La hausse des taux d’intérêt a lourdement affecté les comptes des entreprises, dont certaines constatent que les charges financières absorbent la totalité des produits de l’exploitation. Si nous n’avons pas encore les chiffres des intérêts payés sur les crédits bancaires, nous disposons du chiffre des coupons remboursés en 2023 par les émetteurs des emprunts obligataires. Ils ont totalisé 304,750 Mtnd, en hausse de 16% en glissement annuel.
Dans un contexte risqué, c’est plus qu’une aubaine pour les investisseurs qui parviennent à anéantir une bonne partie de l’inflation réelle. Est-ce que cet argent payé par les emprunteurs est justifié par une dynamique d’investissement? L’analyse des données prouve, malheureusement, le contraire.
Les remboursements effectués durant 2023 sont de 660,110 Mtnd pour le principal. Si l’on ajoute les coupons, nous aurons un total de 964,860 Mtnd. Les nouvelles émissions sur la même période étaient de 997,500 Mtnd. En réalité, les sociétés émettent des emprunts obligataires pour refinancer leurs anciennes dettes. C’est un jeu à somme nulle qui ne profite qu’aux prêteurs. Ce système n’est pas propre à la Tunisie. Le problème est que les nouveaux emprunts ne servent qu’à cela, ce qui n’est autre qu’un nouvel indicateur que la production est à l’arrêt.
A notre avis, cette situation ne va pas s’améliorer avec la baisse des taux d’intérêt, qui commencerait dès la seconde moitié de 2024. Les émissions corporate vont devoir garder des taux élevés, car elles ont la concurrence de l’Etat, devenu principal joueur sur le marché obligataire primaire. Les rendements qu’il offre mettent de la pression sur les privés qui peuvent trouver dans les prêts bancaires un refuge. Ce n’est donc pas seulement une question de coûts, mais aussi de profondeur de marché. Il faut alors s’attendre à une physionomie pareille cette année. Le volume des émissions collerait avec celui des remboursements programmés pour 2024.