“L’Afrique représente notre partenaire privilégié, et la position géographique stratégique de la Tunisie en fait la porte d’entrée principale vers ce continent. Nous assumons une responsabilité cruciale envers notre pays, tout le continent, et spécifiquement envers les jeunes pousses, tant dans le secteur public que privé”, déclare Lazhar Bennour, directeur général de la Coopération économique et commerciale au ministère du Commerce et représentant du comité national Zlecaf. Et ce, dans le cadre d’un atelier de sensibilisation de deux jours sur l’accord de la Zone de libre-échange continentale africaine.
Les accords de libre-échange jouent un rôle crucial dans l’économie de l’Afrique en facilitant les échanges entre les pays membres et en renforçant leur intégration. Guillaume Gérout, spécialiste des règles d’origine pour un programme conjoint de l’Union européenne et de l’Organisation mondiale des douanes en Afrique, clarifie le fonctionnement de deux accords majeurs: la Zone de libre-échange du Comesa et la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), parfois source de confusion.
En effet, la Zone de libre-échange du Comesa, qui inclut les pays d’Afrique orientale et australe, permet une libéralisation totale (100%) des échanges entre ses membres. En revanche, la Zlecaf, soutenue par l’Union africaine, vise à libéraliser 90% des échanges conformément aux modalités tarifaires de cet accord. Cet accord ‘panafricain‘ est une lueur d’espoir offrant des opportunités aux PME. À dire vrai, la Zlecaf est la plus vaste zone de libre-échange au monde, englobant la majeure partie de l’Afrique. Ce marché unique favorise la libre circulation des voyageurs d’affaires et des investissements, tout en créant une union douanière unifiée pour simplifier le commerce sur le continent. “Parmi les 54 États signataires de cet accord, 47 ont déjà ratifié la Zlecaf et ont ainsi accepté d’être liés par ses dispositions”, souligne Gérout. Elle est prévue pour augmenter le commerce intra-africain de 52,3% d’ici à 2025, d’après les Nations unies. Elle pourrait également augmenter les revenus de l’Afrique jusqu’à 450 milliards de dollars d’ici à 2035 et sortir 30 millions d’Africains de l’extrême pauvreté. À titre de comparaison, les échanges intra-africains ne représentent que 15% du commerce total du continent, contre 58% en Asie et 67% en Europe.
Selon Gérout, chaque accord a des conditions précises pour bénéficier des avantages commerciaux. Par exemple, depuis l’adhésion de la Tunisie, les entreprises tunisiennes profitent de la suppression des droits de douane avec d’autres membres comme par exemple l’île Maurice.
Plus précisément, pour bénéficier pleinement de ces avantages, les importateurs doivent respecter les règles d’origine spécifiques de chaque accord. Cela garantit que les marchandises importées peuvent bénéficier des réductions tarifaires prévues. Par exemple, “lorsqu’une entreprise tunisienne importe des intrants étrangers, comme des produits chinois, et les transforme localement, la décision quant au marché d’exportation pour ses produits finis est cruciale. Cette décision détermine l’accord commercial qui s’appliquera”, explique-t-il. Autrement dit, les PME qui transforment des intrants importés localement doivent choisir leur marché d’exportation en fonction des accords applicables: Zlecaf pour les exportations vers ses membres uniquement, Comesa pour les membres exclusifs du Comesa, et les règles de celui-ci prévalent en cas de pays membres des deux accords.
Au cœur de ces accords se trouvent les règles d’origine, qui déterminent si une marchandise peut bénéficier des avantages tarifaires. Ces règles définissent si une marchandise est considérée comme venant d’un État membre et sont basées sur des critères stricts:
-1- Origine de la marchandise: la marchandise doit être produite en partie ou en totalité dans un État membre.
-2- Preuve d’origine: documents et certificats prouvant que la marchandise répond aux critères d’origine.
-3- Conditions de transport: assurer que la marchandise n’a pas été modifiée pendant son transport pour maintenir son statut d’origine.
Ces accords permettent de réduire les barrières et d’encourager les échanges entre les pays du continent. Pour que tous les pays en profitent au maximum, il est essentiel que plusieurs d’entre eux les rejoignent. Il est donc crucial d’accélérer la mise en place de la Zone de libre-échange continentale africaine.
Cet atelier est organisé par le Comesa Business Council (CBC) et l’EU Technical Assistance Facility (EU-TAF), en collaboration avec l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica) et le Tunisia-Africa Business Council (TABC). Les organisateurs visent à sensibiliser les représentants du secteur privé de huit États membres francophones du Comesa (Burundi, Comores, Djibouti, RDC, Maurice, Madagascar, Rwanda et Tunisie) à la plus-value de l’accord de la Zlecaf. L’atelier mettra l’accent sur le suivi des barrières non tarifaires (NTBs) et les règles d’origine, ainsi que sur l’utilisation des données de marché via l’Observatoire africain du commerce (ATO).