La 38e édition des Journées de l’entreprise, organisée par l’Institut arabe des chefs d’entreprises à Sousse, les 5, 6 et 7 décembre 2024, a démarré avec une session spéciale, pour le moins, à forte attractivité. En effet, la thématique porte sur “L’adaptation à la nouvelle réglementation des chèques” et il est question de débattre des solutions envisageables pour s’adapter à l’amendement du code de commerce, notamment en matière de chèques, de la mise en place et du développement de solutions alternatives. Dans ce cadre, Kamel Ben Mansour, huissier notaire, a indiqué que de nombreuses questions brûlent toutes les lèvres, à savoir de comprendre la philosophie du législateur concernant la loi 41 de l’année 2024, de savoir où en est-on de cette nouvelle loi et à quoi s’attendre à partir du 2 février. Et de poursuivre que le chèque, en tant que moyen de paiement, est utilisé dans le monde entier et n’est pas propre à la Tunisie.
Dans le même sillage, Kamel Ben Mansour a fait un tour de table en ce qui concerne l’utilisation du chèque qui a, à quelque endroit, pris la place de la lettre de change dans la relation commerciale entre des acteurs économiques et des particuliers ou même entre professionnels. Il a expliqué que le recours au chèque se fait bien plus souvent que celui à la lettre de change dans les paiements par facilités et est dû au fait que le créancier a un moyen de pression judiciaire sur l’acheteur. En effet, la loi prévoit une peine de prison pour ceux qui émettent des chèques sans provision. De ce fait, les acteurs économiques estiment pouvoir garantir leur dû grâce à cette épée de Damoclès, ce qui n’est pas le cas en ce qui concerne la lettre de change. Il s’agit donc d’une relation de confiance ébranlée qui justifie le recours au chèque, bien que cela ne soit pas nécessaire.
Une autre problématique se situe au cœur de l’utilisation des chèques a été de même relevée. Il s’agit des chèques qui sont émis au porteur, cela signifie qu’ils ne sont pas nominatifs. Ce type de chèque peut être passé d’une personne à une autre en tant que mode de paiement. Or, il arrive que ce chèque s’avère être sans provision. À ce stade, ne connaissant pas l’émetteur, le créancier se retrouve au pied du mur. En outre, Kamel Ben Mansour a expliqué à ce titre que le législateur s’est montré bien “clément” à l’égard de celui qui a émis les chèques sans provision. En effet, il a mis en place une procédure “conciliante” qui consiste à éviter de conclure un accord entre les deux parties prenantes et se contenter de s’adresser à un huissier notaire afin de signer un engagement unilatéral. Ce dernier engage le propriétaire des chèques à payer tout le dû dans une période maximale de trois ans.
Cependant, une question s’impose: quel est le degré de sérieux dudit engagement? Toujours selon Kamel Ben Mansour, le législateur, dans un souci de garantir les droits du créancier, propose deux options: la première consiste à fournir 10% du montant total dû, dans le cas où cet argent est disponible dans l’immédiat, en plus de faire bénéficier le débiteur de la suppression de toutes les pénalités afférentes au retour des chèques sans provision. Une fois cet engagement signé, il lui suffit de s’adresser au tribunal pour disposer d’une décharge, lui évitant la prison ferme. La seconde option est dédiée à ceux qui ne peuvent pas s’acquitter des 10% dans l’immédiat. Elle consiste à un engagement de la part du débiteur à payer 20% du montant total à l’issue d’une année. L’huissier notaire déclenche les compteurs et vérifie le bon déroulement de la procédure. Et Kamel Ben Mansour de préciser que cette démarche est valable pour ceux qui ont émis des chèques avant la date du 2 août 2024.
S’agissant de la nouvelle loi qui entrera en vigueur le 2 février 2025, Kamel Ben Mansour a expliqué que si un créancier s’adresse à une banque pour l’encaissement d’un chèque émis avant cette date, il sera confronté au rejet de cette preuve de paiement. En effet, ce chèque n’aura aucune valeur sauf s’il est certifié. De nombreux acteurs économiques, ayant entendu parler de cette nouvelle loi, ont pris peur et ont déposé tous les chèques afin de garantir leur encaissement, sachant à ce niveau que la procédure de l’engagement n’est plus d’actualité à compter de la date du 2 février 2025.