Pitcher est une étape incontournable pour tout startupper désireux de lever des fonds ou de vendre son projet à une audience. Cette audience peut être variée, qu’il s’agisse d’investisseurs, d’un jury, d’une compétition ou d’autres instances. L’objectif fondamental reste inchangé : convaincre et embarquer son public dans l’univers du projet ou de l’idée.
Cependant, il est fréquent de constater que de nombreux startuppeurs omettent la première question cruciale : “Qui est mon public ?” En effet, la structure du pitch doit s’adapter à l’auditoire visé. Ainsi, le pitch destiné à un investisseur diffère de celui à visée commerciale, tout comme d’une simple présentation devant un public varié. Malgré ces nuances, la technique sous-jacente demeure généralement la même, avec quelques subtilités.
De la même manière, un stand-upper a pour mission de vendre son sketch à divers publics. Les sensibilités sociales et les contextes culturels peuvent toucher différemment les spectateurs. Une blague qui fait mouche avec un public jeune ne provoquera pas forcément le même éclat auprès d’un auditoire plus âgé. Cette réalité est aussi valable en fonction de la répartition géographique et des catégories socioprofessionnelles, entre autres. Il est donc primordial pour le stand-upper de tenir compte de ces aspects lorsqu’il partage son récit et son idée.
Fort de mon expérience dans ces deux univers, je donne la priorité à cinq points à prendre en considération pour créer un pitch percutant, à la manière d’un stand-upper !
1. Le Pourquoi ?
Tout commence par se poser la même question fondamentale, comme je l’ai mentionné dans l’article précédent : “Pourquoi ?” Pourquoi développer cette idée ? Quel est l’objectif de mon sketch ? Que doivent retenir les gens une fois que j’ai terminé ? Beaucoup de stand-uppers racontent des blagues hilarantes qui font rire, mais à la fin du sketch, le message se perd. Lorsqu’on essaie de se souvenir de l’humoriste et de ce qu’il a dit, on réalise que rien n’est resté en mémoire.
Dans le monde des affaires, il arrive souvent que lors des pitchs de compétition, les jurys posent la question classique : “On n’a pas compris ton produit ou ton idée, qu’est-ce que tu vends en fin de compte ?” Cette erreur commune découle souvent du manque de clarté quant à la problématique et à sa connexion avec la solution proposée par l’entrepreneur. Plus cette partie est limpide et fluide, plus le public peut suivre le reste du pitch. Dans le cas contraire, on perd le fil conducteur et le public se déconnecte.
2. Chaque langue a sa spécificité !
Le choix de la langue est crucial. D’une audience à une autre, la langue peut varier : anglais, français, arabe ou autre. De plus en plus, les entrepreneurs choisissent l’anglais comme langue de présentation, en raison de la standardisation et de la fréquence des compétitions internationales. Cependant, il ne faut jamais considérer le public comme acquis et supposer qu’il est à l’aise avec cette langue ou l’autre. Choisir une langue différente de celle de la majorité de l’audience peut générer un sentiment d’inconfort. En effet, défier le public avec une langue qu’il ne maîtrise pas peut clore toute interaction et rendre le pitch en une démonstration de force de maitriser une langue avec laquelle on n’est pas à l’aise. C’est au start-uppeur de sortir de sa zone de confort et de s’adapter à l’audience.
Dans le stand-up, on dit souvent que ce n’est jamais la faute du public si on n’a pas ri. La même logique s’applique au monde des startups : si le message n’est pas bien assimilé, c’est souvent parce qu’il n’a pas été correctement transmis. La langue est un vecteur essentiel pour transmettre son message. Ne jamais défier le public avec une langue avec laquelle il n’est pas familier ou à l’aise.
3. Faire passer son idée avec le moins de mots possible !
Chaque élément du pitch doit servir l’idée principale. On a tendance à vouloir dire beaucoup de choses en peu de temps, ce qui peut embrouiller le public. La solution réside dans la question fondamentale : “Pourquoi dois-je dire ceci ou cela, et en quoi cela est-il important pour mon public, et non pour moi ?” Cette distanciation est un exercice essentiel pour un humoriste lorsqu’il doit sacrifier une blague amusante qui ne sert pas son sketch. De même, il est courant que lors d’un pitch commercial, les entrepreneurs passent beaucoup de temps sur des aspects techniques de leur produit, ce qui peut être ennuyeux et moins compréhensible. Il faut se concentrer sur les avantages pour le client, apaiser ses frustrations et répondre à ses besoins.
