Oui, et c’est notre troisième mission. Outre les sociétés qui nous contactent pour le recrutement des cadres et la mise en œuvre de programmes de coaching et de développement des compétences non techniques, nous mettons également à la disposition de nos clients des services de conseil RH. Ceux-ci englobent tout le dispositif de gestion des ressources humaines: élaboration des politiques et des stratégies, refonte des procédures et des outils de travail, amélioration de la culture d’équipe, fidélisation du personnel… Notre travail est basé sur une approche globale qui prend en charge tous les éléments nécessaires pour une gestion efficace des ressources humaines. Aujourd’hui, notre rôle dépasse l’aspect recrutement pour englober la refonte de tout le système RH à travers un diagnostic détaillé de l’environnement interne de l’entreprise et de son socle de valeurs, son historique en matière de recrutement, l’évolution et la réussite du personnel, le taux de rotation. Cette vue à 360° nous permet de bien cerner le profil RH de notre client et de proposer des solutions adéquates qui répondent à ses besoins.
Quelles sont les entreprises qui ont le plus recours à la chasse de têtes?
Hedi: En premier lieu, ce sont les multinationales qui ont le plus recours à la chasse de têtes, vu leurs processus et standards de travail et leur très haut niveau d’exigence. Nous intervenons avec cette catégorie de clients pour le remplacement des cadres et des top managers. Aujourd’hui, nous sommes devenus de plus en plus sollicités par les PME et les sociétés familiales qui représentent le noyau de l’économie. Ces entreprises, qui sont en train de vivre des mutations profondes avec la montée des nouvelles générations de responsables et face au nouveau paradigme du changement imposé par la complexité de l’environnement économique et opérationnel, demandent généralement un réel accompagnement RH. Mener une mission de refonte du dispositif de gestion des ressources humaines pour ce genre d’entreprises représente un vrai défi, vu les spécificités de leurs environnements internes et leur culture caractérisée par une grande résistance au changement. La troisième catégorie de clients est les startups, même au stade embryonnaire, qui sont à la recherche de compétences solides capables de développer les boîtes et leur ouvrir de belles perspectives de croissance.
Une startup a-t-elle les moyens d’avoir recours à ce genre de services ?
Hedi : Les startups qui ont effectué des levées et qui ont besoin de recruter des talents pour attaquer d’autres marchés dans le cadre de leurs stratégies de développement font appel à nos services. Pour d’autres startups, avoir recours aux cabinets de recrutement est un investissement qu’ils font dès le départ pour construire leur business sur des bases solides.
Sabine : Cibler les bons profils à travers les boîtes spécialisées en la matière est perçu par plusieurs entités comme un investissement rentable à moyen et long terme et non comme une dépense: le développement et la croissance du business passent, inéluctablement, par le choix d’un personnel qualifié et des responsables dotés de bonnes compétences managériales.
Quels sont aujourd’hui les profils les plus recherchés sur le marché?
Hedi: On est souvent à la recherche de cadres de direction comme de directeurs de ressources humaines, de finance, de DG, de DGA et récemment dans le domaine informatique, à la suite de l’hémorragie qui a eu lieu ces dernières années.
Sabine: Généralement, les profils les plus recherchés par les entreprises sont les personnes créatives, qui ont une valeur ajoutée et capables d’apporter les bonnes solutions aux problèmes rencontrés par les projets. Ces profils devraient être dotés d’une très forte capacité de résilience et d’innovation ainsi que d’un sens d’adaptation et de polyvalence. Ces qualités sont utiles pour la création du changement.
En tant que cabinet de conseil en ressources humaines, quelle est votre valeur différenciante?
Hedi: Nous estimons que notre grand atout par rapport à la concurrence est l’agilité. Notre approche du travail holistique est basée sur la passion et la disponibilité. Nous travaillons d’une façon agile et adaptée aux besoins de nos clients. Dans nos missions, nous veillons à nous investir massivement dans tout ce que nous faisons, tout en étant constamment à l’écoute des entreprises avec des échanges mutuels et constructifs.
Sabine: Nous prenons en charge tous les besoins du client en offrant une panoplie de services complets et diversifiés qui englobent le recrutement, le coaching, le conseil RH ainsi que le développement des compétences en leadership. Notre intervention ne se limite pas à l’aspect théorique des choses, nous aidons les entreprises à mettre en pratique les notions managériales et les soft skills afin de rendre notre apport efficace.
