Poétiquement appelée ‘Fireside Chat’ (causerie au coin du feu), une réflexion sur l’investissement dans la deeptech et l’IA a été menée par Mohamed Salah Frad, General Manager du United Gulf Financial Services – North Africa, et Ahlem Gdouda, Ops Manager d’InstaDeep, à l’occasion de l’AfricArena Tunis Deep Tech & AI Summit qui s’est tenu à Tunis les 15 et 16 octobre 2024 à la Cité de la culture.
Avec un background impressionnant, Ahlem Gdouda joue le rôle de l’interviewer. À l’intersection du technologique et de l’opérationnel, elle a travaillé chez Swiss Re à Cape Town, l’African Leadership Group, Meta à Singapour, avant de retourner à Tunis pour assurer l’infrastructure et les process aux ingénieurs d’InstaDeep.
Et c’est Mohamed Salah Frad qui fait écho à ses interrogations du haut de ses 30 ans d’expérience dans la corporate finance, l’asset management, les restructurations & évaluations. Il a été chef du département Recherche et courtier leader à la Bourse de Tunis… Aujourd’hui, il aide les startups pour l’investissement et l’incubation au sein d’UGFS-NA.
En résulte un débat à bâtons rompus qui commence par une interrogation: que faire pour les jeunes porteurs de projets? Frad expose les perspectives en se basant sur ce qu’a déjà fait UGFS qui a commencé avec des investissements de 100 mille dinars pour en arriver aujourd’hui à 50 millions de dinars! Quelque 120 startups en ont déjà bénéficié, et il y a du nouveau.
«Nous encourageons les projets basés sur la deeptech et l’IA pour trouver des solutions aux problèmes du continent; précisément dans 4 domaines: healthtech notamment par la télémédecine pour donner accès à la santé, edutech avec des solutions qui permettent aux gens de travailler chez eux, energytech notamment sur les énergies renouvelables, agritech pour améliorer les rendements, l’accès à l’eau, la lutte contre les maladies animales et végétales», explique Frad.
Il évoque des expériences qui ont donné des résultats très prometteurs, par exemple avec l’utilisation d’un robot multitâches nommé Atlas, qui permet aux travailleurs agricoles d’épargner du temps et de l’énergie en prenant en charge les tâches routinières. Il parle aussi d’accès à Internet et de tablettes dédiées à l’éducation. Il évoque également de nouveaux systèmes d’application qui utilisent le machine learning et l’IA pour monitorer la gestion de l’énergie. Il souligne en outre ce que l’IA et la deeptech permettent en matière de lecture d’imagerie médicale, d’analyse des biopsies, de ciblage des tumeurs… tout en accroissant la productivité du personnel, permettant ainsi de soigner davantage de patients et sauver plus de vies.
La tendance est déjà en place en Tunisie, selon Gdouda: «Plus de 30% des startups tunisiennes travaillent dans la deeptech et l’IA mais il faut se rendre à l’évidence que ce marché est étroit. Certains se sont tournés vers le B2B mais, dans tous les cas de figure, nous n’avons pas d’autre alternative que de nous y investir».
Frad et Gdouda sont d’accord sur l’incontournable PPP mais ils estiment que l’État doit améliorer la législation en la matière et revitaliser son système d’incitations. C’est cet effet levier qui changera les choses car, déjà, les Tunisiens ont la fibre libérale et ils comprendront les opportunités impliquées.
Le mot de la fin vise justement ce partenariat public-privé qui est capable de jouer un rôle capital dans l’upgrading de l’environnement tech de la Tunisie, comme de tout le continent. Une approche collaborative qui pourrait mettre fin aux critiques sans cesse renouvelées du manque d’adéquation des réglementations et de la médiocrité des programmes d’incitation.