Comment peut-on avoir une entreprise performante, des clients satisfaits et des collaborateurs motivés sans investissement, ni grands moyens? Les Japonais étaient les premiers à y répondre en inventant une philosophie de management inédite, baptisée Kaizen. La CONECT en partenariat avec la JICA et le ministère de l’Industrie et des PME ont organisé un séminaire autour de ce nouveau concept. Le but étant de l’institutionnaliser davantage en Tunisie.
À l’heure où le focus est intégralement mis sur l’innovation technologique en tant que moyen de développement, le concept japonais Kaizen a fait montre qu’une autre démarche, celle de manager autrement présente des vertus durables. L’approche Kaizen permet, en effet, de mettre en œuvre, intelligemment, les moyens humains et matériels pour atteindre les objectifs.
Des petits changements, ô combien vitaux
« Les changements font incontestablement partie intégrante du cycle de vie de l’entreprise. L’idée de l’approche Kaizen est de faire impliquer l’ensemble des employés pour mener en continu des petits changements et réaliser des activités qui produisent de la valeur ajoutée en permanence, en vue d’atteindre les objectifs. », avance Go Ohga, chef adjoint du projet. En d’autres termes, il s’agit de rompre avec les méthodes de management classique et hiérarchique; et ce, en valorisant l’employé. Ce dernier doit nécessairement s’imprégner de l’état d’esprit Kaizen. Il aura pour mission de remettre en question les pratiques actuelles de l’entreprise ainsi que les étapes du processus de fabrication, mais également de proposer des solutions.
Les objectifs à atteindre consistent en l’amélioration de la qualité, de la productivité et par conséquent de la compétitivité. Pour ce faire, la méthode Kaizen permet l’optimisation des conditions et du temps de travail, une meilleure gestion des stocks, des pertes et des gaspillages ainsi que l’amélioration du temps de changement des outils et la qualité du produit ou du service.
Quand bien même les changements effectués sont généralement très simples, ils demeurent d’une grande valeur ajoutée. Expérimentalement prouvé : l’aménagement d’une usine peut apporter des gains incroyables. Le Système de production Toyota (TPS) en est une référence mondiale. Cette stratégie de management a été adoptée, pour la toute première fois en Tunisie, depuis 2009.
Le Kaizen made in Tunisia
Le projet pilote tunisien de la mise en place du concept Kaizen a été initié par l’Agence de coopération internationale du Japon (JICA) en date de 2009. Il s’applique sur deux phases ; la première s’est étalée sur la période allant de 2009 à 2013. La phase actuelle qui arrivera à terme à l’horizon de 2019, vise à ancrer cette culture entrepreneuriale au sein de 72 entreprises. « Pour vulgariser ce concept, des maîtres-formateurs ainsi que des experts japonais assurent une formation aussi bien pratique que théorique pour 30 formateurs, au sein de huit centres techniques. A l’heure actuelle, 54 entreprises en bénéficient», a déclaré le représentant de la JICA en Tunisie, Toshifumi Egusa.
Bien qu’elle soit simple, cette stratégie est une réponse au grand défi des entreprises. Les résultats sont surprenants, même imprévisibles. En effet, l’expérience tunisienne a montré que le taux d’amélioration en termes de qualité et de productivité a atteint en moyenne 55% au lieu des 20% prévus.
L’évolution exponentielle de l’entreprise SOMEF, œuvrant dans le domaine d’appareillage électronique en est témoin. Grâce à l’adoption de cette technique de management, les employés ont pu eux-mêmes détecter la défaillance les empêchant de se développer. Il s’agit du gaspillage. « Rien que pour le premier chantier qui date de 2009, nous avons réalisé un gain de 42% en termes de surface et de 73% en termes de productivité», a expliqué, non sans fierté, le DG de l’entreprise.
Pour sa part, le secteur de l’industrie s’appuie sur le Kaizen, pour créer de la richesse. En effet, la stratégie 2020 adoptée par le ministère de l’Industrie et des PME dont l’objectif est d’atteindre un taux de croissance de 5% s’inscrit dans une logique Kaizen. Cette stratégie repose sur quatre axes essentiels à savoir le renforcement de la compétitivité du secteur, le développement des activités prometteuses, l’accélération du rythme de développement des PME et la promotion de la Tunisie, site industriel.
«Si on pouvait réellement faire accroître le taux d’amélioration en matière de productivité et de qualité de 55% dans le secteur industriel qui représente 17% du PIB, les profits seraient exceptionnels.», a indiqué Slim Feriani, ministre de l’Industrie et des PME. Après le constat, après le rêve, vient le souhait. Les éminentes personnalités présentes à cet événement crucial dans la sphère entrepreneuriale ont toutes exprimé leur désir de généraliser ce concept, ayant transformé Tokyo d’une terre aride au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en une industrie qui tourne à plein régime.