Les voyageurs pour Istanbul, qui ont exprimé leur mécontentement dimanche après le retard accusé par le vol matinal de Tunisair, avaient bien raison de contester. Jamais la livre turque n’a été aussi faible et c’est le moment ou jamais de réaliser de bonnes affaires. Aujourd’hui, elle a poursuivi sa chute libre après que le Président Erdogan a rejeté dimanche les avertissements sur les dangers des récentes baisses de taux d’intérêt et a déclaré qu’il compte bien continuer son approche. À l’ouverture des marchés hier, un dollar équivaut à 17,69 livres.
Depuis septembre, la devise turque a perdu plus de 50% de sa valeur, et l’inquiétude ne cesse de monter quant aux répercussions de la chute de la monnaie sur la santé du système financier dans son ensemble. Erdogan a mis l’orthodoxie économique aux oubliettes en insistant sur quatre baisses des taux d’intérêt au cours des quatre derniers mois en dépit d’une inflation croissante. Il est allé à l’encontre de la tendance mondiale à un moment où d’autres Banques centrales dans le monde cherchent à combattre l’instabilité des prix en augmentant les taux. En même temps, les autorités turques ont nié toute intention d’imposer des contrôles de capitaux pour tenter d’enrayer la chute de la monnaie.
L’idée d’Erdogan est simple, mais extrêmement dangereuse : des taux bas et une monnaie compétitive pour soutenir les exportations, les investissements et l’emploi. Le prix immédiat à payer par la population est l’inflation (21%) et l’instabilité financière dans un pays qui dépend fortement des financements étrangers.
Le Président turc a fini par annoncer d’autres mesures qui ont stoppé l’hémorragie. Un mécanisme sera créé permettant de compenser les pertes des comptes nationaux en livre à cause de la dépréciation de la monnaie nationale. En fin de compte, c’est l’équivalent d’une hausse déguisée des taux d’intérêt. La livre a terminé la journée en s’échangeant à 13,5 contre le dollar.
Pour la Tunisie, cette dégringolade mettra encore nos entreprises sous pression, avec le flux attendu de marchandises turques qui atterriront dans nos boutiques réelles et virtuelles. Istanbul est la reine de la compétitivité par les coûts et arrachera certainement des parts de marché à tous ses concurrents méditerranéens. Déjà, le solde des échanges commerciaux avec la Turquie affiche un déficit de -2 378 MTND jusqu’à novembre et devrait encore se creuser d’ici la fin de l’année. Bonne chance à nos PME.