La réforme du cadre réglementaire du chèque semble prendre fin, avec des changements clés. Certains éléments vont radicalement changer l’utilisation de ce moyen de paiement.
Le premier est la dépénalisation des chèques sans provision de moins de 5000 dinars. Cette limite correspond presque à la taille moyenne du chèque qui s’est établie à 5 052 dinars au premier trimestre 2024, mais bien inférieure à la taille moyenne des chèques rejetés durant la même période, de 8 145 dinars. Pratiquement, cela signe la fin de la vente par facilités dans les petits commerces par le bais des chèques. Plusieurs vendeurs mettent des conditions pour accepter les chèques, comme le fait d’être titulaire et solvable selon les derniers relevés de compte, etc. Mais à quoi toutes ces diligences servent en cas de non-paiement d’un chèque de 3000 dinars à titre d’exemple? Absolument à rien, et le pauvre commerçant va se retrouver dans un cycle de procédures à l’amiable.
Le législateur connaît bien cela, et compte plutôt pousser les transactions vers un degré plus élevé de transparence. Si vous voulez récupérer votre argent, vous n’avez qu’à passer par une cession sur salaire. C’est un moyen de traçabilité qui obligera ce vendeur à déclarer ses revenus d’une part, et à ne s’approvisionner qu’auprès des fournisseurs des circuits officiels d’autre part. Le paiement en cash ne peut pas être la règle car il est interdit au-delà de 5 000 dinars et de 3 000 dinars dans certains cas.
Le deuxième est le renforcement de la responsabilité des banques. Bien que cela n’ait pas été bien détaillé, il est clair que l’intention est de responsabiliser les banques qui donnent des carnets de chèques aux clients ayant des antécédents de chèques rejetés, ou qui n’apportent pas le soutien habituel à un client. Nous pensons que les différents établissements de crédit feront davantage attention à l’attribution d’un carnet de chèques. Ils n’auront plus la main sur le lancement d’une procédure judiciaire, qui deviendra une décision du tireur.
Les catégories de chèques accordées aux clients haut de gamme n’auront également plus de sens, car la crème de la crème d’aujourd’hui pourra se transformer en une machine de distribution de futurs chèques sans provision avec des montants inférieurs à 5 000 dinars.
Le troisième élément est celui de l’introduction de la médiation pour résoudre les litiges liés aux chèques. Cela donnera un coup de pouce à un métier en émergence depuis quelques années. Il prendra la place des huissiers notaires qui verront une grande partie d’un business juteux s’évaporer du jour au lendemain.
Nous pensons que la période de transition serait difficile pour le milieu des affaires. Cela permettra un nombre plus important d’opérations bancaires, mais poussera aussi d’autres vers plus de cash et de clandestinité. Tout cela reste théorique et une évaluation de l’impact réel de cette réglementation au bout de quelques années s’impose.