Cinq experts ont animé un panel de discussion sur le rôle des investisseurs dans le façonnement des exit strategies pour les startups à l’occasion de l’AfricArena Tunis Deep Tech & AI Summit qui s’est tenu à Tunis les 15 et 16 octobre 2024. Aiguillée par Safa Tijani, Venture Capital Analyst, une réflexion en profondeur a été menée par Sarah Ben Younès, Founder & CEO ‘V3 Factory’; Mohamed Amine Boudhiba, Associate Principal ‘Crossboundary’; Tania Eyanga, Founding co-Chair & CEO ‘Campea’, et Fadi Bichara, Founder & CEO ‘Black Box’.
Le but est de rentabiliser les actions
Pour lancer le débat, Safa Tijani reconnaît que discuter d’une exit strategy peut sembler inconfortable pour les fondateurs, mais il s’agit d’une partie capitale que tout business plan ne devrait pas négliger.
L’argument est qu’une exit strategy de startup est un plan global par lequel le ou les propriétaires guident l’entreprise vers une vente rentable de leurs actions. Elle peut aussi servir d’objectif à long terme pour l’entreprise, comme une introduction en Bourse. Et si la startup est disposée à fusionner avec d’autres entreprises, elle peut envisager des fusions et acquisitions dans le cadre de ses objectifs à long terme.
“Il faut commencer à y réfléchir très tôt car beaucoup de startups finissent par être absorbées par de grandes entreprises, l’acquisition survenant après l’investissement. Vous vous positionnez donc pour devenir plus visible. Le continent africain offre un large spectre en la matière, des investisseurs achètent une startup puis la cèdent à d’autres investisseurs qui la cèdent à leur tour… Il serait d’ailleurs intéressant de comparer les business models des divers pays pour s’en inspirer”, soutient Sarah Ben Younès.
Fadi Bichara évoque un credo omniprésent à la Silicon Valley: “L’investissement est lié à la manière de créer la plus forte valeur ajoutée possible. C’est le rôle des fondateurs que de choisir le moment de se positionner comme une cible pour les investisseurs. Le challenge est donc d’introduire un écosystème où l’évaluation est attachée à l’exit”.
Tania Eyanga souligne que si un investisseur vient à une startup, celle-ci ne doit pas penser au cash-out mais à la valeur réelle de ses infrastructures et process: “La forme la plus commune d’exit est de commencer par une fusion puis partir de là. Dans la perspective de l’acquisition, la startup doit se positionner attractivement et comprendre que les investisseurs n’apportent pas seulement des fonds mais aussi du conseil, une vision de marché, un network… C’est le même procédé pour les licornes qui sont destinées à des marchés comme le Nasdaq”.
Pour Mohamed Amine Boudhiba, les fondateurs doivent dès le début construire un business model apte à évoluer: “C’est la capacité d’évolution qui donne à la startup la liberté de choisir les investisseurs selon ses visées et son timing. Il faut se rappeler que le cas d’InstaDeep a été une réussite parce qu’elle a su choisir le bon moment et le bon partenaire”.
Un marché africain ou plusieurs variétés selon les pays
Les cinq experts du panel s’accordent sur le fait que l’exit strategy est très délicate et que les fondateurs et les investisseurs doivent être alignés pour la réussir. Pour cela, la valeur ajoutée, le bon moment, l’évolutivité sont les facteurs-clés.
Dans cette perspective, le marché africain est très porteur mais beaucoup d’ordre doit être apporté à la mentalité des fondateurs, les missions de conseil, le principe de position dominante, les textes des législations (très différentes d’un pays à l’autre). Selon eux, il faut challenger les investisseurs africains, discuter avec eux sur la scalabilité, sur ce qui a du sens et sur ce qui n’a pas, sur la profitabilité. Par-dessus tout, il est urgent de se pencher sur la qualité des data rooms car c’est de là que viennent les premières bonnes impressions et la réussite de l’exposition sur le marché, parce que le marché africain présente des sophistications très diverses selon les pays.
Les cinq experts partagent également un appel à l’évolution des standards des administrations centrales des pays pour offrir un environnement africain capable de faciliter les exit strategies.
Pourtant, tous restent collés au travail en amont qui revient essentiellement aux startups, notamment la nécessité de documenter le process dès le premier jour, de bien enquêter sur les business angels qui se présentent, de bien saisir les détails, de ne pas snober les structures de soutien et surtout de faire preuve d’une ouverture d’esprit à toute épreuve.