Khalil Laabidi, Senior advisor et expert en fiscalité et développement des entreprises, a déclaré lors de la journée dédiée à la Présentation de Loi de Finances vient et organisée par Deloitte que la loi de Finance 2025 ne peut pas faire abstraction d’une conjoncture internationale compliquée.
Cette conjoncture internationale, a été marquée en ce début d’année par l’écrasement de l’euro face au dollar, qui a résulté du fait que l’Europe ait suivi une politique plus drastique plus restrictive quand les Etats-Unis étaient beaucoup plus ouverts. N’oublions pas, en même temps, que le dollar évolue mieux en période de crise et de perturbation parce que c’est une valeur refuge : il prend de l’importance. Pour la Tunisie, 80% de nos échanges se font en euros, la baisse de l’euro va nous donner un peu de compétitivité sur le marché. Mais au niveau de l’achat des matières premières et surtout pour l’énergie, on va perdre ce regain de compétitivité, car nous achetons en dollars.
La conjecture internationale se trouve alors un peu compliquée avec la faiblesse persistante des indicateurs de l’Europe : notre principal partenaire, fournisseur, client, bailleur de fonds. Sauf que sur tous les domaines, l’Europe ne se porte pas bien. Par ailleurs, dans cette même conjoncture difficile, il y a les menaces climatiques, la crise immobilière en Chine, la politique du taux d’intérêt élevé et prolongé, les guerres, une nouvelle pandémie qui éclate en Chine ainsi que Trump qui va revenir dans la maison blanche dans quelques jours.
Dans la loi de Finances 2025, nous constatons que notre budget dans cette conjoncture internationale repose sur 3 piliers, rappelle Khalil Laabidi :
- Renforcement des ressources propres de l’Etat et réduction du recours à l’endettement
Une grande préférence pour l’endettement intérieur plutôt qu’extérieur est marquée par l’Etat et sur ce plan là, il y a eu une très grande réalisation. Cette année est une année très importante, une année d’inflexion. Au niveau international, le signal a été perçu et ça s’est ressenti au niveau de notre notation souveraine. Ce n’est pas un effet de croissance, on avait considéré que l’économie tunisienne est assez résiliente. Quand tout le monde s’attendait au pire en parlant de la catastrophe tous les ans, l’économie a fait preuve d’une certaine résilience grâce à la diversification de l’économie tunisienne, à deux belles saisons agricoles, aux transferts d’argent de l’étranger, à une saison touristique extraordinaire, etc.
- Accélération de la de la réalisation des projets publics et privés
Ce qui représente le point le plus important car n’oublions pas que la reprise de la croissance d’un pays passe par la reprise des investissements publics et c’est confirmé par plusieurs théories dont la théorie Keynésienne : chaque dollar investi par l’état induit une dépense de 10 dollars dans le secteur privé. Quand l’état montre le chemin et commence à investir : des ports en eau profonde, des aéroports, des infrastructures, des équipements, le privé peut se positionner. Sinon, si l’Etat ne bouge pas, le privé ne peut pas avancer.
- L’amélioration de la gouvernance publique et la gestion des défis climatiques.
Dans le cadre de la gouvernance publique, l’Etat prépare une loi transversale avec beaucoup de changements de la gestion des entreprises publiques, au niveau du change, au niveau des institutions, au niveau des banques. L’Etat va faire appel aux experts et au secteur privé pour débattre de cette question. Il faut par ailleurs s’attendre à une loi transversale tous les deux ans, parce que de nos jours nous ne pouvons plus avoir un plan sur 5 ans, le monde change tellement rapidement, on ne peut plus parler de réforme et on reste 5 ans sans rien faire. La réforme et les mises à jour doivent être continues, pour mieux s’adapter parce que le rythme du changement dans le monde a tellement augmenté.