L’Association de lutte contre l’économie de rente (Alert) a identifié une série de facteurs structurels et conjoncturels qui sont à l’origine de la pénurie de pain en Tunisie.
La production nationale de céréales est insuffisante pour répondre à la demande de consommation. De plus, certaines minoteries, liées à l’organisation patronale, exercent une forte influence sur le marché d’approvisionnement, créant ainsi des dysfonctionnements dans la distribution de la farine subventionnée. Certaines boulangeries ont tendance à monopoliser la plus grande quantité de farine, aggravant ainsi le problème.
En outre, des facteurs conjoncturels ont accéléré le déclin de la filière du pain en Tunisie. Les importations de blé dur ont connu une baisse significative de 30% au cours des cinq premiers mois de 2023 par rapport à la même période en 2022. Ce déclin est principalement dû au manque de liquidités et à l’incapacité de l’Office des céréales à financer les besoins du marché. De plus, le pays a dû faire face à une conjoncture climatique difficile avec une sécheresse sévère, impactant lourdement la production de blé dur, qui représente seulement 19% des besoins du marché.
Une autre problématique concerne la hausse du prix de la semoule, passant de 38 à 59 dinars le quintal. Cette augmentation a conduit les boulangeries classées et non classées à ne plus pouvoir fournir des baguettes à 190 millimes, contribuant ainsi à la pénurie de pain.
Selon Alert, la responsabilité première de cette pénurie incombe au pouvoir politique. La décision de lever les subventions en l’absence d’une offre suffisante et sans augmentation des prix du pain est perçue comme une politique orchestrée par l’État. Les subventions allouées aux produits de base ont considérablement diminué de 90% au cours du premier trimestre de la période 2022/2023, passant de 400 à 42,9 millions de dinars. De plus, l’Office des céréales n’a pas reçu de subventions depuis un an, ce qui l’a rendu incapable de répondre aux besoins du marché.
L’appel du président de la République visant à mettre fin à la classification des boulangeries est également critiqué par Alert. Selon l’association, cette mesure risque de réduire la demande et de provoquer des files d’attente interminables devant les boulangeries. Elle est perçue comme une politique visant à dissimuler la levée des subventions sur les produits de base et à favoriser uniquement les intérêts des boulangeries bénéficiant d’autorisations spéciales.