Quel est le facteur de succès de cet accompagnement ?
Hedi: Nous estimons que la réponse réside bien dans l’écoute du client et le respect des engagements. Le travail sérieux et la satisfaction des clients nous valent aujourd’hui un portefeuille de plus de 350 clients opérant dans divers secteurs. Nous nous engageons avec le client en tant que partenaire et non comme un cabinet de prestation de services.
Sabine: Ce partenariat est basé sur l’engagement pour la qualité, la confidentialité, la réactivité et le sens de l’adaptation à l’environnement interne, notamment pour les entreprises qui ont une culture professionnelle particulière qui nécessite une approche de traitement et des solutions adaptées à leurs spécificités.
Pour les cadres, quelles sont leurs attentes en termes d’environnement professionnel ?
Hedi:Généralement, les cadres cherchent un environnement favorisé où il y a une volonté de changement et de création de valeur ajoutée. Ils sont hostiles à la rigidité et au manque de professionnalisme. À travers notre expérience, la réussite de l’intégration pour la majorité des cadres est tributaire de l’existence d’un environnement professionnel sain et d’une culture managériale basée sur le respect mutuel, l’apprentissage et l’évolution collective. Dans nos missions, nous veillons à collaborer aussi bien avec le candidat qu’avec l’entreprise, en essayant de créer une sorte de synergie entre les deux parties pour que chacun d’entre elles trouve son compte en insistant sur l’importance du respect, de la clarté et de la compréhension mutuelle. Ce socle de valeurs permet de pérenniser les liens entre les différentes parties prenantes dans cette sphère et de réussir l’expérience client pour notre cabinet.
Pour le conseil RH, quels sont les plus importants challenges auxquels les entreprises font face aujourd’hui ?
Sabine: Nous estimons que le plus grand défi auquel les entreprises font face est bel et bien l’absence de communication efficace et ce constat est devenu très fréquent à travers les différents secteurs. Nous mettons un grand focus sur ce volet si crucial du comportement humain au sein de l’entreprise, car il représente l’un des piliers de la réussite de chaque projet : si on n’arrive pas à bien communiquer et se comprendre, on ne pourra pas réussir un projet. Parfois, l’entreprise met en place un système très performant en pensant résoudre les problèmes du travail. Toutefois, l’absence d’adaptation au changement, les divergences de visions, le manque de communication claire et efficace autour de ce nouveau système et l’incapacité à gérer les conflits engendrés font tomber à l’eau tous les efforts consentis pour créer le changement.
Comment percevez-vous le problème de la rotation dont souffre un très grand nombre d’entreprises ?
Hedi:Nous sommes tout à fait d’accord que lebrain drain est une grande problématique pour les entreprises en Tunisie, notamment celles opérant dans le domaine informatique. Il faut avouer qu’on ne sera jamais capable de stopper ce fléau définitivement. Toutefois, on pourrait concevoir et mettre en place des mesures pour atténuer l’impact néfaste de ce phénomène telles que l’élaboration de stratégies d’intégration et de rétention et l’instauration de mécanismes visant à fidéliser les employés et à enraciner la culture et l’esprit d’appartenance à l’entité. À titre d’exemple, faire un bon onboarding est devenu aujourd’hui très critique et un paramètre très important dans la réussite de l’intégration des employés et l’efficacité de la gestion des ressources humaines. Cinq ans en arrière, ce phénomène ne jouissait pas de la même valeur au sein des entreprises. Consentir des efforts pour offrir la meilleure expérience pour les employés est essentiel pour une gestion efficace du volet humain et le développement des compétences nécessaires pour la continuité d’exploitation et la réussite de l’entreprise. La culture de l’entreprise devrait être basée sur un socle de valeurs humaines et professionnelles prônant la valorisation du capital humain et l’émergence de générations d’employés fidèles ayant le sens de l’appartenance.
Pour les candidats et les entreprises qui cherchent des profils, quels conseils donneriez-vous pour améliorer leur attractivité?
