Dix-huit mois après le début de la pandémie de la Covid-19, le monde prend conscience du rôle indispensable de la coopération internationale pour assurer la résilience économique, un principe entériné à Bretton Woods lors de la fondation du système multilatéral. Mais la volonté de rééquilibrer l’économie mondiale et de réformer l’architecture économique internationale fait toujours défaut.
Tout d’abord, il serait prématuré de parler de résilience financière dans les pays en développement car, dans de nombreux cas, les flux d’investissement restent volatils et le poids de l’endettement intolérable. Bien que des crises de la dette souveraine en cascade aient été évitées en 2020, la viabilité de la dette extérieure des pays en développement s’est encore détériorée.
Le fait que des taux d’intérêt plus élevés puissent déclencher de fortes craintes quant aux actifs des pays en développement et des problèmes de balance des paiements montre à quel point la situation a peu changé depuis la crise financière mondiale. Cette situation fragile accentue les contraintes de solvabilité extérieure et de liquidité internationale.
Au cours des prochaines années, les pressions sur la viabilité de la dette extérieure persisteront car de nombreux pays en développement sont confrontés à un mur de remboursements de dette souveraine à venir sur les marchés obligataires internationaux.
Ensemble, les pays en développement (à l’exclusion de la Chine) doivent faire face à des remboursements totaux d’obligations souveraines déjà émises d’une valeur de 936 milliards de dollars jusqu’en 2030, année prévue pour la réalisation des Objectifs de développement durable.
La Cnuced appelle à un allégement concerté de la dette et, dans certains cas, à son annulation pure et simple, afin de réduire le surendettement des pays en développement et d’éviter une nouvelle décennie perdue pour le développement.
Deuxièmement, la pandémie a vu émerger un consensus sur la nécessité d’une intervention significative du secteur public, mais il y a moins d’accord sur ce que cela implique au-delà des mesures contracycliques. Le risque existe que les mesures budgétaires expansionnistes ne soient considérées que comme des outils de lutte contre l’incendie, alors qu’elles sont en fait des instruments essentiels du développement à long terme.
La Cnuced demande que l’espace politique créé par la pandémie soit mis à profit pour réévaluer le rôle de la politique budgétaire dans l’économie mondiale, ainsi que les pratiques qui ont creusé les inégalités.
Troisièmement, pour apporter le soutien nécessaire à une meilleure reconstruction, il faudra une coordination politique beaucoup plus grande entre les économies d’importance systémique ; les réformes de l’architecture économique internationale qui avaient été promises après la crise de 2008-2009 ont malheureusement été rapidement abandonnées face à la résistance de la classe des rentiers.
Quatrièmement, la réticence des autres économies avancées à suivre l’exemple des États-Unis visant à exempter des droits de propriété intellectuelle les vaccins contre la Covid-19 n’est pas seulement un signe inquiétant de l’obstination désordonnée du Nord ; elle est particulièrement coûteuse pour des économies déjà limitées financièrement. Selon une estimation récente, le coût cumulé des retards de vaccination s’élèvera, d’ici 2025, à 2 300 milliards de dollars, les pays en développement devant supporter la majeure partie de ce coût.
Un soutien international renouvelé est nécessaire pour les pays en développement, dont beaucoup sont confrontés à une crise sanitaire de plus en plus grave, alors même qu’ils doivent faire face à un fardeau croissant de la dette et à la perspective d’une décennie perdue.