Par Hend Fellah
“La Tunisie ne sera jamais en marge de l’innovation et de la production tant qu’il y aura pour la soutenir un peuple voué à pérenniser sa splendeur. Le sens du travail bien accompli et la ténacité doivent être les seuls mots d’ordre pour tous ceux qui souhaitent faire de la Tunisie le berceau d’une nouvelle économie prospère.”
C’est ce qu’a déclaré Mme Wided Bouchamaoui lors d’un colloque sur “Les investissements prioritaires en Tunisie”, organisé par la Fondation tunisienne de la gouvernance et de l’évaluation, en collaboration avec l’UTICA.
Les crises dont nous ne cessons de débattre ne reflètent pas la réalité des choses. À ceux qui brandissent le chiffre élevé du taux de chômage, Mme Bouchamaoui rétorque que le secteur privé est en manque de main-d’œuvre qualifiée et ses besoins sont en continuelle augmentation.
Le secteur public, par contre, est soumis à une surcharge d’effectifs et ne peut assimiler davantage d’employés, d’où la nécessité pour les Tunisiens de prendre conscience que le privé est désormais la meilleure alternative.
Autour de ce colloque se sont mis en place nombre d’ateliers brassant tous les secteurs de l’économie tunisienne : tourisme, industrie, agriculture, services. Le Manager a choisi de suivre pour vous l’atelier des “Services et des nouvelles technologies” tentant ainsi de faire le point sur la place des investissements immatériels en Tunisie.
Le monde des finances et de l’entrepreneuriat est en perpétuel mouvement. Il se doit, pour exister, de suivre le courant des avancées technologiques et d’y puiser toute possibilité de progrès.
Il est également de notre ressort de suivre cet avancement et de pouvoir le valoriser à bon escient. Le sujet abordé dans l’un des ateliers du colloque se fonde sur la définition de l’investissement immatériel et de sa valeur ajoutée en tant qu’atout pour la société. Une définition claire et précise est donc de mise, afin d’écarter tout malentendu suggérant que l’investissement immatériel, vu son statut abstrait, ne peut être fructifié.
Or un investissement immatériel finira immanquablement par générer un gain matériel. Il repose essentiellement sur la formation des employés, l’acquisition de logiciels informatiques, la valorisation du produit à travers la publicité, le marketing etc. Une entité économique peut donc se suffire à elle-même, en essayant d’innover en interne sans être obligée de faire appel à une main- d’œuvre ou des experts extérieurs à l’entreprise.
Investir dans la formation de ses ouvriers et mettre à jour leurs connaissances est désormais devenu la meilleure façon de fructifier son capital. Cette formation, bien que coûteuse, engendrera des avantages économiques futurs qui amortiront sensiblement les charges déboursées. C’est non seulement une valeur ajoutée à la société mais également un investissement à long terme.
L’investissement immatériel regroupe l’ensemble des dépenses d’innovation liées à la recherche et au développement. Investir dans la formation est donc une façon de capitaliser le savoir comme un outil de production pouvant être amorti sur plusieurs années. La véritable richesse n’est donc pas concrète mais abstraite. Elle consiste en la capacité de créer de nouveaux concepts, d’innover et d’inventer.
Plusieurs chefs d’entreprise considèrent que ce qui est abstrait ne peut avoir de rendement réel et ne peut, par conséquent, contribuer à l’amélioration des performances d’une entreprise, car il n y’ a pas de relation directe entre l’effort fourni et le résultat tangible de cet investissement. Il faut néanmoins savoir que dans l’investissement immatériel, le qualitatif prime sur le quantitatif. La croissance de la courbe de valeur est donc intangible, impalpable mais réel car lié au savoir et à l’information.
Et ce n’est pas les success stories du moment qui démentiront cela. Lorsque nous regardons de plus près les nouvelles richesses de ce monde, nous voyons que la plupart sont des jeunes ou moins jeunes qui ont œuvré dans la création de concepts innovants et dont la plus grande fortune reste le savoir et l’originalité. A cela s’ajoute l’aide financière de l’Etat ou de particuliers qui prennent en charge tout le volet budgétaire du projet et le mettent sur le marché en tant que produit fini.
C’est désormais sur quoi doit se focaliser la Tunisie : promouvoir le capital humain tunisien, ainsi que l’inventivité de nos jeunes générations en créant des mécanismes de financement pour soutenir ces jeunes et les encourager à investir leur savoir en Tunisie.
La question qui se pose est également de savoir si l’investissement immatériel peut-il être vu comme une charge comptabilisée pour la société ? C’est ici qu’entrent en jeu les nouvelles études sur la valorisation du capital humain par le biais de la méthode du goodwill qui représente la différence entre l’actif net du bilan d’une entreprise et sa valeur de marché (acquise à travers la publicité, la renommée, l’emplacement, etc.)
Au bout de ces divers ateliers, de nombreuses recommandations ont été faites englobant les principaux secteurs de l’économie : tourisme, industrie, agriculture et services.
Pour ce qui en est du tourisme, la question de la sécurité demeure un impératif car il ne peut y avoir de tourisme dans un pays en proie aux menaces terroristes. Il n’en demeure pas moins qu’il est impératif de mettre en place et de former une unité d’agents de sécurité afin de garantir la sécurité des résidents. Le gouvernement doit également prendre en considération les défaillances de ce secteur et œuvrer pour son amélioration en encourageant le tourisme intérieure comme les maisons d’hôtes, les auberges et les chalets des régions nordiques qui font tout le charme de notre pays.
Le domaine agricole est également en proie à certaines difficultés mais d’un ordre différent. Les changements climatiques, s’ils ne sont que légèrement ressentis à notre niveau, provoquent des pertes colossales d’un point de vue agro-économique. Pour pallier cela, des mesures drastiques doivent être prises afin d’aider les agriculteurs et les directeurs de PME à faire face à ce nouveau fléau. Hélas les aides de l’Etat ne répondent qu’aux besoins des 5% des demandeurs de prêts. Une injustice mais également une tare à corriger de toute urgence.
Pour le secteur industriel, les avis sont unanimes : la Tunisie demeure un terrain fertile à tout type d’industrie. C’est pourquoi, le maintien de l’ordre social est primordial afin de garantir l’avènement de potentiels promoteurs et donner l’image d’un pays où l’on peut réellement investir et sur lequel on peut compter.