D’un autre côté, la règle d’or dans tout cela réside dans la capacité à transmettre son message en utilisant le moins de mots possible. Plus on maîtrise son sujet et qu’on connait son objectif, moins on est confus, et par conséquent, on utilise moins de mots. Cela accroît l’efficacité du speaker et sa cohérence, tout en maximisant les chances de maintenir l’attention de so, public et de les rallier à ses idées.
4. Ne jamais prendre le public pour acquis ! Attention ‘’BID’’ !
Si tu es arrivé à cette partie de l’article, c’est que ton intérêt est piqué et que tu es également du genre à aller jusqu’au bout ( je rigole). Blague à part, ne jamais négliger l’importance qu’un public n’est jamais acquis à l’avance. On pourrais avoir le pitch le plus abouti, testé des centaines de fois, mais il est impératif de ne jamais supposer que son auditoire est acquis d’avance. Les flops, ou ce que le monde du stand-up appelle “un bid”, ne sont jamais loin.
Chaque scène a sa propre réalité et chaque situation engendre son propre retour et feedback. Autant rester constamment concentré sur son texte, se poser les bonnes questions, et essayer d’accumuler autant d’informations que possible sur son public global et ses clients principaux : les membres du jury, les décideurs, les clients finaux… Via cette démarche on se maintiendra connecté à son texte et en harmonie avec son public. Si, par malheur, l’intervention ne produit pas les résultats escomptés, on prend du recul et on analyse les raisons de cet échec à froid. Idéalement, en cas de besoin, ne pas hésiter à solliciter un feedback. Comme on le dit, ‘’feedback is a gift’’.
5. Tu es la présentation ! Ne jamais se reposer sur l’aspect technologie !
L’aspect créatif est crucial, mais sur ce point, il peut y avoir quelques nuances entre le stand-up et les startups. En général, les entrepreneurs ont tendance à créer des présentations graphiques élaborées, agrémentées d’animations éblouissantes. Cependant, il est essentiel de ne pas perdre de vue que l’essentiel réside dans l’idée elle-même. Dans l’univers des startups, il est parfois négligé que c’est l’entrepreneur qui est la présentation et que l’aspect numérique et visuel n’est qu’un moyen d’appuyer l’idée. Vous êtes la présentation ! Imaginons une panne technique : pourrais-tu présenter sans support numérique ? Voilà la vraie question.
Pour les humoristes, la démarche diffère étant donné qu’il n’y a pas de présentation PowerPoint à gérer (bien que j’aie assisté à quelques sketchs réalisés avec un PPT). La musique d’entrée et les jeux de lumière contribuent grandement à chauffer la salle et à augmenter l’énergie, mais en fin de compte, ce ne sont que des outils au service de l’humoriste pour faire passer ses blagues et son sketch. Ainsi, le texte en lui-même reste primordial : il doit être créatif, amusant et soigneusement conçu. Il est crucial de peaufiner l’introduction et la chute finale. Même sans micro, la fluidité des blagues et la simplicité des mots et des phrases doivent maintenir l’audience captivée.
Pour conclure, l’univers des startups doit énormément au monde du stand-up. Si le stand-up vise principalement à faire rire, il ne faut pas oublier que sa raison d’être découle de l’époque où la presse était sévèrement contrôlée notamment dans la communauté afro-américaine. Le stand-up est né comme un moyen intelligent d’exprimer des idées sans porter atteinte à quiconque. L’humour est devenu un véhicule puissant pour partager des idées avec finesse et élan. Comme on le répète souvent, l’humour c’est du sérieux, et des blagues pour de simples blagues ne durent pas longtemps. En revanche, donner une raison à ces blagues confère à son sketch une portée bien plus percutante.
Les entrepreneurs, ces maestros du monde des affaires qui traitent chaque mot de leur pitch comme un chef d’orchestre traite une note : avec une précision chirurgicale. Ils ont cette mantra, les 3P : Pratiquer, Pratiquer… et, sans surprise, encore Pratiquer. Voilà, le rideau tombe sur le deuxième acte de notre série “Du stand-up à la startup”. Restez avec nous, le prochain épisode promet d’ajouter une touche pétillante à votre palette professionnelle