Après l’Europe, les USA et l’Asie, le géant mondial du marketing d’influence Ykone vient d’avoir pignon sur rue en Tunisie. Un partenariat stratégique scellé avec le groupe de communication, 3SG. Un beau développement pour ce groupe tunisien créé en 2002 qui s’installe désormais sur toute la chaîne de valeur de la com. Pour tout savoir sur ce partenariat, pénétrer les arcanes du marketing d’influence et découvrir les projets de la nouvelle agence, Le Manager a rencontré Hosni Ghariani, CEO de 3SG et d’Ykone Tunisie et Olivier Billon, fondateur et CEO d’Ykone. Interview.
Parlez-nous de la portée de ce partenariat.
Olivier Billon. Lancée en 2008, Ykone est aujourd’hui une agence mondiale. Elle est présente sur plusieurs marchés dans le monde, notamment les USA, l’Europe, le Moyen-Orient et l’Asie. Avec Ykone Tunisie, nous visons désormais le Maghreb. Notre portfolio contient aussi bien des marques internationales que des acteurs locaux. Notre agence de Dubaï, par exemple, accompagne le géant mondial L’oréal au même titre que Damas, un bijoutier du Moyen-Orient ou encore l’Office du tourisme de Dubaï. Nous souhaitons faire pareil en Tunisie. Bien que nous ayons une forte empreinte mondiale, l’ouverture d’Ykone Tunisie est une étape importante. Car, jusqu’alors, toutes nos agences sont donc des filiales à 100% à Ykone. Pour Ykone Tunisie, nous avons adopté, pour la première fois, le modèle de l’affiliation. Et nous sommes heureux de nouer ce partenariat avec 3SG. À titre d’exemple, nous n’avons jamais fait jusqu’ici d’événement autour du lancement de nos filiales et le concept proposé par Hosni pour Ykone Tunisie est très intéressant. Il va certainement nous inspirer pour les prochaines ouvertures. Ykone de son côté mettra à disposition un logiciel développé en interne qui permet d’identifier les influenceurs, de les classer et de les évaluer… Nous allons également apporter une nouvelle méthodologie pour briefer les influenceurs. Pour le reste, tout sera créé localement.
Hosni Ghariani. Effectivement, 3SG apportera son expertise en matière de créa pour proposer de nouveaux concepts artistiques. De fortes synergies peuvent être développées avec notre agence de communication 3SG et notre régie média OMD qui nous permettra de mieux répondre aux besoins de nos clients de l’élaboration de la stratégie de communication jusqu’au placement sur tous les canaux. Ce qui leur permettra et d’optimiser et de maximiser le reach de leur plan de communication. Aussi, ce partenariat va nous permettre de restructurer le marché du marketing de l’influence en Tunisie. De par notre présence dans le secteur de la communication depuis plus de 20 ans, nous avons constaté quelques lacunes, notamment avec l’apparition du marketing d’influence. Nous nous sommes donnés pour mission d’organiser le secteur. C’est pour cela que nous avons noué ce partenariat avec Ykone. Cette collaboration va nous permettre d’avoir accès à un important savoir-faire notamment en termes de process, du know-how et surtout d’innovation. Ceci va nous permettre de faire bénéficier nos clients d’un service inédit. La Tunisie sera une base pour lancer de nouveaux projets dans la région tel que le prochain lancement d’Ykone Maroc. Nous sommes également en prospection pour un pays d’Afrique subsaharienne.
Comment conciliez-vous data et créa à Ykone ?
Olivier Billon. Lorsque Ykone a vu le jour en 2008, la plupart des plateformes qu’on connaît aujourd’hui n’existaient encore pas. À l’époque, nous collaborions principalement avec les blogueurs et je me rappelle que ce n’était pas facile de concilier data et créa, mais notre logiciel a rendu la tâche beaucoup plus facile. Aujourd’hui, cette solution nous permet d’analyser l’activité des deux milliards de personnes qui sont activement présentes sur les réseaux sociaux pour identifier les 50 mille influenceurs dans le monde entier. À vrai dire, l’idée de créer ce logiciel nous est venue par pur hasard : lors du déménagement de nos anciens locaux, notre directeur créa a été installé aux côtés d’un ingénieur informatique. La richesse des discussions entre les deux nous a donné l’idée de créer notre solution! Aujourd’hui, nous disposons de tout un bureau de recherche et développement basé à Bangalore en Inde. Nous avons déjà investi 2 millions d’euros dans le développement de ce logiciel.
Hosni Ghariani. D’ailleurs, notre logiciel nous a permis de détecter les 800 influenceurs les plus importants en Tunisie. Il nous permet également d’analyser leur communauté, d’évaluer à juste titre leur force. Ceci nous fait gagner énormément en efficacité.
Quels sont les indicateurs qui ont motivé cette installation en Tunisie ?
Olivier Billon. À vrai dire, plusieurs facteurs entrent en jeu lors de la prise de décision pour s’installer dans un pays. Il s’agit principalement de voir si la population est jeune, si ces jeunes contribuent activement à la croissance et la créativité dans le pays, ainsi que la progression d’Instagram sur le marché et la qualité des influenceurs locaux. C’est ce qui explique par exemple le grand succès qu’a eu Ykone à Dubaï.
