Le départ fracassant de Lionel Messi du FC Barcelone mérite d’être étudié comme un cas d’école de management et de bonne gouvernance. Quatre principales leçons peuvent en être tirées.
La première leçon provient de l’attitude du Barça. Laporta a été clair : personne n’est au-dessus de l’institution. Bien qu’il s’agisse du meilleur joueur du monde à l’heure actuelle, lui offrir un nouveau contrat XXL serait une bonne nouvelle à court terme, mais les conséquences sur les prochaines années seraient catastrophiques. C’était donc le bon choix du point de vue administratif, mais peut être le pire sportivement parlant. Messi était capable de rendre les billets plus chers, d’attirer une centaine de milliers de spectateurs par match, de faire grimper l’audience, de vendre des maillots, mais il pouvait également ruiner définitivement les finances du club. Il ne faut donc jamais tenter de garder un talent s’il met à risque l’existence du groupe car la performance collective dépasse toujours celle individuelle.
Cette bonne décision était inéluctable après des années de mauvaise gestion, de cumul de dettes, de fuite vers l’avant par une autre équipe dirigeante. Et c’est là où émerge la deuxième leçon. Ce qui a permis à cette mauvaise gestion de passer inaperçue c’est l’importance des revenus du club, parmi les plus élevés au monde. Les dirigeants ont donc recouru à un effet de levier qui a été brusquement stoppé par la crise sanitaire. Le chiffre d’affaires a chuté et les finances ont été mises à nu. Il ne faut donc jamais se fier à l’importance de son chiffre d’affaires pour bâtir sa stratégie de financement. Ce qui compte c’est la profitabilité et elle était très faible. Le club se permettait des salaires de folie dépassant 100% des revenus. Il jouait la carte de pouvoir générer plus de recettes pour couvrir les charges, alors que c’était loin de l’orthodoxie financière.
La troisième leçon est que la question financière reste la clé dans les relations employé-employeur. Le Barça n’a pas demandé à Messi de jouer gratuitement, mais il lui a proposé un salaire dépassant 20 millions d’euros nets l’année. Mais son statut de meilleur joueur ne lui permettait pas d’accepter un salaire inférieur à d’autres joueurs et à ce que d’autres clubs pouvaient proposer. L’appartenance à une institution a toujours des limites et elle est très liée à la question financière. Pour garder les talents, il faut les valoriser correctement selon ce qu’ils pensent valoir. D’ailleurs, plusieurs joueurs du club ont vu leurs salaires baisser à cause de la crise et dans le but de renouveler le contrat du joueur, et le refus était la réponse de la majorité. Que l’on veuille ou pas, l’argent reste la principale question dans toute relation contractuelle.
La quatrième leçon provient du plan PSG. Maintenant, c’est lui qui prend les risques en cumulant les gros salaires et les talents. Rien ne peut garantir que l’UEFA ne va pas sanctionner le club ultérieurement en le privant de disputer les compétitions européennes. Dans ce cas, est-ce que les joueurs vont rester ? Le club compte donc jouer la fenêtre de tir disponible cet été pour tenter de réaliser des objectifs immédiatement. C’est une prise de risque au vrai sens du terme. S’il réussit son pari, c’est le grand chelem et il pourra entrer dans l’histoire. Tout sera pardonné. Mais s’il échoue, il va risquer de se retrouver dépourvu de ses principales armes. Qui ne risque rien n’a rien. Toutefois, ce risque doit être calculé pour éviter le pire et nous ne pouvons pas juger cela avant la fin de l’année sportive.
Conclusion : les erreurs de bonne gestion d’aujourd’hui, qui peuvent être camouflées par un contexte économique porteur, peuvent mettre en danger la vie d’une entreprise si un facteur exogène incontrôlable émerge. Seuls des fonds propres solides peuvent garantir la survie d’une entité. La dette a toujours des limites.