« La Ticad-8 sera un événement historique ; le plus grand événement multilatéral jamais organisé par la Tunisie depuis l’Indépendance. La Tunisie, désignée comme pays hôte, ne peut que saisir cette occasion pour faire valoir ses avantages comparatifs, ses ressources humaines, son savoir-faire, les atouts de sa position géographique stratégique, son inventivité dans son cadre africain », atteste Hédi Ben Abbès, président de la CCI tuniso-japonaise.
Plus de 20 milliards de dollars en IDE
Selon lui, si la Ticad-7 qui a eu lieu à Yokohama, au Japon, en 2019, a permis de lever des fonds du secteur privé japonais à hauteur de 20 milliards de dollars sous forme d’investissements directs sur trois ans, il est plus que probable que la Ticad-8 fera mieux : « À l’heure où le monde entier regarde l’Afrique avec gourmandise, identifiant l’énorme potentiel que ce continent représente en termes d’investissement et de développement, il est du devoir de la Tunisie d’être la véritable porte d’entrée de l’Afrique et de saisir cette opportunité pour sa relance économique. »
Une réalité de rendez-vous manqué flotte dans l’air et si les personnalités qui ont pris la parole ne l’ont pas clairement dit, les allusions de tous étaient très claires. Ben Abbès évite de s’attarder sur ce que l’on reproche aux gouvernements tunisiens successifs et préfère se concentrer sur l’appel au secteur privé tunisien à croire en ce continent et d’y investir de manière originale et inventive et d’être le fer de lance d’une véritable stratégie de développement africain. Le rôle du secteur privé japonais sera primordial dans cette stratégie qui passe par l’identification des secteurs à haute valeur ajoutée et la mise en place de plans d’action sectoriels en étroite collaboration avec les partenaires japonais.
Il remarque juste que nous n’allons nulle part « si l’État tunisien ne met pas des moyens structuraux à la hauteur de nos ambitions multilatéralistes africaines. »
Shinsuke Shimizu, ambassadeur du Japon en Tunisie, distille cette critique d’une manière diplomatique : « Nous prenons de plus en plus conscience de la nécessité d’améliorer le climat d’affaires en Afrique. C’est pour cela qu’à la faveur de la Ticad-7, nous avons organisé pour la première fois un débat direct entre les Chefs d’État et les leaders du milieu des affaires. »
Plus clairement, Shinsuke Shimizu souligne : « La participation de la Tunisie a été de plus en plus élevée depuis la Ticad-5 mais elle n’a pas été très satisfaisante lors de la Ticad-7 à cause de la situation politique en Tunisie en 2019. La Tunisie va se rattraper lors de la Ticad-8, ce sera une occasion de montrer ses capacités et sa nature de porte d’entrée de l’Afrique dans son partenariat stratégique avec le Japon. »
La Tunisie ; un Hub triangulaire
Bien sûr, l’ambassadeur est surtout là au premier chef pour expliquer la philosophie de la Ticad. Il ne s’en prive pas : « La Ticad a été créée en 1993 sous la forme d’une réunion multilatérale avec la contribution de l’ONU, le PNUD, la Banque mondiale et l’Union Africaine. C’est la deuxième Ticad qui se tient en Afrique après celle de Nairobi, au Kenya, en 2016. C’est un Sommet au niveau des Chefs d’État et du gouvernement qui se tient chaque 3 ans de façon alternée entre le Japon et l’Afrique. »
Ce qu’il faut en retenir, ce sont 2 piliers et 3 priorités : « Le principe de la Ticad évolue autour de 2 piliers : donner la responsabilité de développement aux pays africains eux-mêmes et les partenaires internationaux qui soutiennent leur effort. Cela remplace la philosophie traditionnelle de rapport entre les donneurs d’aide et les récipiendaires. La Ticad a 3 priorités : l’économie (intégrer les pays africains dans l’économie mondiale), la société (réduire la pauvreté et résoudre les questions de santé et d’éducation), la paix et la sécurité. »
Pour Hédi Ben Abbès, président de la CCI tuniso-japonaise, il s’agit d’identifier en quoi la Tunisie peut profiter de cet événement d’une manière pratique et opérationnelle en 5 étapes : identification des secteurs où la Tunisie a des avantages comparatifs, enclencher un processus de mise en route de stratégies d’investissement, établir des listes sectorielles, organiser des journées d’études par secteur, créer un annuaire électronique des opérateurs tunisiens, mettre en relation des opérateurs tunisiens avec les opérateurs japonais. La Roadmap est ventilée sur 18 mois en programmant trimestriellement des événements progressifs.
Aux premières loges de la Ticad-8, nous retrouvons également Ibrahim Debbèche, président du Conseil des Chambres mixtes de Tunisie. Il est positif : « Malgré toutes les difficultés, la Tunisie a compris qu’il y a des opportunités que nous devons impérativement saisir ; nous parlons beaucoup de relocalisations alors que la crise a montré les difficultés des Supply Chains. Ici, la Tunisie est capable de devenir un épicentre et à la faveur de l’organisation de la Ticad-8. Tous les programmes estiment que la Tunisie peut être le Hub par excellence vers l’Afrique. »
Selon l’ambassadeur, le ministre des Affaires étrangères du Japon viendra en Tunisie le 9 décembre pour rencontrer les dirigeants tunisiens afin de s’accorder sur la coopération étroite des deux pays pour réussir la Ticad-8 et il se chargera de lui faire parvenir les suggestions et les idées issues du p’tit déj info.