«Je crois beaucoup à l’intelligence collective, je suis convaincu que nous sommes capables de concevoir quelque chose avec ce petit marché; en mode PPP pour en assurer la pérennisation», atteste Samir Saied.
Avec le contexte de double déficit (car nous consommons plus que nous produisons) et l’investissement public qui ressemble à un mouchoir de poche restreint, son espoir va vers l’investissement privé, l’export: «Le potentiel des exportateurs tunisiens est immense, ils l’ont prouvé à chaque fois sur le marché africain. Nous avons la chance de ‘triangulariser’ avec les Européens et les Japonais vers le continent, car nous pouvons apporter un complément à ce qu’apportent les grands opérateurs étrangers». Cela côté jardin.
Côté cour, Samir Saied regrette que notre diplomatie économique ne soit pas efficace, que les institutions de support ne soient pas assez dynamiques et que le financement, les incitations et la logistique soient médiocres. Il cite une étude qui trouve quand même que nous pourrions prendre le train en marche à condition d’aborder les marchés étrangers, spécialement l’Afrique, de manière collective, avec des consortiums d’entreprises, et de partager l’info et les coûts.
«We Have to Save the Companies !»
«Je viens du secteur bancaire et je vis un conflit quotidien entre ce que la vie de l’entreprise devrait être en Tunisie et ce qu’elle est en réalité. We Have to Save the Companies! Nous devons dépasser les obstacles, faire aboutir les idées, trouver des solutions, libérer les talents, faire confiance à l’entrepreneur. Nous sommes dans un monde de célérité et l’administration doit trouver un nouveau rythme (on parle de temps réel et de KPI). Les regards sont braqués sur nous. Dernièrement, les gens de JP Morgan m’ont posé des questions sur le temps d’attente en rade du port de Radès, le déchargement, le stationnement à quai, le nombre de conteneurs par heure, l’usage de l’énergie solaire… et JP Morgan avait conseillé l’achat du papier tunisien», soutient notre interlocuteur.
Au moins, si nous ne pouvons aider la PME, nous ne devons pas l’empêcher de s’épanouir. Pour cela, il défend quelques positions:
– Créer un champion bancaire pour l’export sur le modèle du nigérien SoniBank (partenaire de l’UIB);
– Ne pas compter uniquement sur les banques publiques en matière d’internationalisation;
– Réunir les investisseurs avec la SFI pour rechercher des alternatives;
– Creuser les idées du secteur des énergies renouvelables où la Tunisie a montré qu’elle était capable d’en exporter face à des géants internationaux;
– Comprendre que les délais de mise en œuvre des 90 réformes (nouvelles et initiales, dont 27 seraient publiées d’ici un mois) prennent beaucoup de temps;
– Comprendre que le programme national de réformes n’est pas un luxe mais une nécessité et que cette philosophie de la Tunisie a fait dire à Kristalina Georgieva, DG du FMI, que nous tenons la route!
– Toutes les bonnes volontés sont les bienvenues pour préparer les textes d’application des réformes, car le volume de travail est immense.
Il s’interroge sur le choix de réformes en série ou en parallèle? Ce n’est pas simple! Finalement, il nous confie qu’il converge vers les compromis. Il a du pain sur la planche: «Nous avons actualisé notre vision 21-25 après une série de réunions dans les 24 régions et avec les ministères concernés. Cette version sera prête pour la seconde quinzaine de novembre. La loi de finances 2023 sera également dans le cadre d’une vision avec l’association de tous les organismes concernés. Le plan national de réformes se fait aussi en concertation, preuve d’une transparence totale; et le FMI nous accordera à chaque fois entre 180 et 200 MD pour exécuter progressivement ce plan. Dans la foulée, nous avons préparé 90 mesures de relance économique. Je lance d’ailleurs un appel à tous les volontaires qui veulent nous rejoindre, car nous sommes limités en ressources humaines!».