Pendant de longues années, le rapport Doing Business, publié par la Banque mondiale, a été LA référence en ce qui concerne la mesure des environnements d’affaires dans les pays du monde. Ce rapport a été tellement important que la Tunisie a créé au sein du ministère de l’investissement un comité dont la seule mission était d’améliorer le rang de la Tunisie dans ce classement.
Une opération d’audit réalisée dernièrement a, en revanche, révélé que ce rapport n’était pas sans (grosses) failles. Suite à ces révélations, la Banque mondiale avait décidé qu’elle ne va plus publier le rapport Doing Business.
Parmi les révélations du rapport de la mission d’audit, on trouve le rôle qu’a joué Kristalina Georgieva, actuellement directrice du FMI, dans une opération de manipulation des données qui a visé à améliorer le classement de la Chine. Georgieva, à l’époque CEO de la Banque mondiale, a été directement impliquée dans des efforts de manipulation de données au profit de la Chine.
Les hauts responsables chinois ont, d’après le rapport d’audit, fait pression sur le management de la Banque mondiale pour améliorer le rang de leur pays. En effet, ces responsables ont indiqué que la 78ème place qu’a occupée la Chine dans le rapport de 2017 “ne reflète pas la réalité sur le terrain”.
Lorsque, en octobre 2017, l’équipe chargée de la rédaction du rapport a révélé à la direction de la BM que la Chine va perdre 7 places pour arriver 85ème dans l’édition 2018 du rapport, les événements ont pris une tournure inattendue.
Jim Yong Kim, à l’époque président de la BM, et Kristalina Georgieva ont tenu une série de réunions visant à trouver un moyen pour améliorer le rang de la Chine. Georgieva a été par la suite en charge des efforts visant à l’améliorer.
Parmi les mesures approuvées par la CEO de la Banque mondiale à cet effet, le rapport de l’audit cite le changement de méthodologie en affectant plus de poids à deux villes, Beijing et Shanghai, ce qui permet à la Chine de gagner plusieurs places. Ce plan a été rapidement décliné parce qu’il améliore le score de plusieurs autres pays dans la région.
Georgieva a, par contre, approuvé un plan selon lequel le score de la Chine sera modifié dans les indicateurs clés, ce qui lui permet de gagner 7 places dans le classement global. La CEO de la Banque mondiale est même allée chez l’un des managers de l’équipe de Doing Business pour avoir la copie finale des données manipulées. Une semaine plus tard, le rapport a été publié avec ces données.
Durant la même époque, la Tunisie a perdu 11 places pour passer de 77ème en 2017 à 88ème en 2018. Pour le moment, il n’est pas encore clair si la manipulation des données de la Chine a impacté la Tunisie.
D’après le rapport de la mission d’audit, la Chine n’est pas le seul pays qui a profité de telles “améliorations”. L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont aussi profité d’un pareil traitement préférentiel, cette fois-ci, sans l’implication de Kristalina Georgieva.
MISE À JOUR
Aujourd’hui, Kristalina Georgieva a publié un communiqué de presse indiquant que “je suis fondamentalement en désaccord avec les conclusions et les interprétations de l’Enquête sur les irrégularités dans les données en ce qui concerne mon rôle dans le rapport Doing Business de la Banque mondiale de 2018. J’ai déjà eu un premier briefing avec le Conseil d’administration du FMI sur cette question”.