Sabine:Le premier conseil est le branding et cela est valable aussi bien pour les candidats que pour les entreprises. Pour les candidats, il faut avouer qu’aujourd’hui les chercheurs d’emploi ont beaucoup plus d’options qu’auparavant grâce notamment à la présence du digital. Ces canaux représentent une opportunité pour les employés afin de faire la promotion de leur image, trouver des opportunités et s’ouvrir des perspectives d’évolution prometteuses. Nous conseillons également de saisir toujours les occasions d’organiser et de participer à des conférences et des événements afin d’enrichir le carnet d’adresses et d’établir des liens et des opportunités de réseautage enrichissants.
Hedi: Pour l’entreprise, c’est le travail sur son nom et sur son environnement professionnel interne qui fait promouvoir son image sur le marché du travail. Bien travailler sur ce volet permet d’améliorer considérablement son attractivité. Un taux de rotation élevé est une épée de Damoclès pour les entreprises, et donc le travail sur ce fléau devrait être une priorité pour elles. Lorsque nous intervenons auprès de nos clients, nous commençons toujours par élaborer une analyse SWOT afin de comprendre la cause racine des problèmes et d’agir en conséquence en mettant en œuvre les mesures adéquates.
Comment pouvez-vous aider les personnes qui sont dans une optique de reconversion professionnelle?
Hedi: On assiste aujourd’hui à ce phénomène dans tous les secteurs, notamment afin d’intégrer le domaine informatique où les perspectives professionnelles sont prometteuses. Nous estimons que c’est un phénomène normal et sain. Nos conseils par rapport à la gestion de cette reconversion englobent, entre autres, le suivi des parcours académiques comme les mastères et le MBA. Également, et surtout dans le domaine informatique, il y a les centres qui offrent des formations de courte durée pour l’apprentissage du développement et de la programmation. La technicité est importante dans le processus de reconversion, et afin d’augmenter les chances de s’ouvrir de nouveaux horizons, nous conseillons aussi de travailler sur la certification reconnue, notamment les certificats PMP.
Dans les années à venir, quelles sont les soft skills qui vont être le plus sollicitées par les entreprises?
Sabine: Nous estimons que la compétence interpersonnelle la plus importante et qui sera la plus sollicitée est l’empathie. En prendre conscience et être émotionnellement intelligent va permettre de développer les autres soft skills comme la communication, le sens de l’adaptation et le travail en équipe.
Quels sont vos projets?
Hedi: Nous mettons le focus sur la consolidation de la partie expertise RH. À travers nos missions, nous avons constaté une augmentation considérable de la demande dans ce domaine. Les gens sont en train de prendre de plus en plus conscience de l’importance des soft skills dans leur quotidien professionnel. Ce volet n’est plus un phénomène de mode, mais il est devenu une nécessité pour la progression et c’est pour cela que l’on voit des gens investir dans leur personnalité et leur comportement afin de réussir leur carrière et avancer. Notre mission sera d’aider les talents à se développer à travers un accompagnement complet et une intervention One Stop Solution. Nous sommes agiles et nous nous adaptons aux mutations et à la dynamique de changement du marché de l’emploi. Le métier des ressources humaines fait face à l’émergence de plusieurs phénomènes tels que l’intelligence artificielle, qui pourrait impacter considérablement la gestion du capital humain au sein de la société. Résoudre ces problématiques en perpétuelle évolution nous amène à adapter une approche de travail flexible, agile et à l’écoute du marché.
Le mot de la fin.
Hedi: Nous pensons que la clé d’une gestion efficace des ressources humaines réside dans le sens de l’écoute. Prenez le temps d’écouter vos employés! Ouvrir les portes du dialogue et du partage permet d’assurer une communication fluide au sein de l’équipe. Veiller à cet aspect est une étape cruciale dans l’amélioration de l’environnement de travail. Il faut instaurer une culture de partage de feedbacks et ne pas hésiter à mettre en place un système de diagnostic de tous les éléments du dispositif de gestion des ressources humaines afin d’en évaluer l’efficacité et le degré de satisfaction. Il ne faut pas tomber dans le piège de prendre le manque de moyens comme une excuse pour ne pas avancer sur un projet. Donner le premier coup de pioche, même avec peu de ressources, reste toujours un acte motivant pour l’équipe. On devrait travailler sur la mobilisation de tous les membres autour d’un projet ou d’une vision et puis les moyens suivront.