Le vendredi 9 décembre, la Chambre tuniso-allemande de l’industrie et du commerce (AHK Tunisie), avec le concours de la GIZ Tunisie et le ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle (MEFP), a organisé un atelier d’échange pour présenter une étude sur le statut de tuteur en entreprise en Allemagne élaborée par l’AHK Tunisie, et ce, en collaboration avec le cabinet BMC (Business Management Consulting) dans le cadre du projet FIESP (Formation inter-entreprise avec le secteur privé) via sa Composante II.
L’étude permet d’exposer l’exemple allemand en matière de formation en alternance dite duale et de discuter la thématique de l’adaptabilité dans la politique nationale de l’emploi en Tunisie.
Pourquoi mettre en œuvre le statut de tuteur en entreprise ?
L’étude présentée admet que la Tunisie peut intégrer et en tirer profit. Il est un outil pour renforcer l’égalité des chances pour tous les jeunes et faire face au taux de chômage, qui a largement augmenté.
En effet, en Tunisie, on fait face aujourd’hui à un chômage “volontaire” où il existe une forte offre d’emplois dans les domaines de la main-d’œuvre tels le textile ou la câblerie, a contrario les jeunes préfèrent être chômeurs, précise Walid Keskes, chef de projet AHK FIESP, en ajoutant, d’une part, que les jeunes doivent être formés et recyclés, car la main-d’œuvre n’est pas qualifiée et, d’autre part, les jeunes, qui sont en cours de formation dans les centres, par exemple ceux qui relèvent de l’Agence tunisienne de la formation professionnelle (ATFP), ne répondent pas aux besoins des entreprises.
Ainsi, la formation en alternance, qui est assez développée en Europe, repose sur une forte intrication du système éducatif et économique d’une société où les cols bleus et les cols blancs, des établissements publics et privés, font consensus. Par ailleurs, ce parcours suit les objectifs de développement économique, soutient l’employabilité des jeunes, rapproche les secteurs public et privé.
“Un retour sur investissement qui se fait, non pas dans 20 ans, mais plutôt depuis l’acceptation du jeune apprenant au sein de l’entreprise (nouveau salarié), complément à la formation professionnelle au centre désigné par l’entreprise”, tient à préciser le chef de projet AHK.
Éviter le choc
La formation dualiste allemande révèle plus d’avantages que d’inconvénients. Elle est une porte ouverte de l’orientation précoce des jeunes dès la sortie du collège qui leur permet d’éviter le choc de la méconnaissance du milieu du travail.
“Les jeunes reçoivent un salaire et non une rémunération”, confirme Walid Keskes. En outre, les jeunes n’apprennent pas uniquement un métier mais ils deviennent également connaisseurs des valeurs. Ainsi, ils sont préparés depuis l’âge de 14 ans et ils acquièrent de l’expérience. Cette façon est rentable pour améliorer l’écosystème des investissements.
A cet âge, le jeune choisira soit de se consacrer à ses études (le lycée), soit de devenir un salarié d’entreprise parallèlement à l’école de formation. La deuxième option lui permet de passer par un matching (mission du tuteur). En cas de sélection, le jeune désigné reçoit son contrat et devient un salarié d’entreprise. L’aventure commence ainsi, où l’entreprise envoie ce jeune à un centre de formation (public ou privé) en alternance avec le boulot. Ainsi, le jeune fait ⅔ en entreprise et ⅓ en formation, a indiqué le chef de projet AHK.
Complémentarité totale entre les entreprises et les écoles de formation
Le point fort du système dual allemand, c’est qu’il assure un mariage intra-entreprises et avec les écoles de formation, a déclaré Walid Keskes, et ce, en accompagnant les apprenants, en augmentant leur motivation et en leur garantissant un travail. En fait, l’étude montre que l’Etat allemand ne gère pas l’employabilité des jeunes mais plutôt l’entreprise qui connaît suffisamment ses besoins à travers les chambres de commerce, par le biais d’un tuteur, a expliqué Walid Keskes.
A ce titre, le tuteur en entreprise est une personne physique, un bon technicien et communicant. Les critères qui font la différence sont: avoir de la pédagogie, l’aptitude morale et l’attitude professionnelle.
En Allemagne, pour avoir le titre de tuteur, on doit passer un examen, encadré par la Chambre de commerce et d’industrie de Francfort et d’autres organisations fédérales, d’une durée estimée entre 100 et 200 heures. Notons qu’au fil des années le tuteur en entreprise recevra des formations pour plus de recyclage de main-d’œuvre.
D’ailleurs, le tuteur a pour mission vis-à-vis du jeune, qui est nouveau salarié, de faire du profiling et de l’accompagnement.
Qui plus est, l’AHK, sur le plan pratique, a assuré l’accompagnement d’un ensemble d’employés et de 120 jeunes dans 4 centres de formation différents, et qui font déjà leur stage, actuellement, au sein des entreprises. Walid Keskes s’en est félicité: “Ce nombre sera dupliqué dans les prochaines années”.
L’intervention de l’AHK pour le projet FIESP se termine en juin 2023, durant laquelle les jeunes apprenants ont reçu des formations en soft skills. De même, plus de 60 managers, cadres et employés d’entreprise et également formateurs des centres ATFP, accueillant ces jeunes, ont été recyclés et ont passé une semaine de formation intensive certifiée.
Le FIESP est un projet mandaté par le ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ) et mis en œuvre par la GIZ Tunisie, en étroite coopération avec le MEFP.