«La transition écologique n’est plus une option, il y va de notre souveraineté alimentaire et énergétique, mais tout n’est pas perdu si on agit vite pour se libérer de la dictature du court terme, regarder loin, nous tous (Etat, entreprises, citoyens), avant qu’il ne soit trop tard!», avertit Hédi Mechri, directeur des publications Promedia, lors de l’ouverture du 23e Forum annuel de l’Economiste Maghrébin, le 14 juin 2022, sur le thème «La Tunisie face aux défis économiques des transitions écologique et énergétique», en partenariat avec la Délégation de l’Union européenne et la Fondation Friedrich Naumann pour la Liberté, à l’hôtel Laico.
La salle des congrès de l’hôtel Laico n’a jamais été aussi «dynamisée». Pour marquer la tenue du forum, une installation blanche éclairée d’une pointe bleue présente ses énormes lettres Times; une estrade surélevée sur laquelle cohabitent cinq sièges capitonnés avec ce qu’il faut d’aplomb pour garder les panélistes alertes avec une tribune transparente pour accueillir les orateurs debout face à l’assistance; derrière eux, un énorme écran illuminé des couleurs du forum et gagnant un effet focalisant alors qu’il est encadré de deux écrans-équerre à droite et de deux autres à gauche; l’estrade est ceinte en bas par une jupe de scène (un écran à défilement comme celui des stades), des écrans latéraux de 4m de hauteur; une fête en prolifération de LED pour mettre en valeur, non seulement l’événement, mais aussi tous les sponsors qui ont cru dur comme fer au thème de ce 23e Forum de l’Economiste Maghrébin qui propose un débat sur «La Tunisie face aux défis économiques des transitions écologique et énergétique».
«Faire passer la transition énergétique de l’ambition à l’action»
Hédi Mechri, directeur des publications Promedia, argumente sur la pertinence du sujet, à l’ordre du jour bien avant la guerre d’Ukraine, alors que notre sécurité écologique et énergétique est l’objet d’un vaste débat avec les enjeux majeurs du dérèglement climatique, l’épuisement des ressources, quand les conséquences du réchauffement se lisent déjà. Il estime notamment qu’il est nécessaire de mettre en place une taxe carbone pour nos entreprises en fonction de l’émission de CO2, taxe qui serait assimilée à un droit de douane.
«L’heure de la transition écologique a déjà sonné, le pays est en retard alors qu’il en a les moyens; si nous avions agi dans les années ’70, nous n’aurions pas aujourd’hui ces pénuries. Et, avec les effets de la guerre d’Ukraine, nos problèmes vont s’accentuer. Nous avons laissé passer le temps de la transition, faute de vision. Il faut aujourd’hui changer de dessein et faire passer la transition énergétique de l’ambition à l’action», ajoute Mechri.
Selon lui, cette transition est impérative alors que nos ressources s’épuisent et que le pays souffre de stress hydrique. Il faut comprendre que cette transition a un coût: 10 milliards de dinars. L’Etat mettra 5 milliards dans la balance quand il est déjà sollicité pour faire face aux dépenses dans l’éducation, santé, infra, investissement privé… «C’est le sujet du 1er panel: la transition énergétique, de l’ambition à l’action. Quant au 2e panel, il débattra de l’investissement et de la finance verts au moment où le pays croule sous la dette. Le 3e panel, l’innovation et la technologie au service de la transition, traite du fait qu’avec l’épuisement de nos réserves en énergies fossiles, celles-ci sont devenues un frein à la croissance, alors qu’il est possible de repenser notre transition énergétique vers le solaire avec de nouvelles créations d’emplois. C’est ainsi que nous pourrons aller aux avantages comparatifs. De ces 3 questions majeures traitées dans les panels, il faudrait retenir que la transition écologique n’est plus une option, qu’il y va de notre souveraineté alimentaire et énergétique, que tout n’est pas perdu mais qu’il faut agir vite, se libérer de la dictature du court terme, regarder loin, nous tous: Etat, entreprises, citoyens, avant qu’il ne soit trop tard!», avertit Hédi Mechri.
Pour être capables de regarder nos enfants dans les yeux!
Habib Karaouli, président du Forum, introduit l’événement et détaille le programme et les contenus. Il propose une vidéo percutante où il est question d’un scénario-catastrophe quand nous finirons par ne produire qu’un tiers de nos céréales et où nous perdrions 70% de notre huile d’olive… C’est ce que nous laisserions à nos enfants si nous ne faisons rien en matière de transition écologique. La vidéo dénonce les modes de vie qui ont perturbé la planète, et même si notre pays n’a contribué qu’à 0,07% du réchauffement climatique, il est urgent de nous engager dans des changements systémiques. La Tunisie doit notamment baisser de 45% son empreinte carbone en 2030; et pour cela, il faut passer véritablement à l’action, maintenant, pour être capables de regarder nos enfants dans les yeux!
C’est le même vœu que formule Nour Boumaiza, directrice du programme économie et migration à la Friedrich Naumann, au nom d’Alexandre Riepier, Représentant résident de la fondation Friedrich Naumann pour la Liberté: «La fondation est en Tunisie depuis 60 ans et nous sommes partenaires de l’Economiste Maghrébin depuis 30 ans. Nous saluons la pertinence du choix de cette thématique aussi importante et j’espère que les panélistes vont vous inciter à revoir vos politiques énergétiques».
Ce 23e Forum a accueilli de nombreux responsables nationaux et internationaux des secteurs de l’environnement, de l’énergie, de l’économie et des finances ainsi que des représentants du secteur privé et de la société civile opérant dans les domaines en rapport avec les thématiques du Forum. Une vingtaine de communications ont été exposées par des responsables, des experts et des universitaires sur trois axes: la transition énergétique, de l’ambition à l’action; l’investissement et la finance verts; l’innovation et la technologie au service de la transition.