BVMT-CTFCI : Valorisation du capital immatériel
Par Sahar Mechri
La Bourse de Tunis et la Chambre tuniso-française de commerce et d’industrie ont organisé, en collaboration avec le cabinet français Novelesta, un atelier sur la valorisation du capital immatériel des entreprises.
Fait d’évidence, dans ce monde en forte et perpétuelle mutation, les entreprises sont fortement valorisées à travers leur capacité d’adaptation et de création de la valeur dans le futur. Il va sans dire que l’évaluation comptable traditionnelle, quand bien même indispensable, peut s’avérer incomplète pour refléter la vraie valeur d’une entreprise. Celle à laquelle on se référerait en cas de transmission ou de cession.
Bilel Sahnoun, directeur général de la Bourse des valeurs mobilières, en convient que l’évaluation des actifs immatériels de plus en plus interpellée par les organisations et les instances internationales devient impérative et essentielle, notamment lors d’une transmission d’entreprise ou d’une introduction en Bourse. Toutefois, la difficulté de l’exercice est due à l’absence d’un référentiel des prix pour les différentes composantes du capital immatériel, ce qui représente un grand obstacle. A dire vrai, la possibilité même de la réaliser est loin d’être certaine. De ce fait, Sahnoun a précisé que les enjeux de la valorisation du capital immatériel sont devenus difficiles à cerner pour les entreprises et qu’on ne peut plus se contenter de les gérer implicitement.
Pour Foued Lakhoua, président de la CTFCI, dans une économie de plus en plus tournée vers les services, il existe d’autres indicateurs, autres que comptables, qui devraient être pris en compte dans le processus de valorisation du capital. Il s’agit de facteurs clés qui ont des capacités à susciter les talents, à organiser le cycle de production et à innover. Une valeur qui n’est malheureusement pas toujours visible dans les bilans établis.
D’autant plus qu’avec l’avènement du numérique, la croissance d’une entreprise est de plus en plus évaluée selon la taille potentielle du marché, la typologie de ses clients, mais surtout la gestion de ses données; des éléments clés pour l’évaluation des actifs immatériels, avance-t-il.
Capital immatériel : de quoi s’agit-il ?
Face à la complexité de l’évaluation de ces actifs immatériels, Couzi Marielle et François Garcia, du cabinet de conseil Novelstra, développeur du diagnostic dynamique de valorisation des capitaux immatériels VINCAE, ont essayé de braquer la lumière sur ces éléments qui constituent le capital immatériel. Partant d’une dynamique de progrès, l’intérêt d’évaluer les capitaux immatériels de l’entreprise est de mettre en avant à destination des investisseurs ou des clients les éléments extra financiers différenciateurs qui la valoriseraient. Autrement, si ces éléments sont de nature à baisser la valeur comptable, l’intérêt serait de détecter les pistes d’amélioration dans un horizon temporel précis. Autant dire que les enjeux sont considérables!
François Garcia précise qu’il s’agit en gros d’objectiver un certain nombre de points qui n’apparaissent pas aujourd’hui dans les valorisations traditionnelles. De son côté , il a cité la valeur d’un dirigeant, sa stratégie, sa projection en termes de projets de développement, de projets à l’international, se basant sur l’exemple d’une start- up où l’effectif est réduit, l’organisation peu structurée et donc la contribution individuelle est de grande importance.
De son côté Murielle Couzi a attiré l’attention sur la différence entre une organisation de travail intelligent où venir travailler est perçu comme un honneur et une autre où le dépôt du stylo se fait à 17h. Pour cette dernière catégorie, les répercussions se ressentiront certainement au niveau de la qualité, des délais et des coûts. Inutile de dire que ce sont les leviers de toute organisation. Ces informations ne sont pas relevées dans les bilans.
Elle a également signalé que ce qui distingue une entreprise n’est pas tellement son aptitude à bien produire mais c’est surtout sa capacité à appréhender le client dans sa globalité, à le comprendre, voire à anticiper ses besoins, créer des besoin latents. Après quoi, la deuxième étape serait d’aliéner l’organisation au service de la stratégie et le système d’information au service de l’organisation. Enfin, pouvoir gagner en puissance et mieux répondre aux besoins du marché, autant dire qu’il faut être très opportuniste, réactif, innovant, audacieux pour pouvoir booster le marché surtout lorsqu’il est contraignant, a avancé Murielle Couzi. Et d’insister : “C’est lorsque qu’il est contraignant et qu’il y a besoin d ‘excellence dans les actifs immatériels”.
In fine, si diagnostiquer les actifs immatériels revient à mieux identifier les ressources et le processus de création de valeur dans l’entreprise, il permet de surcroît de créer une base de données sur les différents types d’actifs mais surtout d’établir les plans d’action nécessaires.
Et pour conclure, François Garcia partage l’avis que le point stratégique est de déterminer quelle information -non comptable- je devrais communiquer afin de mieux valoriser mon entreprise. Plus un investisseur dispose d’informations sur ces éléments créateurs de valeur dans le futur, plus il y a des chances qu’il s’intéresse à l’entreprise car il serait capable d’anticiper sa valeur future.