À l’ère du numérique et de l’immatériel, les industries culturelles et créatives (CCI) occupent un rôle de plus en plus important dans l’économie mondiale : aujourd’hui, 10% des startups font partie du secteur créatif. Mais qu’en est-il des pays du MENA, pays au fort potentiel culturel mais dont l’économie créative n’a pas encore pu prendre son essor ? C’est le sujet qui a été discuté lors du webinar organisé par EMEA (Euro-Mediterranean Economists Association) le 27 juillet 2020.
“Les données sont indispensables pour pouvoir cartographier et analyser ce secteur dans les pays concernés, et cela reste un défi pour les SNC [Southern Neighbourhood Countries]” – explique le Professeur Rym Ayadi, présidente et fondatrice de EMEA.
Les choses ne sont certainement pas faciles pour les pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient quand on veut calculer des indicateurs. Et pour cause, les données ne sont pas toujours disponibles.
Par ailleurs, l’émergence du piratage informatique dans les secteurs du cinéma et de la musique, ainsi que la surtaxation des recettes liées à l’organisation des spectacles, rajoutent une brique aux obstacles. Cela a pour conséquence de chasser les investisseurs privés qui seraient potentiellement intéressés.
À l’Université du Caire, explique Heba Zaki, la FEPS (Foundation of European Progressive Studies) identifie plusieurs obstacles au développement des CCI. D’une part sont cités le manque de compétence et d’accès à des formations de qualité dans le domaine. D’autre part, le coût trop élevé des modèles et prototypes pour les startups n’aide pas. La FEPS a pour but de soutenir ces dernières, en particulier celles menées par la jeunesse et les femmes pour promouvoir un développement inclusif de l’Égypte.
Des projets pour développer la compétitivité des industries créatives
Afin de développer les industries créatives dans la région MENA, il faudrait de premier abord améliorer la protection des droits de la propriété intellectuelle – ce qui permettra de lutter contre le piratage – ainsi que l’accès aux marchés et aux formations. Il s’agirait de considérer l’entrepreneuriat comme une compétence clé, et de s’intéresser davantage aux “compétences du XXIème siècle”, c’est-à-dire digitales.
Sabina Nari, coordinatrice jordanienne de la réunion “CCI Ecosystems in Southern Neighbourhood Countries” a présenté deux initiatives majeures de l’EFT (European Training Foundation) dans la région MENA. La première, en Tunisie, est une charte nationale d’enseignement entrepreneurial ainsi qu’une contribution matérielle proposant principalement des équipements pour les éducateurs.
La seconde, implantée en Palestine, consiste en l’organisation de camps d’entraînement. Leur but est de développer des compétences modernes nécessaires en Palestine. Ils travaillent également pour permettre aux organisations internationales de les implanter de manière à rester en accord avec leurs programmes.
Pour ce qui est de la Tunisie, deux projets ont été mis en place pour mettre en place durablement une économie créative convenable : le premier, Creative Tunisia, mené par l’UNIDO, se concentre sur le soutien à l’exploitation de l’artisanat, moyennant des aides à l’innovation et au design, mais surtout en permettant un accès aux marchés financiers. Le second projet vise au développement des industries et des startups créatives dans les secteurs novateurs (par exemple l’intelligence artificielle dans le milieu du tourisme), en proposant des financements et en militant pour la création d’un Startup Act spécialement pour les industries créatives.
La Tunisie reste malgré tout un pays prometteur : la jeunesse, principale consommatrice des CCI, représente 60% de la population. Cela incite à un bilan optimiste pour le futur des industries créatives.