Pourquoi cette nouvelle réglementation sur les chèques ?
La nouvelle réglementation, en particulier l’article 411, intervient dans un contexte où 496 citoyens tunisiens sont actuellement emprisonnés pour des infractions liées aux chèques. En Tunisie, un système de financement s’est développé autour de l’utilisation des chèques, palliatif aux lacunes des banques et des structures de crédit. En effet, l’évolution des prêts bancaires, auparavant en croissance annuelle à deux chiffres, s’est réduite à une hausse de 3 % seulement jusqu’en mai 2024. Le coût élevé des crédits bancaires, aggravé par un taux directeur de 8 %, limite aussi l’accès au financement pour les chefs d’entreprises, indépendamment de la taille de leurs sociétés.
Les changements majeurs apportés par la nouvelle réglementation
L’une des principales modifications est la réduction de la peine de prison pour émission de chèque sans provision, ramenée à 2 ans au lieu de 5 ans. En février 2025, les chèques impayés de moins de 5000 dinars ne seront plus passibles d’emprisonnement. Pour ces chèques, la banque notifiera le bénéficiaire de l’impayé, laissant à celui-ci le soin de porter plainte. La plateforme, prévue pour faciliter la gestion des chèques, ne résout toutefois pas le problème plus large de l’accès difficile au financement et des taux d’intérêt élevés. Cette plateforme impose aux banques une adhésion pour transmettre des informations en temps réel, bien que certaines banques tunisiennes pourraient ne pas s’y conformer pour des raisons techniques.
Restrictions bancaires et préparation de la plateforme
Contrairement à la France, les citoyens tunisiens ne bénéficient pas d’un droit automatique au compte bancaire, et les banques conservent la discrétion de ne pas attribuer de carnet de chèques à leurs clients. La mise en place de la plateforme, avec une valeur de chèques compensés en Tunisie atteignant environ 123 milliards de dinars, soulève également des questions quant à la capacité de déploiement d’ici février 2025.
Impact de la réglementation sur les particuliers et les entreprises
Les prêts non bancaires assortis d’intérêts sont dorénavant passibles de 5 ans de prison pour les prêteurs et les emprunteurs. Les entreprises continuant d’utiliser des chèques antidatés, quant à elles, s’exposent à des risques d’emprisonnement. La réglementation introduit cependant des sanctions alternatives à la prison pour les chèques sans provision en cas de non-récidive. Pour les entreprises, l’alignement sur la plateforme pourrait entraîner une baisse de chiffre d’affaires, potentiellement de 10 % à 90 %, notamment dans les secteurs de l’électroménager et du matériel informatique.
Une opportunité pour les banques et le rôle de l’État
Les banques, qu’elles soient privées ou publiques, pourraient tirer profit de ce contexte en renforçant leur rôle dans le financement. L’État peut soutenir cet effort en mettant en place des fonds de garantie et des règles incitatives pour encourager les banques à financer les entreprises et à contribuer ainsi à la création de richesse dans l’économie tunisienne.