De nos jours, être influenceur sur les réseaux sociaux est devenu le nouveau rêve collectif. Il suffit d’un smartphone pour se lancer. On voit ainsi des personnes s’exprimer avec assurance sur tous les sujets, sans aucune formation préalable : développement personnel, santé, conseils divers… et parfois même sur des thèmes sensibles, qu’elles abordent avec le ton d’experts autoproclamés. Ce phénomène, qui banalise la parole publique, soulève de sérieuses questions sur la fiabilité des contenus en ligne.
Face à cette dérive, certains pays commencent à fixer des limites. En Tunisie, le décret 54 a déjà posé un cadre pour encadrer les publications numériques. De son côté, la Chine vient de franchir un cap décisif dans la régulation de l’économie des influenceurs. En octobre 2025, le Cyberspace Administration of China (CAC) a annoncé que tout créateur de contenu souhaitant s’exprimer sur des sujets sensibles — tels que la médecine, le droit, la finance ou l’éducation — devra désormais détenir une certification officielle ou un diplôme prouvant sa compétence dans le domaine.
La mesure vise à encadrer davantage les activités des influenceurs et à responsabiliser les plateformes de diffusion. Selon le communiqué officiel de la CAC publié en janvier 2025, dans son « Projet de règlement sur les activités des institutions de distribution multicanale de contenus en ligne », les structures de type MCN (multi-channel network) doivent : être enregistrées, disposer d’un responsable du contenu, d’une équipe de modération, et « prendre des dispositions en vue de l’obtention des qualifications professionnelles ou des services habilités » lorsqu’elles exercent des activités de type spectacle ou programme.
Ce que cela change concrètement
Pour les créateurs intervenant sur des sujets spécialisés, cette nouveauté signifie qu’ils devront désormais prouver qu’ils disposent d’une formation ou d’un agrément : sans cela, ils ne pourront plus librement publier leurs analyses, conseils ou opinions sur ces thématiques. Selon plusieurs sources, les plateformes chinoises ont reçu l’ordre de vérifier que ces créateurs disposent d’un diplôme ou d’une licence adéquate.
Les plateformes elles-mêmes sont tenues à de nouvelles obligations :
- afficher explicitement quel MCN est lié à chaque compte créateur.
- mettre en place un canal de signalement dédié aux infractions des MCN ou créateurs.
- enregistrer auprès des autorités compétentes (au niveau provincial) les MCN dans les 10 jours suivant leur entrée sur une plateforme.
Pourquoi cette mesure ?
L’explosion des vidéos courtes, du streaming live et de la « monétisation du créateur » a multiplié les dérives : publications d’avis non qualifiés, recours à la provocation ou au sensationnalisme pour capter l’audience, exploitations de mineurs (« enfants-influenceurs »), pratiques de « click-bait » et de fabrication de faux flux. Le texte de la CAC mentionne explicitement ces phénomènes comme à risques : « manipulation des flux, diffusion de rumeurs, mise en scène de sujets chauds, utilisation de mineurs à des fins commerciales ».
La finalité est double : améliorer la qualité, la crédibilité de l’information en ligne, et renforcer le contrôle de l’État sur un espace numérique qu’il considère comme stratégique.