Hosni Ghariani. C’est réellement les synergies que nous avons détectées et qui sont source indéniable de valeur pour nos clients et pour nous. Nous gérons les budgets de nos clients sur la partie média. En effet, en gérant les budgets média de nos clients, nous avons constaté que les dépenses marketing dédiées à l’influence sont en train de croître rapidement. D’un autre côté, il y a lieu de remarquer que ce marché n’est ni structuré ni organisé. Et pour cause : bien que les créateurs de contenu font du bon travail en Tunisie, ils n’ont ni les moyens ni le know-how pour créer des campagnes structurées. Avec Ykone, nous allons disposer d’un benchmark international et bénéficier de l’expérience de l’entreprise sur d’autres marchés. Notre mission est aussi de faire connaître le marketing d’influence et d’élargir ce marché en Tunisie. Nous voulons aider nos clients à se hisser à un niveau international.
Comment Ykone est-elle parvenue à devenir le leader mondial du marketing d’influence ?
Olivier Billon. C’est simple : nous étions les premiers à y penser ! En fait, le marketing d’influence était, et l’est encore, très lié au contexte local. Et, jusqu’alors, personne n’a réussi à structurer une offre de marketing d’influence globale. Bien évidemment, ce n’était pas facile de monter un réseau pareil, surtout que nous avons opté jusque là pour une croissance organique. Aussi, Ykone est réellement un mix entre une agence de pub et une agence de marketing d’influence “classique”. Nous ne nous contentons pas de jouer un rôle d’intermédiaires. Nous intervenons sur le volet artistique afin de pouvoir répondre aux besoins des marques. Ykone se distingue également grâce à sa solution propriétaire qui permet de gérer les campagnes de grande échelle. Nous avons développé cette solution car, juste après le lancement d’Ykone, nous nous sommes rendus compte qu’aucune solution ne permet de gérer des campagnes avec 200 ou 300 influenceurs.
Que cherchent les marques chez les influenceurs ?
Olivier Billon. Les marques cherchent de la puissance des influenceurs, une garantie d’exécution et que les influenceurs soient encadrés, autrement dit, un reporting clair. D’ailleurs, notre logiciel permet d’adopter une certaine méthodologie dans un domaine qui est encore relativement amateur. Il nous permet de définir le prix, les modes de reporting, … C’est cette méthodologie qui a fait qu’aujourd’hui, nous travaillons à 95% pour des grands groupes de beauté, consommation, automobile, … Ces groupes cherchent de l’assurance et de la sécurité. Dans ce sens, le logiciel permet de vérifier la véracité des followers, d’avoir un aperçu sur leur démographie, de certifier que l’audience qu’on achète a une affinité pour la marque. Le marketing d’influence est au croisement de chemin entre le contenu et le placement media. Les marques ont besoin de créer du contenu, mais aussi d’exposer celui-ci à des milliers d’internautes. Et les influenceurs répondent à ces deux besoins. Dans un schéma traditionnel, une agence créa se charge de la partie “création de contenu” alors qu’une agence d’achat d’espace a la mission de “pousser” ce contenu sur les réseaux sociaux. À Ykone, nous avons un modèle hybride dans lequel les influenceurs créent le contenu et le diffusent. Mais pour que ceci ait les résultats escomptés, il faut que ce contenu soit cadré et que les marques synchronisent leurs contenus diffusés sur les réseaux sociaux avec les lignes éditoriales des influenceurs.
Concrètement, comment se traduit la collaboration avec les influenceurs ?
Olivier Billon. Nous travaillons avec des marques qui ont des univers forts. Celles-ci ont besoin de décliner leur concept avec des influenceurs, en s’accrochant à des filets de sécurité et à des formes d’accompagnement. Ceci peut prendre plusieurs formes : inviter les influenceurs à des événements, leur faire découvrir les produits et les tester, etc. Nous œuvrons toujours à trouver le concept qui va plaire aux influenceurs tout en restant authentique à la marque. Dans les médias classiques, les médias produisent leurs contenus et les diffusent. Là, on passe de la diffusion à l’inspiration. Car, il ne faut pas oublier que l’influenceur est un créateur de contenu. Parmi les grandes success stories chez Ykone est la marque Maybelline de l’Oréal qu’on accompagne à Dubaï. Cette marque a été face à un dilemme. D’un côté, il n’est pas possible de communiquer avec les femmes du Moyen-Orient comme celles d’Europe et des USA. Et de l’autre côté, collaborer avec des influenceuses ne permet pas à la marque de raconter son histoire avec beaucoup de pédagogie. Pour répondre aux besoins de cette marque, nous avons donc créé un programme TV hebdomadaire … sur YouTube. Dans son talk-show, des influenceurs viennent pour parler du maquillage. Les thèmes et les produits sont choisis par la marque dans un studio qu’elle a créé mais où la parole est libre pour permettre aux influenceuses de s’adresser à leurs communautés. Je dirais que nous sommes sur des lieux de parole qui font la traduction entre les usages locaux et la marque globale. Et c’est ce que nous voulons faire en Tunisie.