Lors du confinement, tous les tunisiens sont partis en pralinage aux différentes enseignes de la grande distribution pour constituer leurs stocks de sécurité. Les chiffres du secteur sont donc les premiers à pouvoir refléter le comportement du consommateur tunisien durant la pandémie. Les indicateurs d’activité trimestriels de MG et de Monoprix sont d’une grande utilité.
Paradoxalement, et en dépit des retraits massifs de liquidité et les transferts sociaux importants, le chiffre d’affaires mensuel moyen par magasin s’est établi à 687 672 dinars, en baisse par rapport à l’ensemble de l’année 2019 (715 797 dinars). Mais comparativement à la même période en 2019, c’est une progression de 3,9% qui a été observée.
Cela peut s’expliquer par deux principales raisons.
La première est la gestion des flux des clients, avec la limitation du nombre de personnes présentes simultanément dans un seul magasin ainsi que la réduction de la durée d’ouverture des points de vente à cause du couvre-feu. Alors qu’elles ferment habituellement à 21H, les enseignes n’acceptent plus de personnes après 16H, ce que les prive de 5 heures de travail.
La seconde est le mix produits du panier moyen des consommateurs qui se sont focalisés sur les matières de première nécessité et dont les prix sont encadrés. Les produits chers et qui permettent aux enseignes de dégager de la marge ne sont plus demandés.
Ce qui corrobore notre hypothèse est le niveau de la marge brute qui a perdu 133 points de base par rapport à la même période en 2019 à 17,04%. La productivité par employé a naturellement baissé en dépit de la maîtrise de l’effectif moyen par magasin qui continue à être inférieur à 40 personnes.
Ces chiffres sont inquiétants par rapport au second trimestre. Si une dizaine de journées de confinement au mois de mars ont eu cet effet sur les chiffres, quelle serait l’ampleur de l’incidence de la conjoncture des mois d’avril et mai ? De plus, le pouvoir d’achat a significativement baissé avec des pressions inflationnistes.
À l’heure actuelle, le management du secteur ne dispose pas d’une marge de manœuvre suffisante pour améliorer les performances. Si le commerce en ligne a permis à la grande distribution de réaliser de beaux chiffres un peu partout dans le monde, le confinement à la tunisienne n’a offert aucune opportunité.
Dans ce contexte, le secteur va chercher à améliorer ses marges à travers de meilleures conditions d’achats. Les fournisseurs doivent donc se préparer à ce que les différentes enseignes exercent tout type de pressions, en jouant sur les délais de paiement et sur les prix offerts. Un transfert de risque qui n’est pas en faveur des entreprises.