L’immobilier est l’un des moteurs de croissance, notamment dans les économies émergentes où il accompagne le développement des revenus des ménages. En Tunisie, après deux belles années juste après le déclin de l’ancien régime, le secteur est entré dans une phase de récession que le confinement a aggravée.
Ainsi, au cours du second trimestre, les ventes des trois compagnies immobilières cotées à la Place de Tunis (SIMPAR, ESSOUKNA et SITS) ont réalisé des ventes de seulement 3,406 MTND. Sur le premier semestre, le chiffre d’affaires total s’est établi à 7,878 MTND, une chute libre de 50,1% en rythme annuel. Les promesses de vente fin juin 2020 sont de l’ordre de 15,515 MTND, ce qui signifie qu’il faut un miracle pour dépasser la barre de 20 MTND de chiffre d’affaires d’ici la fin de l’année.
Ce rythme de commercialisation est problématique dans la mesure où le stock des produits finis ne cesse d’augmenter. Fin juin 2020, les constructions prêtes ont atteint 62,948 MTND et va progresser davantage au cours du prochain trimestre. Pour la SIMPAR, elle compte obtenir le procès-verbal de récolement du projet HC2 situé aux Jardins d’El Menzeh, alors que sa filiale ESSOUKNA devrait avoir celui du projet HC 5 Boumhal. Le secteur pourrait se retrouver avec le stock de produits finis le plus important depuis 2010. Cela dépend de la concrétisation des promesses de vente mentionnée plus haut.
Par contre, nous pensons que les travaux en cours vont baisser pour atteindre leur plus faible niveau depuis 10 ans. Actuellement, le stock des constructions en cours est de 31,762 MTND et les efforts des promoteurs immobiliers seraient orientés vers la commercialisation des logements prêts et l’allègement de leur BFR plutôt que vers le lancement de nouveaux chantiers.
La morosité du secteur affecte aussi toute la chaîne de valeur. Les cimentiers ont affiché un recul de 5,7% de leurs chiffres d’affaires semestriel locaux à 140,342 MTND. Pour le secteur de la céramique, les ventes locales ont perdu 16,1% à 67,218 MTND. Bien que cela reflète l’arrêt de la production durant le confinement, il ne faut pas oublier que la demande a fortement baissé, traduisant une activité limitée des professionnels de la promotion immobilière.
Sauver le secteur permettra de préserver des centaines de milliers de postes de travail directs et indirects. Parmi les mesures que le Gouvernement sortant compte proposer avant de partir, celle d’éliminer les droits d’enregistrement de 3% sur les achats inférieurs à 500 000 TND effectués auprès des promoteurs immobiliers et de les remplacer par 25 TND par page de contrat. Pour les biens d’une valeur supérieure, les droits vont être également revus à la baisse. Les TRE, quelle que soit la valeur du bien acquis, ne paieront que 25 TND par page lors de l’enregistrement à condition de payer en devises.
Mais au-delà de tout cela, les taux restent le grand handicap pour accéder à un logement. Au cours du premier semestre 2020, le taux d’intérêt effectif moyen des crédits d’habitation s’est établi à 10,52%, ce qui est loin d’être supportable pour la majorité des ménages. Les conséquences de la crise ne feront que dégrader l’acquisition d’un bien immobilier sur l’échelle des priorités des tunisiens.